Charly me sert étonnamment fort. Je constate la puissance phénoménale présente dans ses pattes pourtant bien maigres. Elle finit enfin par me lâcher et je me rassois sur ma chaise, comme libérée de prison. Ma geôlière a l'air plutôt satisfaite d'elle.
« J'ai jamais pu faire de câlin à quelqu'un en forme humaine. Pas en étant en forme animale en tout cas. Bref tu vois c'que j'veux dire.
— Non je vois pas du tout ! Et maintenant que je suis au courant, tu pourrais tout m'expliquer ?
— Ouuui mais tu saiiis je suis très fatiguée ! J'ai beaucoup couru et je me suis fait planter quand même ! Je suis pas en état, je dois me reposer ! »
Elle reprend sa voix pour jouer avec moi. J'aurais peut-être préféré que ce soit le capitaine qui me sauve finalement...
« Bon, et si on reprend notre jeu alors ? Je te pose une question, tu m'en poses une ? »
Je l'arrête immédiatement alors qu'elle s'apprête à parler :
« Tu parles de mes seins je t'éclate. »
Elle ferme alors la bouche, vexée, et décide de réfléchir à une autre question.
« Il te voulait quoi l'autre con ? J'veux dire, moi aussi j'ai un ex ou deux qui ne m'aiment pas des masses, mais aucun n'a essayé de me tuer. Pas en étant sobre en tout cas.
— C'est... c'était un malade. Un malade mental. Le genre pervers narcissique tu vois. Je sais pas pourquoi, mais il fait une fixette sur moi. Depuis qu'on s'est rencontré, il veut que je lui appartienne. Et il n'a pas l'air d'avoir apprécié que je me barre du jour au lendemain sans lui laisser de mot...
— Mmhmm. Il manquera à personne.
— Exactement. À mon tour.
— T'es vachement dure en affaire ! » dit-elle en souriant, me laissant apercevoir ses crocs. J'essaye de poser une question aussi large que possible pour ne pas avoir à supporter son interrogatoire :
« Explique-moi ce qu'il se passe. Pourquoi vous êtes tous des animaux qui parlent ?
—
Pour le cap'taine, il était fou amoureux de la mustang de son père, et le logo de la voiture c'est un cheval. Henson a toujours été un loup solitaire avec sa maladie, très solitaire. Moi j'adorais la course et j'ai toujours été très speed et rapide.
— Et vous ne savez pas pourquoi ?
— Pas vraiment... Les vieux disent que c'est une vieille malédiction que nous a lancée une tribu amérindienne à l'époque des colonies. Et cette tribu, selon la légende, ce sont les Ohanzees dont je t'ai parlé tout à l'heure, comme le "cerf" noir que tu as vu. Mais c'est tellement génial que ça ne ressemble pas à une malédiction, plutôt une bénédiction ! On aime tellement être des animaux que depuis des décennies, on a décidé de vivre la nuit pour profiter de notre forme !
— Ça explique beaucoup de choses... Même si ça reste du grand n'importe quoi.
— À moi ! »
Rrrrrrh, elle a beau m'avoir sauvé la vie, elle n'en reste pas moins insupportable.
« Euuuuuuh... Maintenant que ton ex est mort, tu vas quitter le village ? »
C'est vrai ça. Je pourrais très bien retourner à Chicago. Recommencer ma vie là-bas. Ou ailleurs d'ailleurs.
« Non. Cet endroit est effrayant, mais... Je suis trop curieuse pour partir comme ça. Puis je pense que je vais me sentir bien ici. Avec la mer. La forêt. En contact avec la nature. Puis j'ai un travail et une maison ! Même si je voulais retourner à Chicago, j'n'aurai pas d'argent ni d'endroit pour dormir. Donc non... je vais devoir te supporter pendant un moment. »
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Là où le diable se terre
ParanormalEmily va accepter un poste de bibliothécaire de l'autre côté des États-Unis, dans une petite ville portuaire de l'Oregon pour prendre un nouveau départ. Alors qu'elle y emménage avec l'intention de vivre une petite vie paisible, loin des tumultes de...