Chronique de Sofia kidnappée mon destin lié au sien

26

Partie 26

Voix de femme 1 : Vite ! Vite ! Amenez un brancard, grouillez-vous !
Voix de femme 2 : Elle va s'en sortir, tu penses ?
Voix de femme 1 : Je sais pas. Y'a peu de chances avec la blessure qu'elle a à la tête, mais on a encore un pouls, c'est déjà ça.
Voix de femme 2 : Elle est mal en point... Bon, ce brancard c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?!
J'entends, j'entends tout ce qui se dit autour de moi. Mais je vois rien. Je vois rien et je sens rien. J'ai l'impression d'être anesthésiée. J'ai l'impression de dormir mais qu'une partie de moi est toujours éveillée, les sens aux aguets.
J'ai jamais ressenti ça auparavant, c'est... très troublant.
Tout à coup.
Mes yeux s'ouvrent, je vois quelques étoiles dans le ciel et des phares de voitures sur le côté qui me bloquent la vue.
Voix de femme 1 : Madame ? Oh, madame, vous m'entendez?
Je contrôle pas mon corps, j'ai l'impression de plus en avoir, de plus être moi. Je regarde autour, j'ai mal partout mais à la fois je sens pas grand chose, c'est assez bizarre.
Comme si je savais que je souffrais mais que la douleur m'était étrangère.
Voix de femme 1 : Madame ? On va vous transporter à l'hôpital, d'accord ? Vous allez être prise en charge très rapidement, vous verrez.
Sa voix semble lointaine même si je sais qu'elle est juste à côté de moi. Je sens une surface dure derrière mon dos.
J'arrive pas à tourner la tête pour voir où je suis mais je sens que je suis sur le sol, sur... la route ?

Voix de femme 1 : Madame ? Dites quelque chose svp.
Voix de femme 2 : Je crois pas qu'elle nous entende, Sofia.
Sofia ? Sa collègue s'appelle comme moi. J'ai envie de lui répondre mais j'y arrive pas, en fait j'en ai pas envie non plus.
Voix d'homme : Oui, plus haut ! Voilà c'est bon, monte-la-dedans maintenant.
J'entends des bruits aigus et je vois que la voiture que j'ai empruntée (enfin plutôt volée mais bon) est remorquée à l'arrière d'un camion de fourrière. Il la soulève et je vois le pare-brise éclaté. Oh mon Dieu... le véhicule qui... on m'a foncé dedans ?? J'ai eu un accident ??
Et là, sans que je comprenne ce qui se passe, le noir s'empare une nouvelle fois de mon esprit. Tout ce que je sais c'est que je tremble, je tremble tellement fort. Je contrôle pas mon corps.
Sofia : Elle est en état de choc ! Ramène le défibrillateur, elle risque un arrêt ! VITE !!
Je sens qu'on me tient par les épaules.
Voix de femme 2 : Elle a les yeux révulsés, elle fait une attaque.
Sofia : Ramenez-moi cette foutue machine TOUT DE SUITE !
Puis là, un froid... pire qu'en hiver. C'est un froid qui me glace... non qui me gèle de la tête aux pieds. Comme si on déposait une couverture de glace sur mon corps. Ça m'empêche de respirer, ça m'empêche de penser, ça m'empêche de réagir... Je souffre en silence de ce froid, je suis plus aux commandes de rien. J'encaisse sans rien dire, sans rien faire et ça fait mal. Putain ça arrache !

Sofia: On la perd ! Chargez !
Je sens une secousse mais elle est lointaine, c'est comme si on m'effleurait avec une plume. La glace que je sens prendre possession de moi ne me laisse rien ressentir.
Sofia  : Chargez encore !
Voix de femme 2 : Réagis, allez...
Au bout de la troisième décharge, je commence à mieux ressentir le choc contre ma poitrine. A la cinquième, une sensation de chaleur, même si elle est faible, naît dans ma cage thoracique. Ça vient de mon cœur. Je le sens, je le sais. Je sens ses battements, c'est merveilleux. J'ai l'impression d'avoir senti mon propre cœur à l'intérieur de moi..
Oui je sais ça a l'air incompréhensible voire complètement dingue mais... c'est ce que je ressens. Comme si j'étais née une seconde fois... j'ai senti mon cœur se battre pour moi.
Malgré le froid, il a résisté et a continué à battre. J'ai senti la vie en moi. C'était juste... incroyable.
Ce froid, c'est l'instant où il s'est arrêté et cette chaleur c'est celui où il est revenu à la charge.
Sofia : C'est bon, on a un pouls régulier. Remballez le tout, on la met sur la civière et on l'emmène vite à l'hosto.
***
Petit déclic interne. Mes yeux s'ouvrent petit à petit. Je veux les essuyer pour y voir plus clair mais quelque chose me retient les mains. Des fils...
J'ouvre les yeux tant bien que mal, m'ajuste à la lumière et... je vois des fils, des perfusions qui sont fixés à mes mains.
Je veux parler mais j'ai la gorge hyper sèche, on dirait que je viens de finir un raid de Pékin Express dans le désert Saoudien...