Chapitre 8

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Le feu. Un corps. Des cendres. Un iris bleu.

Harold se réveilla en sursaut dans sa nouvelle chambre, le front en sueur. Ce cauchemar avait fait déserter son sommeil, malgré le fait qu'il soit fatigué. Et il sentait que ça n'allait pas finir avant que cette armée ne soit détruite. Après avoir soupiré, il se leva et se dirigea vers la fenêtre. Il ne savait pas quelle heure était-il, mais dehors, il faisait noir et les torches étaient toutes allumées. Quelques gardes patrouillaient au pied du palais au cas où.

Il leva son regard vers l'étendue verte par-delà les remparts du château. Les soldats de Dunbroch étaient partis il y avait quelques heures. Le brun savait que le trajet serait assez long, mais il ne tenait pas en place. Il avait hâte de revoir ses enfants et leur donner un toit digne de ce nom. En espérant que cela leur rendrait un minimum le sourire. Mais c'était sûr qu'ils ne le feraient pas avant un bon bout de temps.

Zéphyr et Nuffink étaient sûrement ballotés de tous les côtés à l'heure qu'il était. Ils n'étaient que des enfants et ils avaient besoin de sommeil. Autant de déplacement les avaient sûrement fatigué. Ils n'arriveraient pas au palais avant la journée, mais Harold avait décidé d'attendre, ne souhaitant pas refaire de cauchemars. Son cœur ne le supportait plus. Alors, le chef posa son front contre la vitre et pleura.

Ainsi allait la vie, mais il ne pouvait pas l'accepter. Astrid était tout son univers. Sa raison de vivre. Il l'avait aimé depuis l'enfance jusque là. La perdre avait été un tournant trop brusque dans sa vie. Et là, il devait s'habituer à ne plus jamais l'entendre ni la voir. Son cœur était plus blessé que jamais. Il aurait aimé tout laisser tomber et aller à la poursuite de ces meurtriers, mais il avait encore ses enfants.

Et en se rappelant d'eux, il se dit qu'il n'avait pas tout perdu finalement. Il lui restait encore ses enfants. Et eux, il ne laisserait jamais personne leur faire du mal. Ils étaient tout ce qui lui restait d'Astrid. C'étaient sa progéniture, la chaire de sa chaise. Zéphyr et Nuffink étaient sa seule raison de vivre. Sa toute dernière raison de vivre.

Le lendemain, il sortit de la chambre — proposée par Mérida — et tourna en rond dans le palais avant de croiser une servante. Cette dernière portait un plateau rempli de nourriture.

— Oh, excusez-moi! Héla-t-il.

La servante s'arrêta et se tourna vers lui. Sa première réaction fut de dévisager ses habits. Ce n'était pas tous les jours qu'elle voyait un homme habillé de la sorte.

— Pourriez-vous me dire où se trouve la reine?

— Justement, j'étais montée pour vous chercher. Sa majesté est dans la salle à manger. Elle vous y attend.

— Merci. Et où est cette salle à manger?

— Veuillez me suivre, je vous prie.

Il talonna la dame et retint les directions à prendre pour ne pas se perdre dans un aussi grand château. Après quelques instants, il arriva dans la salle à manger où était assise Mérida. La table était immense et quelques plateaux étaient posées dessus. La solitude régnait dans la salle et Harold l'avait remarqué. Quand il s'approcha, Mérida lui lança un bonjour froid sans détourner le regard de son assiette.

Le chef vit une autre assiette à l'autre bout de la table. Il en conclu que c'était sa place.  Mais était-ce vraiment sa place? Peut-être attendait-elle un invité. Le brun lorgna la chaise, incertain.

— Qu'est-ce que vous attendez pour vous asseoir? Une invitation? Demanda Mérida.

Un peu confus, Harold ne répliqua rien et prit place. C'était un peu étrange de manger à la même table que quelqu'un d'autre à part ses amis et sa famille. D'autant plus que c'était une reine. Les manières de se comporter à table sur Beurk n'étaient sûrement pas les mêmes que sur Dunbroch. Y avait-il des règles pour manger à Dunbroch? Si il y en avait, le chef de Beurk ne les connaissait pas. Peut-être valait-il mieux engager la conversation pour éviter un malaise.

— Et vos frères? Demanda-t-il.

Mérida leva un sourcil en levant la tête.

— Ils ne viennent pas manger?

— Mes frères se lèvent très tôt le matin pour les entraînements matinaux avec les soldats. Ils ne prennent le petit-déjeuner qu'après cela.

Harold hocha la tête, comprenant enfin la présence de cette solitude qui semblait si habituelle à Mérida. Mais cette réponse rapide avait mit fin à la discussion. Le brun ne savait plus quoi dire. Et Mérida non plus d'ailleurs. Elle savait qu'il fallait engager la conversation pour paraître un peu plus aimable. Mais dire quoi? Elle n'était pas douée pour papoter. Sauf si la discussion portait sur les stratégies militaires ou des affaires royales.

Même avec ses frères, elle n'était pas très loquace. Comment allait-elle mettre à l'aise un autre souverain? Si c'était pour signer un traité ou un accord, elle aurait trouvé quelque chose à dire. Mais là, elle n'avait rien en tête. Ce constat montra à Mérida qu'elle n'avait plus de vie sociale normale depuis un certain temps.

— Et vous? Avez-vous des frères ou des sœurs? Tenta-t-elle.

— Non, je... Je suis fils unique.

Encore un silence.

— Donc, si vous aviez une femme, vous avez sûrement des enfants, non? Reprit-elle.

— Oui. J'en ai deux.

— Et où sont-ils?

— Avec le reste du village.

Harold avait la tête baissée, le regard perdu dans sa nourriture. Mérida l'avait bien remarqué. Ça devait être vraiment dur d'avoir perdu son épouse. Elle n'osait imaginer sa souffrance. Ni celle de ses deux enfants. Aussi jeunes, et déjà orphelins de mère. La reine avait de la peine pour lui.

— Je suis désolée pour votre femme.

— Ce n'est pas de votre faute. C'est celle de cette armée fantôme.

— Je vous promet que nous les anéantirons jusqu'au dernier.

— Merci de votre aide.

Il lui sourit et elle le lui rendit. La tension qui chargeait l'air avait enfin disparue. Harold et Mérida se sentaient moins gênés qu'au début. Mais cette gêne reviendrait sûrement si ils ne disaient pas un mot. Cette fois, ce fut Harold qui prit la parole.

— Avez-vous déjà envoyé les missives?

— Oui. Les dirigeants de Corona et Arendelle arriveront d'ici sept jours.

— En passant, qu'est-il arrivé aux anciens souverains de ces deux royaumes? Beurk n'est pas très ouvert au monde, donc rares sont les informations qui nous viennent.

— Les souverains de Corona ont été tués par la même armée qui a tuée mes parents et votre femme. Depuis six ans, c'est leur fille Raiponce qui gouverne aux côtés de son compagnon qui est capitaine de la garde royale.

— Et Arendelle?

— Arendelle a été gouverné par la reine Elsa pendant un temps. Mais elle a décidé de prendre un autre chemin et donner le trône à sa jeune sœur, la princesse Anna. Maintenant, c'est elle qui gouverne.

— Et elle n'est pas morte.

Mérida hocha la tête.

— Pourquoi? Demanda-t-il.

— Ce monde regorge de magie, vous savez. Ça ne serait pas étonnant si une force magique avait aidé Arendelle à repousser l'armée fantôme.

— Oui, vous avez sûrement raison. Et en parlant de magie, est-ce que tour ce qu'on raconte sur votre royaume est vrai? Je veux dire, les légendes.

— Mordu? Les feufolets? Les sorcières? Oui, elles sont toutes vraies. J'en ai fait l'expérience.

— Attendez, vous voulez dire que...

— Nous parlerons de cela plus tard. Nous devons d'abord nous préparer à accueillir votre peuple, ainsi que vos enfants.

Harold lui lança un sourire avant qu'elle ne s'en aille. Cette Reine Ours avait piqué sa curiosité.

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