Le sang des Numuris - I L'Arme

18 - Baltor

Il courait encore, cette fois-ci il était dans la forêt. Toutefois, il savait bien que ce n'était pas celle de son rêve. Ici les troncs étaient hauts, d'un noir profond. La lumière, pâle, laiteuse, était bien celle d'Itomorie. Il était sur Neoba. Et pourtant tout ce qui venait de lui arriver semblait tout droit sorti du pire ses cauchemars.

Il marchait à présent, le souffle court, il ne pouvait plus garder l'allure. Il repensait à Neutriss, c'était peut-être mieux ainsi, il fallait qu'ils se séparent, le destin avait bien fait les choses. Il était en colère pour ce qui venait d'arriver à sa grande tante, il n'avait rien pu faire, juste fuir.

Il venait de se lever, après un réveil douloureux de courbatures. Li avait bien pris soin de lui, lui avait raconté les derniers jours mouvementés que Kaïton avait passés dans un profond sommeil. Il se souvenait à peine de l'accident dans la bâtisse qui leur avait semblée abandonnée. La vieille femme lui avait préparé un bon repas et l'informa du plan qu'ils devraient suivre pour les prochaines semaines. En effet si des soldats de la république Oÿnosienne avaient été dépêchés sur Neoba, ça ne pouvait être que pour arrêter Neutriss, et ils reviendraient sans doute, mieux armés. Akira, avant de partir avait donc conseillé à Li de trouver au plus vite un autre endroit pour vivre et se cacher un moment.

Soudain la grande tante changea d'attitude, elle partit chercher quelque chose. Elle revenait avec une combinaison, Kaïton ne voyait pas ce qu'elle avait de spéciale, des habits et un petit papier. Elle lui dit :

– Vite mets la combinaison, les habits par-dessus et va vers Trundariv, tu trouveras de l'aide à cette adresse, dit-elle en lui tendant le tout.

Kaïton surpris par ce brusque changement de ton n'eut pas le temps de l'interroger que la vieille femme reprit :

– Ils sont là, je ne pensais pas qu'ils reviendraient de si tôt, la combinaison cachera tes rayonnements thermiques et les habits te serviront pour passer inaperçu dans Trundariv. Je reste ici, ce n'est pas moi qu'ils veulent, ne t'inquiète pas je m'en sortirai. Maintenant va te changer et pars.

Il avait enfilé la combinaison, les vêtements par dessus et avait couru sans se retourner, les larmes aux yeux. Il espérait que rien n'arriverait à sa grande tante. C'est alors qu'il avait entendu des coups de feu venant de la petite maison. Il ne comprenait plus, pourquoi le seul membre de sa famille qui lui restait et qu'il appréciait vraiment se devait de disparaître, par sa faute de plus. L'explosion avait retenti, ça devait être la maison, elle était probablement morte à présent. Il se mit à courir de plus belle. Il longeait le chemin tout en restant à couvert dans la forêt. Il se doutait que les soldats finiraient par l'emprunter puisque c'était le seul chemin qui menait à la maison de sa tante. Si ses souvenirs étaient bons il ne devait plus se trouver loin du hameau auquel Akira avaient rendu les bagalis. En effet, près d'un kilomètre plus tard un sentier bifurquait sur la gauche. Quelques maison étaient entassées dans ce petit vallon entre les collines, on les distinguait à peine depuis la route qui menait à Trundariv, si ce n'était la douce fumée qui sortait en larges panaches des cheminées. Kaïton se souvenait que Li gardait des relations plutôt amicales avec les habitants de ce petit hameau.

Tandis qu'il s'approchait des habitations une femme sortit d'une maisonnette aux volets d'un bleu pastel, elle passait presque devant lui, faisant mine de ne pas l'apercevoir. Kaïton lui demanda pourtant :

– Je suis bien au hameau de Kergunt ?

– Oui c'est ici, répondit la veille femme, que veux-tu mon garçon ? Elle se méfiait sans doute devant l'air essoufflé du jeune homme.

–Je viens de la part de Li Ernesis, elle m'a dit de frapper chez Baltor, pourriez-vous m'indiquer la porte ?

– Ah, la vieille Li, ça fait longtemps qu'on ne la pas aperçue à Kergunt, mais tu me diras, elle ne sort plus beaucoup ces temps-ci ?