Méthodologie, oral, analyse, lexique... Le classeur de Hadda est tout ce dont j'avais besoin. En plus, c'est bien rangé. J'vais pas galérer à me repérer dans ses cours. Tant mieux, c'est déjà ça de pris pour moi qui ne suis vraiment pas méthodique. Je referme le classeur et le dépose sur mon bureau, histoire de ne pas le louper et de l'avoir à portée de main tous les jours pour ne pas oublier de l'étudier.
Hadda me surprend. Je ne l'ai pas encore cernée. D'un coup, elle paraît être cette fille timide et en réservée, d'un autre, elle semble hyper ouverte et spontanée. Elle a l'air d'être drôle, je ne l'aurais pas deviné. Je pense qu'on pourrait bien s'entendre, elle et moi. J'aime bien les gens pas prise de tête avec qui on peut rigoler pour n'importe quoi. En tout cas, je suis bien content qu'elle m'ait proposé son aide. Je n'aurais pas osé demander. En général, j'préfère me débrouiller seul. Je déteste mendier pour de l'aide, et encore moins me savoir redevable envers une personne qui ne l'oubliera pas. Les gens, on dirait qu'ils croient t'ouvrir les portes du Paradis quand ils t'aident pour un petit truc. C'est ça qui me zehef le plus. Les gens sont prêts à tout pour gratter le moindre intérêt et je hais ce genre de relations. J'préfère quand c'est sincère et spontané. On s'aide si besoin, si on le veut bien, sans rien attendre en retour et khlass. En vérité, c'est aussi une faiblesse de ma part, ce côté têtu, parfois trop solitaire. Ça se transforme souvent en de la fierté mal placée qui m'emporte dans de sacrés bourbiers. Ma grand-mère me répète sans cesse que je dois davantage m'ouvrir, arrêter de m'enfermer dans mes problèmes. À qui la faute ? Si on ne m'avait pas abandonné dès mon plus jeune âge, j'aurais peut-être fait confiance aux autres, mais dès le début du film, on m'a prévenu que la vie n'était pas un long fleuve tranquille et qu'on ne pouvait compter que sur soi-même.
Petit, la race humaine est méchante, je suis venu j'ai vu j'ai vaincu ces chiens la queue entre les jambes.
Heureusement, j'arrive à garder la face. Au lycée, tout le monde pense que j'suis un mec qui a tout pour lui : le bonheur absolu, la confiance en soi, un entourage aimant.... Le genre de mec qui sait prendre les choses avec légèreté et détachement. C'est loin d'être la réalité. C'est seulement une étiquette qu'on m'a imposée et que j'ai trouvé plutôt cool d'accepter. Parfois, en faisant semblant, on finit par y croire réellement. Peu de gens décèlent mes failles. C'est ce qui m'intrigue aussi chez Hadda. J'ai remarqué qu'elle analysait beaucoup les gens. Je le sais parce que je fais la même chose : plisser un peu les yeux lorsqu'on te parle, pencher légèrement la tête sur le côté, rester silencieux au début d'une conversation avec une personne que tu viens de rencontrer... C'est le genre de personne qui dévêt bien vite les déguisements sociaux qu'enfilent les gens. Peut-être que le mien est déjà tombé sous son regard. Lorsqu'elle m'a proposé son cahier, j'ai comme eu l'impression qu'elle répondait à l'appel au secours qui dansait dans mes yeux à la suite de cette heure interminable de français.
*
Emmitouflé dans ma couette, je regarde une seconde fois son profil Facebook. Toujours rien. Je ne peux toujours rien voir. Je scroll tout de même les quelques informations qu'elle laisse voir aux inconnus. Date de naissance. Ville. Amis en commun.
Click.
Fais chier. Putain de merde. Une sueur froide coule le long de mon dos et un pincement au cœur me nargue comme pour contester la bêtise que je viens de commettre. Sans faire exprès, mon doigt a glissé sur « Envoyer une demande d'ami ». J'espère qu'elle ne va pas croire que je suis à fond sur elle, parce que ce n'est pas le cas. De toute manière, elle m'a bien dit que je pouvais la contacter si j'avais besoin d'aide. J'espère qu'elle s'en rappellera. Que pour les cours. C'est tout. Je l'ai demandée en amie seulement pour les cours.
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Amour chronique [J'écoute encore les étoiles chanter] - TERMINÉE
Teen Fiction[Complète] C'est un soir qu'il est parti. Sans un mot. Sans un bruit. Le lendemain de son départ, Hadda trouve une lettre sur le bureau de son grand frère. Je ne reviendrai pas, a-t-il écrit. Mais Hadda refuse de se contenter de l'histoire officiell...