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— Je pensais bien qu'il manquait quelques sachets de barres chocolatées. Je suis trop épuisé pour te gronder. File dans ta chambre et que je ne vois plus ton ombre.

— Mais man.

— Plus vite que ça.

   Nathan regarda son frère partir la tête basse en éprouvant de la joie. Les insoumis avaient la cote même dans la famille. Il ne pouvait être plus fier. Une fois Brayden disparu, le silence plana de nouveau au rez-de-chaussée et pointa le grand absent de cette fête.

   Pour se vider la tête, il mit une musique d'imagine dragon et proposa son aide à sa mère. Cette dernière refusa en indiquant que c'était sa journée royale, mais il parvint à la convaincre en sortant une de ses phrases fétiches : » tout le monde bosse en Amérique. Surtout les chômeurs ». Au sourire complice et aux calins maternels qu'ils partagèrent, Nathan comprit qu'il avait bien fait d'insister.

   Pourquoi les gens disaient des choses qu'ils ne pensaient pas ? Il n'en avait aucune idée. En chantonnant : « so look me in the eyes, tell me what you see. Perferct paridise. » Il débarrassa la table des assiettes, effaça les miettes, détacha la banderole en admirant les paumes de Greta, éclata les ballons avant de les jeter à la poubelle. Il passa aussi un petit coup d'aspirateur par ci et là afin de s'assurer que tout soit nickel. Nathan examina les pièces du rez-de-chaussée revenues à la normal et fut peinée en pensant que son père l'allait voir ainsi. Il scruta la rue à travers les rideaux et toujours pas de 4x4 en vue.

— T'inquiète pas lui dit sa mère en s'appuyant sur le canapé.

— Je ne m'inquiète pas. Je suis impatient.

— Il devrait arriver un moment à l'autre avec un beau cadeau.

   Le « il devrait » fit tilt dans l'esprit de Nathan. Sa mère n'était pas du genre à utiliser le conditionnel et il comprit qu'elle cherchait à le rassurer. Cela ne le fit pas mal, au contraire, il alla se blottir dans ses bras en affirmant qu'il comprenait que papa avait un boulot qui consommait beaucoup de temps et était déjà heureux de sa présence à elle. Le genre de truc niais que pouvait sortir Stephen, pensa-t-il. Mais peu importe, il le pensait et c'était tout ce qui comptait.

   Il ne resta pas lové trop longtemps dans les bras de maman. Cela ne faisait pas trop adulte. Il alla s'enfermer dans sa chambre pour retravailler son dessin. Il pouvait perdre tant d'heures à dessiner. Là où d'autres enfants perdaient leur temps à regarder une émission télé, un film ou un énième remake de Disney, Nathan préférait prendre un cahier, un crayon et une gomme pour entrer dans son petit monde à lui. Un monde qu'il pouvait construire trait par trait et dans lequel les erreurs s'effaçaient à coup de gomme.

   Il n'y perdit pas beaucoup d'heure ce jour-là vu que le sommeil s'empara de lui dès les premières minutes. À son réveil, il faisait déjà nuit. Il se leva un peu patraque, rangea son cahier, tituba dans le couloir qui devançait sa chambre avant de se rappeler que son père pourrait être de retour à l'heure qu'il est. Le cœur en surpoids, il descendit l'escalier et tendit son oreille et ses yeux pour obtenir un indice. Et l'obtint très vite. Un vélo tout neuf devançait la porte d'entrer et la voix de ses parents bouillait dans leur chambre.

   Il fit un petit détour vers son cadeau pour y parcourir ses doigts et humer son parfum. Qu'il allait bien frimer devant les autres. Toutefois, quand les voix de ses parents gagnèrent quelques décibels plus aigües, il décida d'aller jouer les ninjas d'infiltrations. À pas menu, il s'approcha vers les cibles en prenant soin d'esquiver les reflets de la lune à travers la fenêtre. C'était des rayons désintégrateur à ce moment-là. Il logea les murs tel un serpent vers sa proie avant de se tenir près de la porte de leur chambre. Sa mère la tuerait si elle la surprenait en train d'épier leur conversation. Mais quelqu'un ne pouvait pas mourir le jour de son anniversaire et c'était la première fois qu'il entendait ses parents se disputer comme ça.

— Et qu'est-ce qu'il y a de plus important que l'anniversaire de Nathan ? pesta Belinda.

— Je t'ai l'ai déjà dit. J'ai été retenue. Ce n'est pas de ma faute. Je ne veux pas que l'on dispute pour ça. Je m'excuse.

— C'est si facile de t'en tirer avec un je m'excuse et un vélo tous frais. Cela fait trois ans que tu évites son anniversaire. Je ne sais pas dans quel monde tu vis, mais trois ans c'est beaucoup.

   Nathan fronça les sourcils en entendant ses mots. Papa évitait de plein gré son anniversaire ? Non, maman devait se tromper sur le choix de ses mots. Elle voulait surement dire que tu es absent,

— Je sais que cela fait beaucoup. Mais je te le redis, ce n'est pas de ma faute.

— On s'est promis d'être là pour lui quoiqu'il en coute. On se l'est promis, Ed.

— C'est vrai et je te promets de faire de mon mieux la prochaine fois.

— Ne me prends par pour une conne chérie. Je sais très bien ce qui t'arrive. Tu n'en peux plus c'est ça ? J'ai pensé qu'après tout ce temps, ce genre d'attitude était derrière nous.

— Il faut croire que non.

   La conversation prenait une tournure assez inquiétante et Nathan avait de plus en plus envie de jeter un petit coup d'œil pour voir les expressions qui grimaient leur visage. Ils pouvaient très bien sortir des mots piquants, mais si c'était avec le sourire sur le visage, tout allait bien. Toutefois, il ne pouvait pas risquer de se faire repérer. Et un ninja opérait dans l'ombre.

— Tu n'as pas le droit, Ed. Tu n'as pas le droit de dire ces genres de chose.

— Oh que oui ! J'en ai ras-le-cul le droit, vocifera ce dernier en baisant la voix, mais en y insérant beaucoup plus d'aggrésivité. Mon rôle est d'assurer que ma famille ai de quoi manger, un endroit où dormir, de veiller à leur bien-être. Mais par-dessus tout, mon rôle c'est de la protéger. Et comment veux-tu que je me sente bien en sachant que le premier danger, c'est lui.

— Il fait partie de la famille.

— IL N'EST PAS NOTRE FILS BELINDA !

GØN : quête et guète, Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant