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DEUX ANS PLUS TARD

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DEUX ANS PLUS TARD.

   Nathan contemplait le bleu prononcé du ciel derrière sa fenêtre. Écouteurs à l’oreille, il laissait la musique l’envahir et le combler. Mais c’était trop demander à de simples notes.

   Il se fatigua et se convainquit qu’il se trouvait dans sa chambre. Sa chambre si bien rangée. Pas un pli sur le lit. Aucun grain de poussière au sol. Zéro figurine collector sur l’étagère. Les posters de ses comics et manga avaient été arrachés des murs depuis longtemps. Un seul avait survécu à l’éradication. « Shingeki no kyojin » aka « le titan assaillant » aka « l’attaque des titans. »

   Il l’avait gardé parce qu’il lui dédiait un gout amer. Le personnage principal de ce manga crevait comme un chien à la fin après avoir tout sacrifié pour ses amis. Il y trouvait un côté poétique. Le bonheur n’existait pas. La finalité de toute cette merde était la mort. Tôt ou tard, on crevait tous, d’une façon ou d’une autre.

   Il admettait son cynisme. Le lui d’il n’y a pas longtemps l’aurait trouvé ridicule. Il aurait remarqué que sa chambre était trop ordonnée, que ses dessins perdaient de sa magie avec ses traits réalistes et aurait affirmé que le bonheur existait bel et bien. Il ne lui en voudrait pas. Après tout, il n’avait que douze ans.

   Ses yeux s’alourdirent et il comprit qu’il pourrait pleurer. Il essuya ses larmes depuis le bercail et se tapa les joues. Toute sa vie reposait sur un mensonge. Tout ce qu’il pensait savoir n’était qu’illusion et il devait continuer à vivre. Faire semblant. Faire comme si tout allait bien. Faire comme s’il était une famille. Faire comme si rien n’avait changé. Mais tout avait changé depuis ce jour (qui était censé être un beau jour).

   Maintenant, il restait dans sa niche la plupart du temps et songeait parfois à s’enfuir loin. Il parlait très peu et pensait à des questions qu’un ado ne devrait pas se poser en temps normal. Genre, qui était ses vrais parents ? Pourquoi l’avaient-ils abandonné ? Est-ce qu’il leur foutrait un bon poing dans la gueule ? Est-ce que Belinda et Edgard méritaient de mourir ? La dernière question l’apeurait. Dès fois, il se sentait comme un salaud. Mais parfois, cela lui procurait du plaisir et de la gerbe.

   Il devenait un psychopathe. On disait bien qu’un grand traumatisme créait des arriérés, non ? Il devrait peut-être consulter un psy. Au début, le concept du déballage de frustration lui semblerait peu convaincant. Mais il finirait tout de même par s’y prêter au jeu. Il mettrait tout sur le parquet. La trahison, le mal que cela faisait, ces satanées feuilles qui flottaient dans ses rêves… Néanmoins, cela ne servirait pas à grand-chose. Il ressentirait toujours cette tache à l’intérieur qui le dévorait. Tel un acide puissant.

   En deux ans, cela aurait dû se calmer. Cela aurait dû..

   La porte s’ouvrit sur une Belinda toute fraiche pour une belle journée de travail. Chemisier blanc, pantalon à patte d’éléphant et mocassins. Impeccable comme toujours. Nathan retira ses écouteurs.

— On va bientôt partir. Viens prendre ton p’tit dej.

— D’accord.

   Il avait arrêté de tirer la gueule devant elle. Cela ne servait à rien. Il attrapa son sac adossé sur un mur et descendit au rez-de-chaussée. Les photographies étaient toujours accrochées aux murs. Il ne les regarda pas, car il savait qu’il y trouverait un grand foutage de gueule. Il garda la tête droite, traversa le salon et se servit un bol de céréales dans la salle à manger.

— Salut Nat, lança Greta qui battait les pieds sur sa chaise.

   Le cœur de Nathan se réchauffa et offrit le sourire le plus grand et le plus sincère du monde. Pourquoi ? Parce que Greta ne méritait pas sa haine. C’était une petite fille trop mignonne qui disait bonjour à son grand frère. Rien de plus. De plus, ses yeux noisette reflétaient l’innocence à un point que ses pensées sombres s’envolaient.

— Bonjour, Greta. Alors bien dormi ?

   P’tite sœur. Appelle la petite sœur pauvre tache. C’est ta sœur malgré tout. Rien et personne ne pourra le changer. Mais elle ne l’était pas.

— Suuuuuuper !

— Bien.

— Madame Poloch veut que tu lui rendes visite.

— D’accord. Plus tard.

— Ok.

   Il savoura son sourire en pensant à son mensonge. Il n’irait pas jouer avec elle. Aujourd’hui, il s’était réveillé d’humeur froide et voyait le verre à moitié vide. Il jouait parfois avec elle et il aimait ça. Entendre sa voix fluette lui demander de ne pas boire le thé de la reine d’Angleterre ou de tourner sa cervelle pour lui raconter une histoire. Il aimait penser qu’elle le voyait toujours comme son grand frère et ignorer sa raison qui disait tant. Mais parfois, elle prenait du dessus et le forçait à fuir très vite dans sa chambre.

GØN : quête et guète, Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant