Épuisé, Nicoleï se laissa tomber sur un banc. Quelle horreur de marcher autant ! Il aurait tout donné pour enlever ses bottes et masser ses pieds surement couverts d'ampoules. Un bon bain, voilà ce qu'il lui fallait. Son ventre gargouilla. Et un repas chaud, tant qu'à faire. Il n'avait pas grand-chose dans sa bourse, mais encore de quoi se payer quelques nuits dans une auberge.
Nicoleï frissonna lorsqu'une bourrasque de vent s'insinua sous sa cape. Marcher l'avait réchauffé, mais maintenant qu'il s'était immobilisé, sa sueur le glaçait. Il n'aurait jamais dû s'arrêter. Avec un soupir, il s'obligea à se lever, remisa sa fatigue et sa douleur au plus profond de lui. Les vrais Mecers ne se plaignaient pas, ils agissaient. S'il voulait un jour entrer dans la légende, il ne pouvait pas se laisser arrêter par quelques ampoules. Il rajusta la cape sur ses ailes. Il avait marché jusque-là, saisi par un étrange pressentiment, alors il pouvait bien faire quelques mètres supplémentaires.
Nicoleï déambula dans les rues, s'efforça d'apparaitre comme un touriste qui découvrait la ville – ce qu'il était, quelque part. Presque toutes les maisons possédaient un commerce au rez-de-chaussée, et il s'efforçait de déchiffrer les enseignes. Tyrel était bien plus petite qu'Orein, n'était pas délimitée par des quartiers réservés à certains artisanats. Et il guettait un signe bien précis : une plume d'argent sur un parchemin à moitié roulé. Le symbole des Courriers de la Fédération. Un bureau dédié à la guilde se trouvait dans chaque ville, normalement. Et il était ainsi possible de transmettre des messages.
Une vague de soulagement s'empara de lui quand il aperçut l'enseigne. Son énergie retrouvée, il pressa le pas et pénétra à l'intérieur. Un carillon tinta quand il franchit l'ouverture, et la porte se referma automatiquement derrière lui. Stupéfait, il resta là à regarder le phénomène.
— Un simple ressort, fit une voix lasse devant lui. Vous avez un courrier à nous transmettre, j'imagine, jeune homme ?
— Oh. Oui, pardon, toutes mes excuses, débita Nicoleï à toute vitesse. Puis-je l'écrire ici ?
Derrière son guichet, l'homme acquiesça et lui désigna un pupitre.
— Il vous en coutera une pièce de cuivre supplémentaire.
Nicoleï marmonna un remerciement et s'assit. Que dire ? Maintenant qu'il était là, il hésitait. Non, c'était la seule solution possible. Seul, il n'était pas assez fort. Il se devait de demander de l'aide, c'était son devoir.
La langue pointant entre ses dents, il s'appliqua à poser ses mots sur le papier. Inutile de donner tous les détails. Il devait se montrer concis, exposer les faits sans fioritures, sans être trop alarmiste, mais en montrant quand même que la situation était quelque peu urgente. Nicoleï posa sa plume, relut son texte. Il espérait de pas avoir fait trop de fautes. Satisfait, il sabla le parchemin, avant de le plier dans une enveloppe, qu'il scella à l'aide d'un morceau de cire et d'une bougie placée sur le pupitre. Il réalisa avec retard qu'il aurait mieux fait d'écrire d'abord le destinataire, mais il était trop tard pour changer d'avis. Il reprit la plume, ajouta « Messager Ishim ou Messager Itzal – École des Mecers – Massilia », et espéra que son Messager ou celui d'Axel pensent régulièrement à vérifier leur courrier. Il avait ajouté le nom d'une auberge vue en passant, où il espérait les attendre. Maintenant, il n'avait plus qu'à croiser les doigts.
Il donna sa lettre au guichetier, qui vérifia la validité de l'enveloppe.
— Missive urgente ?
— Oui, répondit Nicoleï avec ferveur.
— Alors ça fera quatre pièces d'argent et une de cuivre. Je peux vous garantir que la lettre sera ce soir sur Massilia, et devrait donc être délivrée demain à son destinataire.
— Je vous remercie, salua Nicoleï en se délestant de ses pièces.
Dans la rue, il se sentit aussitôt le cœur plus léger. Il avait fait tout ce qui était en son pouvoir. Désormais, la suite des évènements ne dépendait plus de lui.
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Les Vents du Destin
FantasyQue faire quand vos parents ont sauvé le monde et que votre soeur a l'oreille d'un Dieu ? Axel n'a que trop conscience des regards braqués sur lui, à l'affût d'exploits à la hauteur de la réputation de sa famille. Une pression qu'il juge insupporta...