Dès les premiers rayons de soleil, mes camarades se sont enfuis chacun dans une pièce différente. Me voilà seule dans ce salon inconnu avec des démangeaisons à n'en plus finir. Je pose mes griffes sur ma jambe avant de réaliser que celle-ci est anormalement poilue. J'ai un soupir de soulagement en apercevant que ce n'est pas un pelage d'animal. Simplement mon corps d'humaine, malmené par tant de changements hormonaux. Au moins ça ne me donne pas d'acné, pas comme ces foutues règles. Elles ne devraient pas tarder d'ailleurs, un bâton de plus dans mes roues qui peinent déjà à ne pas s'enliser.
June et Charly se sont habillées grâce la garde-robe de Yéléna. J'ai comme l'impression que ce genre de situation est récurrente, comme hier quand toute la bande s'est servie dans mes placards pour ne pas finir à poil. Niveau fringue, c'est vraiment le communisme ici.
Je ne sais pas trop comment Adam a pu trouver des habits aussi masculins. J'imagine que Yéléna lui en avait emprunté un jour et les avait gardés depuis. Ça me parait tout de même louche, je ne vois pas cette jolie blonde au léger maquillage se vêtir d'un t-shirt noir si banal et d'un jean couvert de patchs. Elle préfèrerait probablement qu'on la voie nue que dans un tel accoutrement. Ils se voient nus en permanence dans leur forme animale après tout, je ne vois pas pourquoi ça les dérangerait lorsqu'ils sont en humain.
Charly tire la gueule. Elle porte une jolie robe noire qui laisse un vide au niveau de sa poitrine. Je ne sais pas ce qui la gêne le plus : de porter quelque chose d'aussi féminin ou qu'on lui rappelle qu'elle est la plus plate du groupe. Sans compter Adam.
« Oooh, allez Charly, c'est temporaire, on va passer chez toi ! Tu ne vas pas partir en randonnée comme ça de toute manière, tu vas abimer les coutures avec les branches.
— J'comptais bien m'changer, t'inquiètes pas.
— Puis tu es mignonne comme tout ! » renchérit June.
Je ne sais pas si j'ai déjà vu Charly aussi mal à l'aise. Elle est toute rouge, c'est adorable ! Comme un petit garçon obligé de s'habiller en fille pour faire plaisir à sa sœur.
« Mais oui t'es adorable, pas vrai Emily ? »
Devant le sourire sadique des filles, je comprends rapidement les règles de leur petit jeu. Je m'approche de ma petite Charly, la regarde de haut en bas avant de dire, un sourire amusé en coin :
« J'trouve que ça te va bien. T'es mignonne comme tout. »
Mon compliment l'achève. Elle tourne sur ses talons toujours nus et part en direction de je ne sais quelle pièce. Yéléna la rattrape avec une force inattendue, montrant un biceps bien développé.
« On n'a pas le temps pour ça.
— Elle a raison. On passe rapidement chez tout le monde pour mettre des habits de marche et on y va. » répondis-je avec une détermination sortie de nulle part. C'est peut-être les trois thés qu'on a bus ou bien le repas que nous a cuisiné Yéléna qui m'a requinqué. Ce qui est sûr, c'est que je suis prête ! Le sommeil peut attendre !
***
On est tous équipés. Chaussures de randonnées, sac à dos rempli d'eau et boussole. Même Yéléna a fait l'effort de mettre des baskets. Elle n'a pas particulièrement rechigné, mais on a tous senti que ça lui demandait un drôle d'effort. On a enfilé des habits plutôt sportifs et courts, mais Charly elle, est carrément partie sur un uniforme militaire. Rangers, treillis et t-shirt camouflage, jusqu'à la casquette. Ça lui donne tout de même une sacrée prestance. L'habit ne fait pas le moine, mais les moines ne se baladent jamais en jean. Elle pourrait passer pour une vraie Wakizas.
Elle m'a lancé un regard profond et stoïque en sortant de chez elle, beaucoup trop sérieux pour la situation. Elle s'est ensuite jetée sur moi et a fait mine de me mettre des menottes. C'est là que j'ai compris qu'il n'y a pas que le diable qu'elle espère attraper grâce à cet uniforme, à mon grand désarroi.
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Là où le diable se terre
ParanormalEmily va accepter un poste de bibliothécaire de l'autre côté des États-Unis, dans une petite ville portuaire de l'Oregon pour prendre un nouveau départ. Alors qu'elle y emménage avec l'intention de vivre une petite vie paisible, loin des tumultes de...