Ça fait plus d'une heure que je suis partie de chez ma mère. Je ne pouvais plus la supporter. Me parler de Papa, c'était trop.
Surtout faire honte à sa mémoire.
Je ne peux plus encaisser ses questions, sa curiosité mal placée. Je ne peux plus me voir ses tenues de haute couture, ses sacs à main Gucci, et ses chaussures Louis Vuitton. Plus rien. Ni son rouge à lèvre rouge pétant qui débordent et s'incrustent dans les rides qui parcourent sa bouche, ni son mascara qui lui fait des paquets autour des cils... Non, rien.
Je ne veux plus la voir. Je ne sais simplement pas encore ce que je vais faire. Peut-être que le gérant du bar me laissera patienter jusqu'au petit matin et que, à ce moment-là, je pourrai faire du stop pour me rendre chez Lyse ? Je ne sais même pas si elle sera présente. Dans la précipitation, je n'ai pas pensé à prendre mon portable.
Bravo, Isadora.
Je ne sais pas si j'ai bien fait de venir ici. Lorsque je suis partie de chez John et Constance en courant, j'ai simplement suivi la route et suis descendue le plus bas possible en direction de la ville. Seuls les lampadaires et leur lumière jaunâtre éclairaient ma course.
Je ne sais pas comment j'ai pu croire que ça fonctionnerait entre nous, comment j'ai pu imaginer que nous pourrions vivre ensemble, comme ça, du jour au lendemain, après cet abandon. Après ces dix-huit années à espérer qu'elle revienne, malgré moi. Les yeux dans le vide, des milliers d'images traversent mon esprit et me ramènent à cette vie parfaite que j'avais avec mon père.
— Alors, ma jolie... Je t'offre un verre ? Me propose alors une voix inconnue.
Je relève le visage et fais face à un homme d'une trentaine d'années. Il a des cheveux longs ébouriffés, porte un veston en cuir, et ses avant-bras sont couverts de tatouages. Ses yeux vitreux me laissent gravement imaginer combien de verres il a dû boire, jusqu'ici. Mais alors que l'homme se racle la gorge, attendant ma réponse, je réponds par la négative :
— Non, merci. J'attends quelqu'un.
— Qui n'est pas prêt de débarquer, si ? Ça fait longtemps que j'te vois ici, me contredit-il.
C'est loupé. Je ne me laisse pas aller pour autant. L'homme m'envoie un sourire carnassier, affichant ouvertement ses dents quasiment noires, dont certaines sont cassées. J'en ai une nausée qu'il m'est difficile d'éradiquer.
— Peu importe. Je veux rester seule, lui envoyé-je finalement en détournant le regard.
— Oh, allez, ma jolie... Insiste-t-il en prenant place à côté de moi.
Je fais mine de m'éloigner, mais l'homme passe son bras derrière moi et saisit mon épaule. Ce simple contact me donne la chair de poule, et j'ai presque l'impression que ses ongles dégueulasses et couverts de cambouis pénètrent ma chair.
— Je vous ai dit non...
— T'es timide, ma jolie ?! Me provoque-t-il en approchant une main de mon visage pour maintenir mon menton entre son pouce et son index.
— LÂCHEZ-MOI ! Hurlé-je.
Ma réaction attire des dizaines de regards sur nous alors, plus vite que l'éclair, l'homme se détache de moi en haussant les épaules, comme s'il n'avait rien fait de mal. Comme si son geste était anodin. Je me lève d'un bond et traverse le bar à grande vitesse, sans me retourner. Et c'est seulement lorsque j'arrive à la porte d'entrée et fais tinter la clochette, que le barman m'interpelle :
— Mademoiselle ! Mademoiselle !
Mais je ne lui réponds pas. Je sors de l'établissement et place mes mains autour de ma poitrine. J'ai encore eu la bonne idée de sortir en petite tenue. Mon short et mon débardeur ne couvrent pas assez mon corps ce soir, pour espérer avoir chaud.
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DADDY'S GIRL - TOME 1 - The Daddy
RomanceEN COURS DE CORRECTION !!! Isadora est sur le point d'avoir dix-huit ans. Malheureusement, peu avant son anniversaire, un drame se produit : son père, qu'elle aimait plus que tout au monde, décède des suites de son cancer. Isadora n'a d'autre choi...