25 - Lerhim et la conteuse

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Résumé des chapitres précédents :

Kaïton est resté seul à Trundariv, sur Neoba. Il a trouvé un travail et un logement dans la ville. Il y a quelques jours, il a eu le courage de lire les lettres que lui avaient laissées sa grande tante Li et son professeur d'aïkijutsu Akira Tanenseï. Il sait maintenant qu'en lui coule le Sang des Numuris. 

 Ce matin le ciel était beau, laiteux, clair. L'air était humide et frai. Les murs de la rue étincelaient, les arrêtes des pierres d'obsidiennes reflétant la lueur naissante d'Itomorie.

Kaïton se sentait presque en forme, ce qui n'était pas arrivé depuis de nombreux jours. Il avait passé une nuit correcte, sans doute la première qui l'avait vraiment reposée depuis la disparition de sa grande tante. Il était content d'aller travailler. Il ne supportait plus de rester chez lui à se morfondre.

Il marchait d'un bon pas, ses semelles grinçant légèrement sur les pavés mouillés. Il n'avait que cinq minutes de marche pour arriver au centre informatique du spatioport de Trundariv. Il avait été affecté à la maintenance et l'implémentation logicielle. En d'autres contrées, cette activité était entièrement automatisée mais la province de Neoba était très portée sur l'indépendance vis-à-vis de l'empire quant aux domaines stratégiques. Il y avait donc une unité de production de matériel informatique à Trundariv qui utilisait des technologies depuis longtemps désuètes ailleurs.

Depuis plusieurs années le trafic du spatioport augmentait avec le tourisme, il fallait croire que l'étrange planète était une destination en vogue pour la gente huppée des villes-mondes Proximapolis. Il fallait donc adapter l'infrastructure informatique.

Kaïton arrivait au pied du magnifique édifice, le spatioport l'impressionnait toujours par sa splendeur. Sa structure imposante mais élancée qui transperçait le ciel contrastait d'autant plus avec le reste de la ville. Il s'amusait à repenser à la façon dont ils étaient arrivés quelques semaines plus tôt. Il se rappelait comment ils étaient regardés, des étrangers. Aujourd'hui personne ne le regardait de travers. Il était devenu anonyme, c'était sans doute mieux ainsi. Ces souvenirs de ses compagnons de voyages qui s'étaient volatilisé pendant son absence le remplissaient encore de tristesse.

Il faisait le tour du bâtiment, l'entrée de service se situait à l'opposé de celle des voyageurs. C'était une petite porte automatique, en verre teinté, dessus on pouvait lire « réservé au personnel » en lettre à moitié effacées par le temps. La porte s'ouvrit sans bruit.

– Bonjour Kaïton, comment vas-tu aujourd'hui ?

C'était Irlhim, une brave femme, elle aussi du pôle d'entretien et maintenance. Elle impressionnait Kaïton par sa bonne humeur permanente.

– En pleine forme ! Et toi ? Ce n'est pas trop dur en ce moment ?

Ils arrivaient souvent à la même heure le matin, il passait l'un après l'autre, le temps que le scanner de sécurité vérifie leur identité. Ils continuaient alors la conversation dans le long couloir qui conduisait à l'ascenseur. C'était un couloir étonnant, toutes les surfaces étaient incroyablement lisses, d'un gris pale, inhomogène, comme une espèce de pâte figée. Aussi les murs étaient inclinées vers l'intérieur du couloir de sorte qu'il était plus étroit au plafond qu'au sol. Ce qui avait surpris Kaïton, lorsqu'il était venu pour la première fois, c'était l'éclairage. Il était dispensé par une sorte de serpent lumineux, ondulant, incrusté dans le sol. C'était ce tuyau luminescent qui conférait au couloir de service son ambiance si particulière, oppressante et mystérieuse. Parfois le couloir prenait une allure vraiment inquiétante. Si le serpent venait à défaillir, étant conçu d'un seul bloc, l'éclairage n'était alors fourni que par la phosphorescence des murs, une sombre lueur aux teintes verdâtres.

Le sang des Numuris - I L'ArmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant