CHAPITRE XVI : Pierre d'aveux

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- 12 janvier 2029 - Pennsylvanie - Allegheny National Forest

En entrant dans sa chambre, Raphaël jeta un regard du côté de Zachary. La bouteille de vin ouverte siégeait toujours sur sa table de nuit, maigre souvenir d'un rapprochement aussi inopiné qu'invraisemblable, seul témoin d'une sensualité désavouée. Il détourna les yeux, las. La réaction de Zachary lui avait fendu la poitrine en deux et il se maudissait pour son attirance, pour l'importance qu'il accordait à un être fourvoyé et imprévisible. Zachary Valdez était son poison, mortel mais addictif. Raphaël ne devait plus jamais déraper. Il avait conscience de son attirance, il l'acceptait pour mieux la canaliser, il la regardait en face et décidait consciemment d'en faire le deuil.

Après sa douche, il s'assit sur son lit et ne sentit pas son esprit dériver en lui. Il savait à présent qu'il pouvait être attiré par un homme, mais l'idée, bien qu'il ait du mal à s'y faire, ne le choquait pas. Ce qui le dérangeait en revanche, c'était que son cœur ait si mal choisi sa cible, que son désir ait penché pour le danger et l'incertitude. Peut-être que c'était tout ce qu'il méritait, après tout ? Être rejeté. Ne pas être aimé. Zachary le traitait toujours comme il aurait mérité qu'on le traite, fut un temps. Avec violence et mépris.

Après ce que j'ai fait...

La porte s'ouvrit brutalement. Il sursauta et se tourna d'un coup, jetant à Zachary un regard écarquillé. Le nouveau venu claqua le battant en le fixant de ses deux yeux noirs, déterminés et imperturbables. Il devait lui en vouloir, pour cette histoire de boule d'eau. Il n'était pas venu en cours de la journée, à tous les coups, il allait encore l'engueuler. Quand Zachary ouvrit la bouche, le corps entier de Raphaël se blinda, prêt pour la montagne d'insultes.

— Je suis désolé, lâcha Zach d'un trait.

Sur ce, il se dirigea rapidement vers son lit, jeta ses affaires et s'enferma dans la salle de bain, laissant derrière lui un Raphaël sidéré. Il était sérieux ? Encore ? Ça commençait à bien faire, les ascenseurs émotionnels ! Soit ce type était fou, soit c'était un excellent manipulateur, mais il ne pouvait pas être bon pour lui. L'illusionniste l'attendait au tournant. Cette fois-ci, c'était trop. Il aurait préféré que ce foutu bâtard le déteste une bonne fois pour toute, pourvu qu'il lui fiche la paix. Mais il semblait vouloir jouer avec ses émotions. Lui jeter des miettes et le regarder mendier. C'était fini, Raphaël n'était pas dupe et il ne le laisserait pas s'en tirer comme ça.

Quand Zachary sortit de la salle de bain, il n'attendit pas et l'attaqua dans le vif :

— T'es désolé pour quoi ?

Zachary s'immobilisa, puis s'assit lentement sur son lit.

« S'excuser c'est pour les faibles. »

Ta gueule Sullivan.

Il prit son courage à deux mains et, doucement, la laisse qui tenait son âme en bride se délesta de sa force.

— Je suis désolé pour hier, de t'avoir menacé et mal parlé. Je te présente mes excuses, t'es pas obligé de les accepter.

Raphaël fronça les sourcils, sur ses gardes. Son cœur lui hurlait de se jeter dans la gueule du loup, d'accepter, de pardonner, d'aimer.

— J'accepte tes excuses, mais je ne veux plus qu'on se parle.

Sur ce, il se coucha sur son lit et enfila ses écouteurs. Zachary prit un coup en pleine poitrine. Comment des paroles pouvaient-elles faire si mal ? Avec ce gars, les mots devenaient aisément des maux.

— J'aimerais bien te dire...

Il s'interrompit de lui-même et Raphaël tourna légèrement la tête vers lui. Zachary soupira. Pourquoi était-ce si difficile ?

RivalitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant