CHAPITRE XII : Pour que tu me regardes

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- 4 janvier 2029 - Pennsylvanie - Allegheny National Forest

Tout le petit groupe avait pu profiter des vacances pour organiser des sorties, faire des soirées, visiter des lieux inexplorés et fêter le nouvel an ensemble. Raphaël en ressortait revivifié, si bien qu'il avait presque oublié qu'il allait devoir changer de colocataire. En entrant dans son dortoir, il ne trouva personne, juste une grosse valise grise posée sur le lit d'en face. Il déballa puis rangea ses affaires, avant de prendre son sac pour se rendre en cours.

— Partager ta chambre avec ce connard, gronda Brook tandis qu'ils traversaient l'allée gravillonnée, quelle plaie !

— Ils vous punissent tous les deux, ajouta Cameron, et moi aussi. Je n'aime pas trop mon nouveau colocataire.

— Je suis désolé pour ça.

— Ce n'est pas de ta faute, c'est la directrice qui doit être un peu folle.

— Complètement ravagée oui ! s'exclama la brunette.

Le soir venu, Raphaël quitta le réfectoire et se rendit dans son dortoir. À son grand soulagement, Zachary n'était pas là. Ayant déjà beaucoup travaillé à la bibliothèque, il vérifia qu'il avait bien activé son réveil et se posa sur son lit avec son téléphone, une main derrière la tête. Aux alentours de vingt-et-une heures, la porte s'ouvrit et immédiatement, tout son corps se contracta. Zachary entra silencieusement. Une tension étrange s'installa et suivit ses pas, qu'il entendit rencontrer doucement le parquet. Le jeune homme alluma sa lampe de chevet, prit ses affaires et se rendit immédiatement dans la salle de bain attenante.

Eh ben, pensa Raphaël, les soirées vont être longues.

Au moment où il referma la porte, Zachary souffla lourdement. Son cœur battait à tout rompre. Ce bâtard de Raphaël se couchait en caleçon, dévoilant sans pudeur son torse idéalement sculpté. Comme s'il avait envie de le voir à poil ! Ce connard devait vouloir frimer, encore une fois. Et ça marchait bien, son corps taillé au couteau lui avait coupé le souffle. Pourquoi ? Aucune idée. Il devenait fou ? Sans doute. Ce type le rendait fou. Il avait déjà vu tous ses potes tors nu, ça n'avait jamais été un problème, mais Raphaël... il leva les yeux vers le miroir et croisa son propre regard. Il se fit face. Ses joues s'empourprèrent et il réalisa quel genre de couleuvres roulait dans son bas ventre. Il paniqua.

Non, non, non, non ! Je perds la boule.

Il se rua sous la douche et ouvrit le jet d'eau froide, non sans souffrir. Il s'agita, haleta, frissonna, espérant chasser son trouble et faire partir les pensées saugrenues qui commençaient à s'agiter dans son esprit.

Putain, une heure de retenue à nettoyer les couloirs et ça suffit à me rendre fou.

De son côté, Raphaël réfléchissait à un moyen de rendre la situation moins désagréable. Ils devaient essayer de parler. Au moins une fois, pour mettre les choses au clair. Peut-être pouvait-il lui proposer d'aller à la salle ensemble ? Ils s'entrainaient tous les deux.

Non, se dit-il, c'est carrément débile.

Ils n'avaient jamais reparlé de l'incident avec le gobelin et, à ce sujet, Raphaël avait beaucoup de questions. Ne pouvaient-ils pas au moins faire la paix ? Une sorte de pacte de non-agression ? À croire qu'ils étaient en guerre. Quand la porte de la salle de bain se rouvrit, il sursauta presque. Il se risqua à quitter les yeux de son écran et observa Zachary poser ses vêtements et s'affaler sur son lit, mettre ses écouteurs, puis fixer à l'écran de son téléphone.

— Zachary ?

Il osa à peine prononcer son nom, si bien que sa voix sortit comme un murmure. Évidemment, son nouveau colocataire ne l'entendit pas.

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