Chapitre 73

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Bientôt une semaine qu'ils survolaient la forêt et Nicoleï n'en pouvait plus. Déjà que le voyage lui avait paru monotone, là, c'était pire. Il n'y avait strictement rien. Il n'avait pas aperçu le moindre animal, pas le moindre signe d'activité suspecte, pas la moindre présence humaine. Ces bois n'étaient pas habités, voilà tout, et ils étaient juste en train de perdre leur temps.

Heureusement qu'il y avait les séances d'échauffement du matin et que le Messager Ishim les faisait atterrir suffisamment tôt pour qu'ils s'entrainent un peu le soir. Comment allait-il progressser pour gagner sa troisième Barrette s'il ne faisait rien d'autre que voler ?

Ca avait été chouette, au début, parce que voler était un plaisir. De là à faire ça toute la journée, du matin au soir, pendant des jours... il ne l'aurait pas avoué à un terrestre, mais il rêvait de rester au sol une journée entière. Au moins une petite demi-journée.

Ce soir, le Messager avait prévu de faire un point plus complet autour de leur carte, alors ils termineraient leur surveillance plus tôt. Un point positif dans cette journée.

Le temps s'était rafraichi. Plusieurs fois, il avait trouvé l'herbe gelée à son réveil et ils avaient volé à travers des bourrasques de grésil. Une sensation déplaisante au possible, ça.

Nicoleï se posa auprès des Emissaires et secoua ses ailes pour les débarrasser de la fine pluie qu'ils avaient traversée un peu plus tôt. Axel s'occupait déjà d'allumer le feu – c'était devenu sa corvée attitrée – et Léo et Kiren se pressaient autour de lui pour se réchauffer. Nicoleï s'approcha de son Messager, resté à l'écart. Ce soir, ils dormiraient sous un chêne fendu par la foudre. Le tronc épais avait été presque coupé en deux sous l'imparct et une moitié s'était inclinée jusqu'à toucher le sol. Mais des branches restaient vertes, l'arbre luttait encore pour sa survie. Au moins, ils seraient à l'abri si les nuages noirs se déversaient cette nuit.

— Y a-t-il un problème, Messager ?

Ishim releva les yeux de la carte qu'il consultait.

— Je ne sais pas si nous pouvons qualifier ça de problème, dit-il lentement. Viens, rejoignons les Emissaires.

Ils se rapprochèrent du groupe pour profiter de la chaleur du feu et de la lumière. Le soleil n'était pas encore couché, ils s'étaient posés tôt.

— Alors, qu'avez-vous vu d'intéressant aujourd'hui ? questionna Ishim.

— Rien, Messager, répondit Léo. Rien que des arbres, et d'autres arbres...

— Hazel dit qu'aucun animal ne lui répond, ajouta Kiren.

— Parce qu'il en trouve ? On dirait que cette forêt est juste... vide.

— Nos rations ne dureront que deux ou trois jours de plus, dit Axel. Si nous ne pouvons pas chasser...

— Nous pourrons toujours pêcher, termina le Messager.

Face à la surprise des Emissaires, il ajouta :

— Je ne nous ai pas fait commencer par la côte par hasard. Je voulais être sûr que nous puissons nous ravitailler si la forêt se montrait hostile.

Nicoleï retint un sourire. Son Messager pensait vraiment à tout ! Vraiment, il lui tardait de le devenir, tant pis s'il devait sacrifier sa vie personnelle pour y arriver.

— J'aurais une question, Messager.

— Oui, Nicoleï ?

— Il y a un truc qui me chiffonne... nous avons fait plusieurs rotations sur la ligne de vol et... chaque fois que j'étais en quatrième position, je me sentais... bizarre.

Les Vents du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant