CHAPITRE LVIII : Ultime révélation

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4 mars 2029 - Pennsylvanie - proximité de Pittsburgh

Le cœur de Zachary battit plus fort. Il écarquilla les yeux et s'énerva :

— T'es sérieux ?! Tu sais qui c'est ?! (Sullivan hocha la tête.) Depuis combien de temps ?

— Depuis le début, répondit-il simplement.

Son petit frère ouvrit la bouche, estomaqué. L'impatience et l'agacement vrombirent en lui.

— Tu n'aurais pas pu me le dire tout de suite ? C'est qui ?

— Tu te doutes bien que si je ne te l'ai pas dit tout de suite, c'est qu'il y a une raison. (Il tira une nouvelle bouffée de tabac.) Je ne voulais même pas te le dire à la base. Mais j'ai cru comprendre que ça te bouffait.

L'inquiétude se fraya un chemin jusqu'au cœur de Zachary. Il ne comprenait pas pourquoi son frère lui avait caché ça tout ce temps. Une idée déplaisante s'imposa à son esprit.

— C'est toi... ? chuchota-t-il.

Sullivan rit franchement.

— Non, petit frère.

Il marqua une pause. Les deux s'observèrent longuement.

— C'est toi.

Le monde rétrécit soudainement autour de Zachary, l'instant se figea dans les yeux immobiles de son frère, le vestige d'un malaise parcourut sa colonne et il se sentit perdre l'équilibre, mais sa main moite retint le comptoir en même temps que celle de son ainé se refermait sur son poignet. Voyant qu'il n'était pas tombé, Sullivan le relâcha et dissimula sa compassion sous un masque neutre.

— Qu'est-ce que tu racontes ? souffla Zachary. Je n'ai rien fait...

— Si, petit frère. Tu l'as fait. Tu voulais te venger, t'as appuyé là où il faut.

Le jeune homme papillonna des yeux, incrédule.

— Comment j'aurais pu... ? Je n'allais même plus à Veritas quand-

— On y est allés ensemble, coupa l'ainé. Je t'ai demandé si tu voulais te venger, tu m'as dit oui. Tu te souviens ?

Son frère hocha lentement la tête.

— Bah tu l'as fait. On est allés à Veritas un lundi matin parce qu'on savait que l'école ouvrait tôt, pour les élèves de l'internat qui rentrent du weekend. T'avais imprimé les affiches. Tu les as foutu où t'as voulu et t'es rentré.

Zachary observa le tatoué, livide.

— Je n'ai pas fait ça, affirma-t-il d'une voix rauque.

— Tu ne t'en souviens pas.

Il plongea une main dans la poche de son jean et en sortit un cristal blanc, reluisant comme la neige au soleil.

— Quand je suis rentré des cours, je t'ai trouvé en PLS dans ta chambre. Tu regrettais tellement que tu tapais ta meilleure crise d'angoisse. Tu m'as demandé de t'aider, alors j'ai piqué ça dans la réserve des darons. C'est une pierre de rémission. Ton souvenir est dedans. Si je la casse...

Il leva la main, s'apprêtant à la jeter contre le sol.

— Non ! intervint Zachary. Je ne peux pas... j'ai dit à Raphaël que ce n'était pas moi.

Sa voix trembla, ses yeux s'embuèrent. Il sentit la honte et les remords irradier dans sa poitrine puis grimper dans sa gorge. Il avait menti à Raphaël et Raphaël l'avait cru. Tout ce temps... Tout ce temps il lui avait menti. Brook avait raison. Cameron avait raison. Tous les amis de Raphaël avait raison et lui n'était qu'un sale connard, indigne de sa confiance. Il tendit la main à son frère pour qu'il lui remette le cristal, ce que ce dernier fit. Le cadet des Valdez jeta la pierre au sol, elle se brisa, relâchant une fumée scintillante qui s'éleva dans l'air puis entra dans les yeux du fils Valdez. L'espace d'un instant, il fut aveugle. Une sensation froide et déplaisante s'immisça dans son crâne par la voie de ses globes oculaires, puis il vit son frère dans la voiture, la nature qui défilait par les vitres, le portail de Veritas droit devant eux. « Tu dois le faire petit frère, répétait Sullivan. Ne te débine pas, OK ? » Il vit défiler la grande cour, défiler les couloirs... il vit ses mains tremblantes qui accrochaient les affiches aux murs et aux portes de Veritas. Il ne voulait pas... pourquoi est-ce qu'il avait fait ça ? La réponse demeurait présente en lui, évidente. Il l'avait fait parce qu'il avait écouté Sullivan. Comme d'habitude.

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