CHAPITRE 5 - Isadora

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Je m'étire de tout mon long. Mes poignets craquent sous la pression et la contraction de mes muscles. Mais uniquement parce que mes membres sont engourdis. Plus tôt dans la soirée, je commençais à sentir des coups de poignard dans le creux de l'estomac. J'avais tellement mal que je me suis recroquevillée.

Mais tout mon corps s'est enfin détendu lorsque j'ai senti les différents parfums merveilleux du plat mijoté de John, au rez-de-chaussée. Celui-ci embaumait ma chambre. Je humais ces saveurs sucré-salé sans retenue puis, enfin, j'ai pu m'assoupir et réellement reprendre des forces. Seulement, j'ai entendu du bruit dans ma chambre. J'ai cru que c'était ma mère, alors je me suis éveillée, sans pour autant ouvrir les paupières. Je suis restée étatique et ai forcé ma poitrine à osciller lentement, comme si j'étais encore prisonnière du pays des songes.

Mais je ne dormais pas.

Je n'ai pas pu, tant la pression était forte dans ma poitrine. Jusqu'au moment où j'ai entendu cette voix masculine. Tout mon être s'est détendu.

Oui, j'ai entendu ses paroles. Je m'en suis abreuvée sans retenue, en me mettant un cran à la ceinture pour ne pas sourire. Et, alors que je pensais qu'il allait simplement me réveiller, il m'a laissée dormir. J'ai senti le matelas s'alourdir devant moi, puis ai senti la douceur de sa caresse sur ma joue et, lorsque je dépose ma propre main sur ma peau, je peux encore la sentir.

Qu'est-ce qu'il s'est passé...

John a fait preuve d'une tendresse inouïe, une tendresse dont je n'ai pas l'habitude. Une tendresse que je ne pensais plus jamais connaître, depuis le décès prématuré de mon père.

Mais alors que je croyais dur comme fer ressentir la chaleur de l'étreinte paternelle, j'ai ressenti autre chose. Je ne saurais pas le décrire, mais c'est un fait. Lorsque ses doigts sont entrés en contact avec mon épiderme, une chaleur incommensurable s'est emparée de mes membres.

À quoi bon...

Je ne suis peut-être simplement pas habituée à ressentir de la chaleur humaine. C'est vrai, après tout : durant ses dernières années de vie, mon père restait couché. Quant à moi, je me donnais corps et âme pour subvenir à nos besoins, mais surtout aux siens. Il avait besoin de médicaments, de bonne nourriture avec de bons nutriments pour le maintenir un minimum en bonne santé... Alors chaque soir, après les cours, je bossais dans le café du coin et rentrais à deux heures du matin pour faire mes devoirs. Je ne voulais pas abandonner mon avenir pour autant. J'ai tout fait pour avoir mon baccalauréat, malgré notre vie quotidienne éreintante qui ne me laissait que peu de place pour vivre et m'épanouir. Et j'en suis fière, j'ai réussi. Avec mention. Quoi qu'il en soit, durant ces dernières années à ses côtés, papa n'était plus apte à m'apporter toute l'attention dont j'avais besoin. Alors, ce soir, je crois que ça m'a simplement fait du bien de sentir que quelqu'un était là pour prendre soin de moi dans cet enfer qu'est mon existence.

Mon ventre se met à gargouiller. Je pousse un hoquet de surprise et baisse les yeux en direction de celui-ci :

— Ouais... On va aller manger ! On trouvera bien quelque chose à se mettre sous la dent...

Je me redresse lentement en prenant soin de ne faire aucun mauvais mouvement. Ça m'a déjà fait défaut par le passé. Puis, je me redresse complètement et, sentant l'air frais de la soirée me parcourir, je me dirige vers l'immense armoire derrière mon lit. Surprise de trouver mes vêtements et d'autres tenues que je n'avais jamais vues auparavant, je communique ouvertement mon bonheur en soupirant profondément et bruyamment. Je déniche un sweat assez girly que je passe sur mes épaules, puis décide enfin de sortir de ma chambre.

Je passe la tête dans le couloir, afin de déceler des mouvements, mais je n'en perçois aucun. Tout le monde doit dormir. Je ne sais même pas quelle heure il est. Ai-je dormi longtemps ?

DADDY'S GIRL - TOME 1 - The DaddyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant