Alors que nous nous dirigeons vers la sortie du lycée, au loin, j'aperçois Demba avec ses amis du basket. Je me force à lui accorder le bénéfice du doute mais son comportement équivoque m'oblige à me méfier de sa présence ce jour au CDI. Depuis notre discussion au sujet de Hedi, j'ai comme l'impression qu'il essaye de m'empêcher de le fréquenter. Si c'est le cas, c'est de la jalousie mal placée. Je ne comprends pas ses réactions. Je ne veux plus le croiser de nouveau aujourd'hui. J'attrape le bras de Hedi et lui fait signe de me suivre afin qu'on emprunte le chemin que j'ai choisi pour contourner Demba. Nous nous dirigeons vers le JDP, en face du lycée. Sous mes doigts, je sens les poils de Hedi s'hérisser. Il me jette un coup d'œil surpris. Je n'aurais pas dû être aussi tactile, mais c'est ce qui arrive lorsque je me sens à l'aise avec quelqu'un. Je manifeste rapidement mon affection. Je réalise soudain que cela ne va peut-être pas de soi pour un garçon comme lui, que ce geste peut être perçu comme ambigu. Personnellement, j'ai été habituée à avoir des amis garçons, je n'agis pas différemment en fonction du genre de la personne en face de moi mais, lui, je ne sais pas s'il a l'habitude de fréquenter des filles en dehors de ses conquêtes amoureuses. Je lâche brusquement son bras, pour éviter qu'il se fasse des films. J'ai déjà été assez maladroite et spontanée comme ça avec lui. Sans plus attendre, je cesse de faire durer cet instant de doute en m'asseyant sur le premier banc, et m'exclame :
- Il fait super beau aujourd'hui, on a de la chance !
Merci pour cette intervention, Hadda.
- Et tu sais ce qui est encore plus beau ? J'ai enfin trouvé une personne digne de confiance pour me faire avancer dans les cours et qui, en plus de cela, a la meilleure playlist du monde.
C'est donc pour ça qu'il me parle, il cherche seulement une aide pour les cours. J'ai soudainement l'impression d'être utilisée. Comment j'ai pu croire une seule seconde que ce mec-là me côtoyait pour autre chose ? En même temps, je lui ai proposé de se voir pour travailler. Il doit me voir comme l'intello de service, rien de plus.
- Digne de confiance, tu dis ? Ta mère ne t'a jamais dit de te méfier des apparences ? j'objecte avec une voix pleine de mystère.
- C'est que... Ma mère ne m'a jamais vraiment rien appris.
Je regrette immédiatement ma réponse, en imaginant le pire derrière cette confession.
- Ah bon ? Comment ça ? je me risque à demander, maladroitement.
- C'est pas elle qui m'a élevé, je vis avec ma grand-mère. Ma mère n'a toujours apporté que des problèmes. J'aurais préféré ne pas la connaître.
En l'écoutant religieusement, je me sens tout à coup toute petite à côté de lui. Qu'il parle à cœur ouvert avec moi me gêne, je ne m'attendais pas à autant d'intimité d'un seul coup. J'ai envie d'en savoir plus mais, par respect, je me prépare à poser une question moins douloureuse. Cependant, mes lèvres s'entrouvrent à peine que Hedi m'arrête dans mon élan.
- Et mon père, lui, je l'ai jamais connu. Tout ce que j'ai de lui, c'est une photo dans la galerie de mon téléphone.
- Et ça se passe bien avec ta grand-mère ?
À ma question, son visage s'illumine. J'suis contente d'avoir trouvé la bonne question.
- Très bien même. Je l'aime de tout mon cœur. Sans elle, j'sais pas où j'en serais, sans ma Téta.
- Téta ?
- Oui, c'est comme ça qu'on dit mamie, chez moi.
- Attends, j't'ai pas encore demandé, t'es de quelle origine ?
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Amour chronique [J'écoute encore les étoiles chanter] - TERMINÉE
Teen Fiction[Complète] C'est un soir qu'il est parti. Sans un mot. Sans un bruit. Le lendemain de son départ, Hadda trouve une lettre sur le bureau de son grand frère. Je ne reviendrai pas, a-t-il écrit. Mais Hadda refuse de se contenter de l'histoire officiell...