Chapitre 54 - Marlène

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Marlène n'était pas du genre patiente.

Bien au contraire, elle aimait l'action.

Marlène n'aimait pas non plus les gens qui se lamentaient et ceux qui se renfermaient sur eux-mêmes. Ça l'agaçait. Au plus haut point. Ce genre de comportement l'irritait tellement qu'elle n'en tenait pas en place. Elle avait envie de saisir ces personnes par les épaules, et de les secouer. Les secouer. Les secouer comme des pommiers. Tout en leur criant dessus de se bouger.

Sauf quand il s'agissait de Remus.

Parce que Remus... Remus ne méritait tout simplement pas de souffrir.

Marlène croyait aux âmes-sœurs. Qu'elles soient platoniques ou amoureuses. Elle y croyait éperdument. Elle pourrait en parler pendant des heures, et elle était persuadée d'être capable d'en convaincre la personne la plus cartésienne de la terre.

Marlène croyait aux âmes-sœurs, et Remus était la sienne. Elle en était convaincue. De toute son âme.

Elle en avait été convaincue au moment où il était entré dans son jeu, ce jour où ils avaient signé le bail de colocation. Plus précisément quand, juste avant qu'il ne coche la case « partenaires », il lui avait lancé un regard pour s'assurer qu'elle était toujours d'accord, qu'elle ne voulait pas reculer devant l'histoire qu'elle avait elle-même inventée, bien déterminée à obtenir cet apparentement. Elle en avait été convaincue quand il avait esquissé un sourire en secouant la tête au moment où il avait posé le stylo dans le petit carré.

Elle avait d'autant plus été convaincue qu'il était son âme-sœur le jour où il lui avait tenu ses cheveux alors qu'elle vomissait tripes et boyaux dans les toilettes. Puis celui où il les lui avait teint en rose pastel. Ou encore, ce où il l'avait laissé se réfugier contre lui dans son lit après une rupture qui avait semblé broyer son cœur. 

Ce jour-là, entre quelques sanglots, elle s'était promis de prendre soin de lui de la façon dont il le faisait avec elle. Parce que c'était ce qu'il faisait. Tous les jours, il prenait soin d'elle. Que ce soit en l'écoutant déballer des inepties sur la vie, que ce soit en l'aidant à planter des aiguilles dans un mannequin, en venant l'aider à trimballer quatre mannequins dans tout Londres pour les installer dans son atelier, quand il lui apportait une tasse de thé alors qu'elle n'avait pas daigné lui dire « bonjour », trop contrarié par une situation, quand il l'embrassait sur le front alors qu'elle venait de le réveiller en mettant la musique beaucoup trop fort et en activant tous les appareils électroniques qu'ils possédaient. Remus prenait soin d'elle, tous les jours.

Il lui avait permis de sortir sa tête des nuages gris qui l'entouraient, alors cette fois-ci, c'était son tour de lui permettre de retrouver le soleil qui brillait en lui, ou de lui rappeler que le soleil continuait de briller au-dessus de leur tête. Malgré les difficultés, malgré tout.

Remus était un introverti, il n'aimait pas spécialement la foule, mais se laissait facilement entraîner là où elle décidait de l'amener, il râlait un tout petit peu, mais la suivait bien volontiers. Ces derniers temps, il ne prenait même plus la peine de râler quand elle lui proposait quelque chose. Il se contentait de dire qu'il n'avait pas envie de sortir, puis partait s'enfermer dans sa chambre, écouteurs dans les oreilles, livre à la main. Alors elle devait redoubler d'efforts pour le convaincre.

Elle devait briller pour deux.

Elle avait organisé des soirées cinéma. Où ils venaient à bout d'un seau de pop corn plus gros que leurs deux têtes réunies. Une fois, Remus lui avait lancé des pop corn au visage. Pour Marlène, ça avait été une soirée réussie.

Elle faisait toujours en sorte de choisir les films à l'affiche qui semblaient être emplis de légèreté. Une fois, elle s'était lamentablement trompée. Tous deux avaient terminé en pleurs. Elle avait tâché de faire bonne figure, retenant ses larmes, évitant de renifler. Elle avait échoué, dramatiquement. Remus s'était tourné vers elle et avait tellement ri qu'elle avait failli s'étouffer entre ses rires et ses sanglots. Cette fois-ci aussi c'est avait été une soirée réussie.

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