Neuf cents jours plus tard, ils entraient dans Ashan sur les chameaux d’Azog, ils n’étaient ni beaux ni rapides, mais marchaient sans jamais s’arrêter. Les épéistes de Seiros se faisaient passer pour deux mercenaires libres parmi la dizaine de gardes anodins engagés pour protéger des marchands portant lin, ivoire et teintures. Malgré tous les efforts du marquis de Krestra pour faire croire à son identité d’érudit itinérant, les marchands étaient tout à fait convaincus qu’il était un espion. Cela ne les troublait guère, puisqu’ils espionnaient eux-mêmes pour telle ou telle autre personne.
La large étendue des terres d’Ashan écrasait les voyageurs. Des plaines arides bordaient l’horizon, clair à l’aube, invisible sous le soleil, puis se révélaient le lendemain sans un changement, comme si toute la route de la journée ne les avait pas rapprochés. Par rapport à ses vastes étendue désertique, les collines sableuses paraissaient insignifiantes. Plusieurs heures de cheval étaient nécessaires pour passer d’une oasis à l’autre. Les trous d’eau étaient épars et précieux, les arbres inexistants, et les villages encore plus rares. De temps à autre, Anchise apercevait au loin des gens qui les observaient, mais jamais de tentes. Les traces ou déjections indiquant un troupeau quelconque étaient en elles-mêmes un événement. Dans cette immensité desséchée, la vie était une lutte constante contre le vent et la poussière. Le paysage doux et brumeux du royaume du roi Emeraude paraissait un rêve incroyable. On pouvait ici suer tout le jour sous un soleil implacable qui cuisait la chair et les yeux, et le soir se retrouver couvert de givre sous des étoiles de cristal. Une ligne de chameaux descendait la longue colline au-devant. Un cavalier isolé revint en arrière, criant les mêmes mots à chaque marchand, conducteur et garde :
— Djelad en vue !
La plupart rirent ou poussèrent des vivats. Quand Xerios atteignit la fin de la colonne, il rebroussa chemin et s’arrêta près d’Anchise. Il sourit, les dents très blanches dans ce visage au fort bronzage. Que penserait-on d’eux à la cour ? Sous des chapeaux de toile aussi coniques que comiques, leur visage était brun comme une datte sèche. Ils portaient le pantalon bouffant et la veste informe de la région, d’une couleur de boue. Ils puaient l’homme, le cheval et le chameau. Leurs cheveux et leur barbe flottaient au vent. Seule l’épée accrochaient a leur tuniques les identifiait comme ce qu’ils étaient, ou plutôt ce qu’ils espéraient redevenir un jour des chevaliers de la cour du roi.
— Nous y serons avant la nuit ? demanda le chevalier.
— La fin du chemin ! confirma Xerios avec moult hochements de tête. Loué soit Eriath !
— Ce fut un voyage intéressant, n’est-ce pas ? demanda Anchise, amusé par cette inhabituelle démonstration d’enthousiasme. Son garde du corps le regarda d’un air dubitatif.
— Modérément, Sieur Anchise. Vous m’aviez promis des mers, des déserts et des montagnes. Rien à redire. Des brigands, certes. Des bêtes sauvages, aviez-vous promis. Elles furent rares, comme les pirates. Mais quant aux tribus hostiles… là, j’ai été servi.
Il ne parla pas des serpents, scorpions, fièvres, naufrages, avalanches, feux de forêt ou de la dysenterie.
— Vous m’avez bien servi aussi, mon ami. Je pourrirais dans un tombeau anonyme si vous n’aviez pas été avec moi. Ou alors je nourrirais les poissons.
Le fin sourire de l’épéiste indiqua sa satisfaction. Au moins deux fois il avait sauvé la vie de son ami d’un coup d’épée, et cela lui permettait de devancer Anchise d’un point.
— Mais cela vaut aussi pour moi maître. Et il nous faudra encore rentrer chez nous.
— Profitez-en. Le reste de nos vies paraîtra bien morne au regard de ceci.
— Je profite de chaque minute, assura Xerios en regardant l’horizon où les chameaux paraissaient comme autant de points. J’envisage aussi de tuer Hubert.
— Vraiment ? Et pourquoi ?
— Il réveille chaque fois en mon cœur un sentiment de menace.
Le jeune loup était un compagnon exceptionnel. Maître de son épée, plein de ressources, sans jamais une plainte, et se faisant généralement la voix de la prudence pour juguler les impulsions déraisonnées d’Anchise. Il avait quatorze ans de moins que son maitre, mais avait le sang plus froid. Il tuerait l’inquisiteur sans aucun scrupule s’il pensait que sa mort était justifiée.
— Nous ne serions jamais arrivés jusqu’ici sans lui, rappela le chevalier. Il ne sera sans doute pas aussi utile sur le retour. Mais il faut une raison pour un meurtre, Loup.
— Il m’a dit qu’ils avaient autrefois fait une lecture sur vous, annonçant que vous seriez un danger pour le roi.
Anchise rit avec plus de confiance qu’il n’en ressentait.
— Je le sais, et le roi aussi. Cela ne l’inquiète pas, alors pourquoi devriez-vous vous en inquiéter ? Les lectures sont à peu près aussi fiables que les contes d’enfants.
— Je le sais bien, Maître. Ce qui compte, c’est que le marquis de Krestra y croit. Et dans ce cas, il devient un danger pour vous, ici, au milieu de nulle part. Il pourrait préférer que vous ne rentriez jamais chez vous.
— Je pense vraiment qu’il est plus utile que dangereux, mon jeune ami.
La jeune loup regarda pensivement son maître.
— Mais utile à quel point ? Je ne lui fais pas confiance parce qu’il ne nous fait pas confiance. Il a apporté des conjurations dont il ne nous a pas parlé. J’aimerais savoir pourquoi la couverture que ce vils serpent de Hubert transporte a le même aspect que la mienne, la même couleur que la mienne, mais pèse trois fois plus.
Anchise ne s’en était pas rendu compte, et la satisfaction du jeune garde du corps était agaçante.
— Il doit être cachottier par nature.
— Alors, pourquoi m’a-t-il parlé de la lecture ? Pourquoi est-il toujours aussi hostile ?
— Parce qu’on lui a appris son rictus à l’école des inquisiteurs. Je pense qu’il ne m’a jamais pardonné de lui avoir échappé autrefois, voilà tout. Je sais que c’est une limace, mais le sarcasme n’est pas un crime. Il a bien des qualités.
— Donnez-m ’en une.
— Il est plein de ressources. Et loyal envers le roi. Vous l’admettez vous-même. Allons, mon ami, vous ne pouvez pas tuer un homme juste parce qu’il ne vous plaît pas !
Xerios laissa passer un moment et dit :
— Vous n’êtes qu’un vieux grincheux.
Quand ils eurent atteint la crête et regardèrent le versant descendant, puis Djelad au loin, ils la trouvèrent beaucoup plus imposante que les autres lieux qu’ils avaient visités dans cette dernière partie de leur périple. Comme Kalzana ou Tryburtin, la ville elle-même se fondait dans le brun du paysage. Avec une absence marquée de tours étincelantes ou de dômes de jade, mais le fond plat de la vallée qui l’entourait abritait des cultures verdoyantes. L’eau permettait les récoltes, les récoltes, la nourriture, qu’il fallait entreposer dans des entrepôts défendus. En moins d’une heure, Anchise discerna les murs et un édifice central plus haut que les autres : palais, château ou monastère ?
L’Ordre militaire que la grande inquisitrice avait décrit était appelé ici « Guilde de l’Épée d’or ». Des chevaliers dans un château devenaient dans la langue locale des saints hommes dans un monastère. Le chevalier avait conclu que ces différences ne changeaient rien. L’édifice serait fortifié, et les hommes régneraient par la force ou la réputation, selon le besoin. Autrement, l’histoire semblait se confirmer. Il s’était attendu à ce qu’elle s’effiloche à leur approche, comme un arc-en-ciel. Mais elle avait gagné en force tout le long de la route.
Oui, reconnurent les marchands, il y avait beaucoup d’or à Djelad. Ils avaient ri à ses questions. Un soldat qui posait ce genre de questions n’avait que la richesse en tête. Et ne trouverait que la mort.
— Vous êtes un fou de rêver de la sorte, avait glissé un étrange marchand du nom de Armil. J’ai guidé bien des jeunes hommes forts vers Djelad pour cette même quête. Deux seulement en sont repartis, vers l’est ou l’ouest.
— Mais certains l’emportent ? Certains réussissent ?
— Quelques-uns. Mais oui, des hommes survivent et partent avec du bon or. Je l’ai vu et touché.
Tout le reste de la légende passait encore, mais l’or véritable qui quittait la ville, cela était inexplicable. Personne ne connaissait de mines ou de mineurs dans les environs, tout le monde admettait que l’or de Djelad était le plus pur au monde, un métal mou plein de soleil, qu’on pouvait rayer avec l’ongle, et plus encore avec les dents. L’expression « porter de l’or » à Djelad était l’image même de la futilité. Si la réponse n’était pas le Cœur de la déesse, quelle était-elle ? La fin du voyage. Les deux gardes laisseraient là leur caravane, de même que l’espion qui se faisait passer pour un érudit. Sur l’insistance de Hubert, ils avaient agi comme des étrangers. S’ils ne mouraient pas à Djelad, ils pourraient suivre une caravane vers l’est dans quelques jours ou un mois ou deux, ou quand les esprits le voudraient. Alors, ce n’était pas la fin, rien qu’une halte médiane.
Mettons une semaine à Djelad pour résoudre le mystère de Haguen, ou un mois pour une caravane en sens inverse, puis deux années de plus pour rentrer. Deux années encore avant de revoir Meliandre. La véritable défense de la ville devait être le talent des moines pour la magie, car les murs de la ville ne mesuraient que vingt mètres de haut, ce qui était modeste pour une ville fameuse pour sa richesse. Peu de toits étaient plus hauts que les murs, à l’exception de ceux du château ou monastère lui-même, qui dominait tout. Et pourtant, Anchise avait vu bien des forteresses plus impressionnantes en Terralia. Quatre tours trapues se dressaient aux coins du fort, chacune bâtie de la même pierre brune et coiffée d’un toit peu pentu de cuivre verdi. Aucun visage ne guettait aux fenêtres étroites, aucun drapeau ne flottait… pas même un oiseau qui chante.
Il était étrange de ne pas voir au moins des corbeaux ou des pigeons autour d’un château habité. Quand le soleil devint rose dans la poussière de l’après-midi, Anchise descendit de sa monture avec soulagement devant la porte de la ville, au milieu d’une pagaille d’étals de fortune et de cabanes, des commerces qui ne valaient pas les loyers élevés derrière les murs, des constructions que l’on pouvait sacrifier en cas d’attaque ennemie. Il tendit ses rênes à un conducteur de la caravane et lui souhaita bonne route. Puis il hissa son fardeau sur ses épaules et alla retrouver Xerios qui faisait de même. Il fit un effort conscient pour parler dans sa langue natale.
— Enfin, nous pouvons commencer à servir le roi !
— Quand nous aurons été payés, voulez-vous dire ! répondit le jeune garde.
Ses yeux brillaient, comme toujours lorsqu’il s’occupait des choses importantes.
— Vous avez sans doute raison. Où est ce vieux grigou de caravanier ?
Ils portaient encore de grandes fortunes attachées autour de leur taille, et n’avaient aucun besoin d’argent. Mais il serait imprudent de commencer leurs activités dans Djelad en montrant qu’ils n’étaient pas ceux qu’ils prétendaient être. Xerios désirait sans doute éviter toute remontrance de la part de Hubert — l’inquisiteur affirmait qu’un agent prudent ne trahissait jamais son rôle. Ils mirent longtemps à trouver le chef des marchands et à obtenir leur dû. Armil était occupé à faire des arrangements pour ses bêtes, ses ouvriers et ses marchandises. Quand il eut un moment à accorder à deux mercenaires errants, les deux parties ne se rappelaient évidemment pas le même accord, et il fallut tout marchander à nouveau.
Assoiffé, affamé et presque assez las pour se penser fatigué, Anchise finit par passer la porte, son paquetage sur l’épaule et Xerios sur les talons. Tant que son garde était avec lui, il ne se souciait pas d’un coup de poignard dans le dos. Dès qu’ils eurent quitté l’anonymat de la caravane, on les identifia comme des guerriers en visite, et ils furent entourés d’une foule glapissante d’hommes, d’enfants et même de quelques femmes. « La meilleure maison de tout Djelad… », « La cuisine de ma femme… », « Ma sœur est si belle… ». Les voix étaient dures et âpres, car chaque ville d’Ashan avait son propre dialecte. Mais dès le lendemain, chacun paraîtrait aussi intelligible qu’un Albatrien à la cour. Anchise se fraya un chemin parmi la foule et les mains tendues. En quelques minutes, il repéra Hubert et se dirigea vers lui. Le marquis de Krestra se détourna, comme pour s’enfoncer dans la ville, suivant un vieil homme courbé.
Les épéistes le suivirent à distance. Les maquereaux et les rabatteurs finirent par les abandonner pour trouver proie plus influençable. D’étroites allées serpentaient entre des murs qui rayonnaient encore de la chaleur étouffante du jour, bien que la nuit fût presque tombée. En Ashan, la nuit tombait plus vite que la hache du bourreau. Les odeurs entêtantes de cuisine, d’animaux, des gens et des ordures paraissaient presque visibles. Des airs de musique dérivaient depuis des fenêtres barrées, des enfants pleuraient, les mules et le bétail criaient au loin. Que tout cela était ancien ! Les escaliers et seuils de porte avaient été creusés par des générations de pieds, les pavés étaient soulevés, même les angles des maisons paraissaient arrondis. Le mortier s’était effrité et avait disparu. Les villes du royaume d’Ashan étaient vieilles, mais Djelad était plus antique que toute autre. Le long de la route du jade, il était une vérité simple : quand les dieux avaient créé le monde, ils avaient commencé à Djelad et ensuite dessiné le reste. Si chacun des huit éléments devait avoir une source, alors ici était la fontaine du temps. Les gens avaient la peau olivâtre et le visage large, quand ils avaient les yeux ouverts, leurs paupières semblaient disparaître. Certaines des femmes allaient voilées, pas toutes. La plupart des hommes portaient la moustache, mais se rasaient la barbe ou se laissaient pousser très peu de poils. Pourtant, il y avait çà et là d’autres types, un homme blond et un autre à la peau presque noire, d’autres avec d’étranges armures… Ils portaient l’épée. Il devait s’agir de visiteurs venus chercher fortune. Ressentant un frisson d’excitation, Anchise rattrapa Hubert et lui emboîta le pas. Ils avaient à peine échangé un mot depuis leur départ. Le jeune loup restait à son poste, un pas derrière son maître. L’inquisiteur portait les mêmes vêtements sales et informes que les épéistes, et même son visage avait bouffi et bronzé en route. Sa barbe était pelée et déjà striée de gris.
— Félicitations, dit-il. Vous êtes arrivé.
— Je n’y serais pas parvenu sans votre aide, bien sûr. Pensez-vous que je l’ignore ?
— Même vous ne pourriez être aussi obtus.
— Qui est votre ami ? Que vend-il ? Ses filles, ou pire ?
— Il s’appelle Lapras. Il propose des logements pour les combattants en visite, comme tous les autres, mais quand il a dit que sa maison était la meilleure, il mentait moins que les autres.
Les inquisiteurs étaient vraiment des compagnons utiles. Dommage qu’ils soient aussi désagréables. Mais le meurtre restait un peu excessif.
Le vieil homme décrépit avait atteint leur destination, un groupe de dalles en pierres stratifiées sortant d’un mur pour former un escalier étroit et précaire, creusé lui aussi par l’usure. Il y monta adroitement jusqu’à une porte en bois clouté, à environ une hauteur d’homme de la rue. Il la déverrouilla et disparut à l’intérieur. Xerios entra derrière lui — il aurait fallu une armée pour l’en empêcher. Anchise et l’inquisiteur le suivirent. La pièce unique était meublée de quelques nattes douteuses et d’une table basse branlante. Quelques pots en pierre étaient posés dans un coin. La salle était pleine de mouches, et il y faisait chaud comme dans un four. Pourtant, les deux fenêtres grillagées n’avaient pas de carreaux, et il y avait une trappe dans le plafond bas et malcommode. Le temps, immensément long, avait éliminé presque tout le plâtre des murs et réduit le plancher à un réseau de trous et d’échardes. Le crépuscule passait par endroits au travers du plafond, apportant juste assez de lumière pour voir Lepras debout au milieu de cette ruine, rayonnant devant ses invités comme s’ils devaient s’extasier d’un tel luxe. C’était bien mieux que la plupart des endroits où Anchise avait vécu ces deux dernières années. Le long voyage en Ashan avait été moins ardu que les mois passés à attendre les navires ou les caravanes.
— Nobles seigneurs ! déclara Lepras. Voici le meilleur logement dans toute Djelad ! Personne ne conteste qu’il soit le plus chanceux pour les combattants. Beaucoup de ceux qui y ont dormi ont gagné de grandes fortunes dans l’arène.
C’était à l’évidence un discours très bien rodé.
— Je le fais enchanter de main de maître chaque mois, sans faillir, dans ce but même. Ici, pendant que vous attendrez votre tour, vous aurez sécurité et intimité. Ici, vous ne serez pas dérangés par les rats et autres vermines, comme vous le seriez dans absolument tous les autres établissements. Ici, il fait frais le jour et chaud la nuit. Mes femmes sont les meilleures cuisinières de la ville, et mes filles pourront satisfaire expertement les moindres besoins que de forts jeunes gens comme vous doivent avoir. Leur beauté est fameuse dans tout l’Aslan, et elles sont vierges de toute maladie, de tout défaut ou de parasites, pratiquement des vierges en vérité, et pourtant très expertes. J’ai aussi deux jeunes fils charmants, si vous aimez la diversité. Il vous suffira de demander ce que vous voudrez pour que nous nous efforcions de rendre votre séjour à Djelad plus agréable. Et pour tout cela, seulement deux pièces la nuit, et mes femmes me disputeront encore vertement pour ma folle générosité. En liquide, bien sûr. Comptant.
Les combattants devaient rarement payer leurs dettes, à Djelad. Juste en dessous d’eux, les femmes et les presque vierges commencèrent à se chamailler. Xerios laissa tomber son paquetage et commença à gravir l’échelle, qui grinçait plus encore que le parquet.
— Il ment comme un arracheur de dents à propos des filles, informa Hubert. Le reste doit être à peu près vrai. Sauf pour l’argent, bien sûr. Sieur Anchise, voulez-vous un garçon ou les deux ?
C’était une raillerie typique de l’inquisiteur. La fidélité lui était un concept inconnu, et même le jeune Loup trouvait cela étrange.
— C’est vous l’expert, Hubert, répondit Anchise avec lassitude. Négociez de façon réaliste, mais sans y passer des heures. Et pas de garçon pour moi.
— Une pièce par nuit, proposa le marquis de Krestra, avec toute la nourriture que nous pourrons manger et de l’eau fraîche chaque fois qu’il nous en faudra.
— Une pièce ? couina Lepras comme si on l’empalait. Je n’ai jamais accepté moins de deux pièces, et c’était en plein cœur de l’hiver.
— Je suis sûr que vous avez déjà accepté deux fois moins avec gratitude.
— Jamais ! Mais puisque vous êtes seulement trois, et que vous paraissez honnêtes et bien élevés, je vais faire une exception. Une pièce d’or et une d’argent.
— Une pièce d’or, répéta Hubert d’un ton satisfait. Tenez, prenez-les et partez.
Anchise interrompit les protestations du propriétaire.
— J’ai une pièce pour des renseignements, juste pour ce soir. Nous voulons de la nourriture et de la bière, mais pas de fille.
Le vieil homme hésita, puis hocha la tête à contrecœur.
— Mais demain, nous devrons trouver un arrangement plus raisonnable, dit l’hôte, contrarié
Anchise lâcha son paquetage et s’assit dos au mur. Hubert se laissa à demi tomber là où il se tenait.
— Aha ! fit le vieillard. Vous voulez que je vous dise comment gagner tout l’or que vous pourrez porter. Vous n’auriez pas pu trouver un meilleur expert. Mais d’abord… Il se mit à genoux et colla la bouche à un interstice entre les planches.
— À manger ! cria-t-il. Un festin pour ces puissants guerriers ! Immédiatement ! Ne faites pas honte à ma maison en mégotant, chiennes ! Ce sont de grands hommes affamés. Et montez aussi de la bière pour ces nobles. Assez pour qu’ils se saoulent selon leur bon plaisir, ou je vous fouetterai comme jamais. Il se rassit en tailleur.
— À présent, Messeigneurs, je vous dirai la vérité sur les merveilles de Djelad.
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Epeistes : Les Chevaliers de Seiros
FantasyŒuvre que je dédicace à une personne cher. Helas la vie me l'as retirer un triste mois de décembre. Comme quoi le destin ne nous laisse pas forcement libre arbitre. Pour elle voici, les épéistes de Seiros, des combattants légendaires, aux aptit...