6 - Le concert de Neyli Gad

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Après son petit déjeuner en compagnie de Saloa, Neutriss se dirigea vers l'auditorium où devaient avoir lieu les concerts de la matinée. La veille au soir elle avait jeté un coup d'œil au programme de la journée et avait remarqué qu'un concerto pour harpe serait joué dans la matinée. Elle espérait que ce soit la polymorphe qu'elle avait rencontrée qui le joue. Elle s'installa dans un des confortables sièges de la salle. Elle avait programmé une alarme à vibreur haptique qui la réveillerait pour profiter du concert de harpe si jamais les morceaux précédents l'avaient assoupi.

Le festival commença par la seule symphonie de Mozart qui avait survécue à la grande extinction, plusieurs millénaires auparavant. On avait oublié son titre d'origine et on la nommait à présent La symphonie de Mozart. L'orchestre interprétait la pièce à merveille et on sentait le public transporté par la somptueuse symphonie. Neutriss, plutôt enthousiaste après ce premier morceau fut déçue par le suivant qui lui paraissait monotone et discordant, c'était une fantaisie pour trio de néovioles, un de ces antiques instruments qui avaient totalement disparu et dont les luthiers du siècle dernier s'étaient emparés pour les remettre au goût du jour, faisant la joie des compositeurs contemporains. De temps à autre le sanglot dissonant des instruments sortait Neutriss de la somnolence. D'autres morceaux se succédèrent ainsi, certains magnifiques, d'autres plus médiocres. Quelques-uns semblaient sortir de l'esprit tordu de quelques compositeurs en quête d'une reconnaissance inatteignable.

Les haut-parleurs annoncèrent Neyli Gad, une harpiste polymorphe à la renommée interstellaire. Celle-ci s'avança sur la scène arborant le même azur que la polymorphe que Neutriss avait rencontrée lors du départ. Neutriss ne pouvait apercevoir si la polymorphe apparaissait sous la même forme que l'autre mais décida de profiter pleinement du concerto. La harpiste semblait engagée dans une mélodieuse conversation avec les violons. Elle répondait par des guirlandes de notes pincées de ses doigts qui semblaient s'allonger au besoin. Les contrebasses resplendissaient dans la profondeur de leurs mélodies. La harpe enchaîna ensuite des arias baroques pour le plus grand plaisir de Neutriss.

 À la fin du concerto, cette dernière voulu aller féliciter la harpiste mais ne savait pas vers quel quartier se diriger, elle interrogea un agent de service, c'était un étrange droïde qui ne semblait pas particulièrement perspicace  « Excusez-moi pourriez-vous m'indiquer où se situent les loges des artistes ? » Le droïde lui indiqua la direction tout en lui interdisant d'y aller en tant que simple voyageuse. Neutriss fut tentée de lui présenter sa bio-puce mais se retint par peur de révéler son identité. Elle attendit simplement que l'agent continue sa ronde pour pénétrer discrètement dans le quartier des musiciens. Elle questionna un groupe de flûtistes pour savoir où se trouvait la loge de Neyli Gad et on lui répondit sans problème. Elle parvint devant la porte portant le numéro 47, le voyant de la poignée indiquait que la pièce était vide, Neutriss, attristée toqua tout de même à la porte. Personne ne lui ouvrit. Elle se retourna, prête à s'en aller et aperçut la polymorphe se diriger vers elle. Cette dernière lui demanda « Neutriss ! Je suis contente de te revoir ! Que fais-tu ici ?

– J'assistais à la journée musicale et je voulais vous féliciter pour votre performance, c'était vraiment magnifique ! répondit Neutriss. Je ne savais pas que vous jouiez si bien, continua celle-ci.

– Ça me fait chaud au cœur, j'avais l'impression de jouer devant une bande de touristes incultes qui n'étaient là que pour faire passer le temps. Je suis désolé je dois aller me changer. J'espère que nous nous reverrons bientôt.

– À bientôt madame Gad.

La polymorphe pénétra dans la loge et referma la porte derrière elle. Neutriss hésitait à retourner écouter les différentes pièces de la journée musicale ou à rejoindre ses copines dans les immenses galeries commerciales du croiseur. Elle déambulait dans les couloirs du vaisseau, indécise, en repensant aux événements des derniers jours. Elle était presque nostalgique de la confortable routine dans laquelle elle s'était lentement enfoncée ces dernières années. Entre les cours de l'université, l'aïkijutsu, les cours particuliers du professeur Tanenseï qui lui enseignait la maîtrise des forces si étranges qui parcouraient son corps sans même qu'elle en ait conscience, son adolescence semblait s'être écoulée en quelques minutes à peine. Depuis le jour où elle avait osé dire à ses parents qu'elle ne supportait plus la vie familiale et les responsabilités que cela impliquait. Elle se souvenait du regard dur de son grand frère qui voyait en elle une sœur faible qui fuyait sous le poids de ses obligations, des larmes dans les yeux de sa petite sœur, Anaël, implorante. Elle se souvenait des longs après-midi ensoleillés qu'elle passait avec ses amies sur les rives de la Dorante, une des seules régions encore épargnées de l'urbanisation fulgurante de Kanwho. Elle se souvenait des regards brûlants de Kaïton durant les derniers cours d'Aïkijutsu. Elle n'ignorait pas les sentiments de ce dernier mais se devait de garder ses distances avec lui, sa mère l'avait suffisamment prévenue des désagréments qu'engendrerait un tel amour.

Elle prit finalement le chemin des galeries commerçantes, se disant que si elle ne supportait plus l'atmosphère étouffante elle pourrait toujours aller s'assoupir sur un fauteuil du grand auditorium. Ses pas l'avaient cependant menée dans un espace du vaisseau qu'elle n'avait jamais exploré et elle s'étonnait sans cesse de l'immensité du bâtiment évoluant dans l'espace infini de l'univers. Elle choisissait à chaque intersection le chemin qui paraissait le plus important dans l'espoir qu'il la mène vers le centre du croiseur, d'où elle pourrait aisément se réorienter. Après de longues minutes durant lesquelles elle erra de couloir en couloir, elle déboucha sur une artère conduisant des quartiers des chambres aux bains relaxants. Elle reçut à cet instant une notification sur sa messagerie rétinal. Étonnée, car elle avait coupé les communications avec toutes les personnes susceptibles d'informer sa famille de sa situation, elle ouvrit le message :

« Neutriss, dirige toi vers ta chambre, tout de suite, vas-y même s'il se passe quelque chose d'anormal, tu comprendras dans quelques minutes »

* * *

Qu'est-ce que Neutriss va faire ? Que se passe-t-il ? La suite au prochain chapitre !

Que pensez-vous des personnages ? Neutriss et Kaïton vont-ils se retrouver ?

J'espère que vous aimez l'histoire jusque là. N'hésitez pas à écrire un commentaire sur ce qui vous plaît ou ce que vous pensez de l'histoire. La suite arrive très bientôt, je publie un chapitre par semaines, le samedi en général.

Le sang des Numuris - I L'ArmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant