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Partie 29

Les jours passent. Je fais boulot-chez moi, boulot-chez moi.... La routine quoi.
Voilà presque une semaine que Yousra est morte. J'ai l'impression que ma vie n'a plus de goût. J'ai plus de nouvelles de Farès, de personne. Je vais à la cabine du coin chaque jour pour appeler mes parents mais autrement ça s'arrête là. Je sors pas et je vais plus chez Jaja, miskina (la pauvre) je l'ai laissée de côté. Elle sait ce qui est arrivé à
Yousra.
On est samedi, j'ai mon week-end de libre. Il est 23h51. Je décide d'aller à la salle de danse.
Je sors en pleine nuit et entre dans le bâtiment, je marche dans le noir, j'ai plus peur de cet endroit. Yousra et moi on y est venues tellement de fois depuis qu'on l'a découvert que je me suis habituée à l'atmosphère qui y règne.
J'entre dans la salle, ferme la porte et allume la lumière. Je retire ma veste et la pose un peu plus loin. Je m'avance vers le poste au fond, qui ne bouge jamais d'ailleurs, et je cherche une bonne station de radio pour danser. Je tombe sur une chanson qui bouge bien, tant mieux, j'ai besoin de me défouler.
J'avance vers le centre de la pièce et commence à danser.. mais j'y arrive pas. A chaque coin, de chaque côté... je vois Yousra. Je nous vois assises en train d'écouter des musiques douces et à parler de comment on se verrait dans 30 ans, je nous vois danser, rire... vivre.
A chacun de mes pas, je sens les larmes se bousculer un peu plus pour tomber. Je finis par m'écrouler au sol.
J'arrive plus sans elle, c'est trop dur. Je sais que c'est une épreuve d'Allah et que je dois la surmonter mais putain que c'est pas facile !
Je commence à pleurer en silence, je ramène mes genoux contre ma poitrine et je me laisse aller..
?: Euh... ça va ?

Je lève aussitôt la tête et vois un gars avec un sac de sport noir. Il a un débardeur blanc et un pantalon de jogging bleu.
Je me lève et essuie mes larmes.
Moi : C'est la nuit, c'est censé être vide ici. Qu'est-ce que tu fais là ?
Le gars : Je pourrais te retourner la question.
Je décide de pas répondre, j'ai pas envie de m'attirer des ennuis. Je vais éteindre le poste, j'enfile ma veste et m'apprête à quitter la salle mais je l'entends m'appeler.
Le gars : Hé attends ! T'avais pas l'air bien. Tu veux parler ?
Je soupire et me retourne pour lui faire face.
Moi : T'es flic ?
Le gars : J'aurais bien voulu mais non.
Moi : Alors évite l'interrogatoire, ok ? On se connaît pas, y'a aucune raison qu'on se cause. Et puis, je suis vraiment pas d'humeur à parler alors bye.
Je sors de la salle et rentre chez moi. J'en ai marre de tout ça, je me sens pas bien et j'aime pas ça. Je reste un petit peu à rien faire sur mon canapé, puis je décide de descendre à la cabine. Je sors, j'arrive à la cabine, j'introduis ma carte téléphonique et je compose le numéro.
?: Allo ?
Moi : Adel ?
Adel : Oui. Sofia, c'est toi ?
Moi : Oui.
Il y a un silence. J'ai peur de demander mais j'en ai tellement besoin.

Moi : Comment il va ?
Adel : On sait pas où il est. Il est parti juste après avoir envoyé le corps à sa famille. Il a besoin d'être seul un moment.
Je ravale mes larmes. Il a perdu sa sœur, il a besoin d'être seul. Moi aussi aussi j'ai perdu une sœur et tout ce que je veux c'est qu'on soit là pour moi, j'en ai marre d'être seule dans mon coin. Il souffre, moi aussi, j'aimerais tant qu'il soit là pour qu'on surmonte cette douloureuse étape ensemble.
Adel : Et toi, ça va ?
Je souris en retenant ces fichues larmes qui me supplient chaque jour de couler un peu plus.
Moi : Non mais je tiens le coup.
Adel : Tu veux que Moussa et moi on passe ? Dis-moi t'es
ой.
Moi : Non. Non c'est bon. Occupe-toi de ce dont t'as à t'occuper et je ferai pareil de mon côté.
Adel : Sofia, je suis là si t'as besoin.
Je sais Adel, mais celui dont j'ai besoin c'est Farès...
Moi : Merci. Bonne nuit.
Je raccroche, je reste pas plus longtemps. J'aime pas ça, les silences marqués c'est pas pour moi.
Je remonte chez moi et m'endors en essayant de ne pas penser à lui et à ce qu'il doit traverser... bien sûr j'y arrive pas.
Le lendemain, je me lève. Dimanche matin, journée pourrie de prévue. Je me prépare mon chocolat chaud, je m'installe à la table et... et je reste là, assise devant une place vide.
J'arrive pas à pleurer, j'arrive pas à ne pas y penser, bref je suis coincée dans cet état de zombie duquel j'aimerais bien qu'on me sorte.
On sonne à la porte.
Peut-être que c'est Jaja. La pauvre, je l'ai éloignée de moi alors qu'elle me considère comme un membre de sa famille, et moi c'est pareil d'ailleurs. Elle m'a aidée quand j'en avais besoin, elle mérite pas ce que je lui fais subir.
Je me lève et décide d'aller ouvrir.
J'ouvre et là je vois... Jalil.
Jalil : Je suis venu m'excuser. Vous faire du mal n'était pas du tout ce qu'on voulait, enfin ce que Momo voulait. Le gars qui l'a tuée, mon frère s'en est occupé. Il fera plus de mal à personne.
Moi : T'es venu pour me dire ça?
Jalil : Je suis aussi venu voir comment t'allais.
Je hoche la tête en fixant le sol. Les images des derniers instants de Yousra en vie tournent dans ma tête, je la revois prendre son dernier souffle puis laisser sa tête tomber sur le côté comme une poupée de chiffon.
Moi : Je vais bien.
Il reste là, je reste là, je fixe toujours le sol, je le vois de plus en plus flou, j'ai trop de larmes dans les yeux.
Moi : Je... je vais pas bien.
C'est plus fort que moi, j'explose en sanglot. Je sens aussitôt ses bras autour de moi. Il me serre contre lui et je pleure, je me vide.
Moi : Je peux pas... pas sans elle.

Chronique de Sofia kidnappée mon destin lié au sienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant