Chapitre 10 - Little Women

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- Tu sais que t'es beau au milieu de mes fleurs ?

James fit une révérence dramatique, un bouquet à la main, et rigola en le rangeant dans le seau en laiton cuivré. Prenant soin de faire en sorte que les pétales se superposent d'une jolie façon et non d'une manière anarchique comme il avait eu l'habitude de le faire quand Sirius et Regulus eurent acquis le magasin.

- Je suis toujours beau, Sirius. Lança-t-il en remontant ses lunettes sur son nez et en se rapprochant du comptoir, se saisissant de la tasse de café que Sirius lui tendait. C'est apaisant, comme endroit. Alphard en a fait un super lieu, et vous avez réussi à bien l'entretenir, je trouve.

Un sourire aux lèvres, Sirius passa la boutique en revue. C'est vrai, que l'on s'y sentait bien, ici. Les énergies circulaient bien. Concernant l'agencement et la décoration, Regulus et lui arrivaient toujours à s'accorder, ayant souvent les mêmes goûts et avis. Chacun prenait soin des plantes comme si elles étaient les choses les plus chères à leurs yeux. Leur parfum n'était jamais trop entêtant. Et, malgré les couleurs parfois sombres qu'ils choisissaient d'exposer, la boutique restait toujours lumineuse. Au-dehors, le vacarme de Covent Garden retentissait, mais Black Peonies avait toujours été une sorte de havre de paix, une barrière contre le bruit et l'agitation.

Petit, il venait se réfugier ici quand les choses à la maison n'étaient pas joyeuses. Il y avait donc passé une grande partie de son enfance, caché dans l'arrière-boutique, à créer des bouquets éclectiques avec les fleurs que son oncle venait de recevoir. Parfois, il les mettait même en vente, prônant l'originalité. Quand l'un de ses bouquets était acheté, Sirius était l'enfant le plus heureux du monde.

Adolescent, il passait la porte de la boutique les traits tirés, et partait se réfugier dans la réserve. Alphard lui apportait un thé ou un chocolat chaud, l'écoutait et lui parlait. Puis, pour que son moral remonte, et pour se prouver qu'il valait bien quelque chose, il passait de l'autre côté du comptoir et réussissait à vendre les compositions les plus chères. Il avait toujours été un très bon orateur. On lui avait appris à l'être, même si sa parole n'avait pas de poids la plupart du temps. C'était assis dans la réserve qu'il avait révisé son examen de médecine. C'était là, le premier endroit dans lequel il avait accouru, diplôme en main attestant qu'il était maintenant professionnel, pour ouvrir une bouteille de champagne et fêter les longues années d'études finalement récompensées.

C'était entre ces murs qu'il avait versé des larmes de tristesse, de rage, mais aussi de joie. C'était ici qu'il s'était senti en sécurité pendant son enfance. Les couleurs des fleurs chassant la grisaille de son quotidien.

- C'est ton seul jour de repos de la semaine, James, tu voudrais pas t'en servir pour vraiment te reposer plutôt que de me tenir compagnie ?

- Nan ! Justement, j'en profite pour passer un peu de temps avec toi. On ne se voit plus.

Il haussa les épaules, une moue triste sur ses lèvres.

Ils se voyaient. Toujours. Tous les deux jours. Et les jours où ils ne se voyaient pas, ils s'écrivaient, sans faute, tous les jours. Mais il était vrai que le temps qu'ils passaient ensemble semblait être bref. Trop rapide. Jamais vraiment satisfaisant par rapport à avant. Comme si, lorsqu'ils se quittaient, leurs conversations restaient inachevées.

Alors, au lieu de répondre que James disait n'importe quoi, Sirius inclina la tête pour acquiescer. Ça ne servait à rien qu'il se cache derrière un "mais non James, tu dramatises", tous deux savaient très bien que le travail de James avait pris énormément d'ampleur, empiétant sur beaucoup des petits moments de sa vie.

- J'ai prévu une surprise à Lily ce soir. Lança-t-il joyeusement, une étincelle dans les yeux, en passant une main dans ses cheveux.

- Inonde-moi d'amour, Mr Loverman.

TendernessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant