Chapitre XLIX

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J'entends Clarissa hurler de terreur dans mon dos alors que je me mets à courir. J'ai l'impression d'avancer dans la semoule, et je vois les corps des deux femmes s'écrouler avec une lenteur insoutenable côte à côte.

- NOOOON ! Putain non ! Je crie.

Sophie et Tedros les atteignent avant moi et ce dernier empoigne Bastian avant de le traîner en arrière. Je tends la main vers lui et je sens ses os craquer un par un sous la pression de ma volonté.

- Arrêtez ! Ava ! Crie Agatha. Il doit être jugé ! Vous ne pouvez pas le tuer !

- Lesso ! Ava vite ! Ajoute Sophie.

Je baisse les yeux sur le corps ensanglanté de celle que j'aime. Mes genoux me lâche alors que mon regard croise celui de Léonie, allongée à ses côtés sur le sol.

- Non ! Non putain. Leonora.. . Léonie .. . BORDEL QUE QUELQU'UN FASSE QUELQUE CHOSE ! Je hurle.

Sophie secoue doucement la tête, comme si il n'y avait rien à faire. La main de la rousse se referme alors doucement sur la mienne.

- Ava.. . Ava ?

Je me calme au mieux pour l'écouter. Ma main presse la blessure sur son ventre mais le sang s'écoule à une vitesse affolante sous elle. Dans mes yeux brillent les larmes que je contiens, mais je sourie pour la rassurer.

- Ca va aller Ava.

Je rit légèrement :

- C'est toi qui me dis ça ? C'est à moi de te rassurer, pas l'inverse. Je souffle.

Elle sourie mais ses yeux se ferme. Je prends son visage dans ma main libre.

- Leonora ! Reste avec moi ! Leonora !

Elle rouvre les yeux mais je vois qu'elle n'est pas tout à fait consciente. Je presse encore plus fort contre sa blessure.

- Ava ? Ava, c'est Léonie.. .

Sophie m'indique la doyenne d'un geste, cette dernière vient de retirer la lame de son corps et la laisse tomber de sa main tremblante. Ses lèvres se teintent de rouge, puis de bleu et son teint se fait pâle.

- Appuie sur sa blessure ! SOPHIE BOUGE TOI APPUIE SUR SA BLESSURE ! Je m'écrie, paniquée, en voyant qu'elle ne réagit pas.

Elle se met en mouvement mais je sais bien que tout ça est désespéré, il n'y a aucune chance qu'elle survive à une telle blessure. Je prends la main de Léonie qui traîne, presque morte sur le sol. Elle me sourit. Les larmes me brûlent les yeux mais je refuse de les laisser s'écouler. Non. Elles ne mourront pas. Je refuse.

- Je suis désolée Ava.. . Souffle alors Lesso, les yeux mi-clos.

Je me penche pour l'entendre mieux, mon visage à quelques millimètres du sien. Une main pressant toujours inutilement sa blessure, l'autre tenant celle de Léonie.

- Pourquoi tu es désolée ? Ce n'est pas ta faute.. .

- Je sais. Mais tu mérites mieux que moi. Dit-elle faiblement en désignant Léo du menton.

Je secoue la tête et une larme roule sur ma joue.

- Non. Non Leonora. C'est toi que j'aime.

- Tu es mon "Il était une fois" Ava. Murmure-t-elle avec un sourire faible.

Je l'embrasse doucement et je la sens à peine répondre. Mon corps se met à trembler. Le sien aussi. Ses yeux se ferme et je sens un dernier souffle s'échapper de ses lèvres, heurtant avec une violence indescriptible ma joue. Je me sens m'effondrer, un étaux douloureux enserre ma poitrine. J'étouffe.

- Non putain Leonora ! Pitié me fais pas ça ! Reste avec moi !

Mes larmes s'écoulent sans fin sur mon visage, j'arrive à peine à respirer. J'ai l'impression qu'on me broie toute entière, que je vais mourir ici en suffocant d'amour pour elle. La main de Léonie presse faiblement la mienne alors que je m'écroule contre le corps sans vie de Lesso. Je pose mon front contre sa poitrine dans l'espoir de sentir son coeur battre encore, mais quelque chose me fait relever brutalement la tête. Une toux me prends et je reprends difficilement mon souffle glissant mes doigts dans la veste de la rousse. Je sens le verre chaud sous mes doigts et le bouchon en liège. Je sors brusquement la fiole contenant la larme de Raiponse et la lève entre les deux femmes.

- Putain ! Leonora reste avec moi ! Tu ne vas pas mourir ! Leonora !

Au fond de moi je sais qu'il est certainement trop tard mais je ne peux pas refouler la vague d'espoir qui s'est frayé un chemin en moi. La main de Léonie relâche doucement la mienne et je tourne la tête vers elle. Elle me sourie doucement, mais dans ses yeux s'étale déjà un voile mort.

- Merde .. . Non Léo. Mais putain non !

Mes larmes coulent de plus belle. Je ne peux pas faire ça. Si je sauve Leonora je condamne Léonie. Mais je ne peux pas vivre sans Lesso. Je ne peux pas. Mes mains tremblent.

- Je suis désolée Léonie. Il faut que je la ramène. Je souffle.

Mais je sais que je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas. Ce serait la tuer. Mais je ne peux pas perdre Leonora, j'en mourrai. Je ne peux pas. Je ne peux pas putain ! Ma main tremble de plus belle alors que mon regard passe de la blonde en train de perdre connaissance au visage blême et inerte de celle que j'aime.

- Non.. . C'est moi qui suis désolée. Murmure Léo.

Je la regarde être prise d'une toux affreuse alors que du sang perle de ses lèvres.

- Je ne te laisserai pas me tuer.

Elle arrache la fiole de mes mains, son doigt s'illumine et la fiole se brise. La goutte tombe alors. A la fois affreusement lente et beaucoup trop rapide.

L'école du Bien et du Mal IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant