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J'aide la jeune femme à se redresser et examine son visage contiusionné entre mes mains.

K - Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? murmuré-je en constatant son arcade sourcilière ouverte de même que sa lèvre, son nez saignant mais pas cassé, la bosse sur sa pommettes gauche.

F - Je suis désolée, j'aurais dû t'écouter. I-il... il m'a frappé, encore.

K - Manolo ?

Elle hoche la tête. Je ne dis rien et me contente d'ouvrir la porte, la laissant entrer.

K - Va te doucher, et ensuite on va nettoyer tes plaies. Sers toi un pyjama dans mon placard.

Mon ancienne amie s'exécute allant directement dans la salle de bain. Pendant ce temps, je prépare à manger. Vingt minutes plus tard, Fanny revient et s'installe à la table avec la trousse de secours à la main. Dans un silence pesant je m'occupe de ses blessures, casserole sur le feu juste à côté.

K - Pourquoi, cette fois ? murmuré-je peinée.

Elle semble à bout de force. Fanny a pratiquement toujours été là pour moi. Même si elle était partie, même si elle a préféré se noyer dans la violence de celui qu'elle aime, avant, elle a toujours tout fait pour m'aider. Et moi aussi. Ma gorge se noue à cette pensée. Mon amie. Battue. Je passe la main sur mon visage après avoir rangé les ustensiles de soins.

F - Je ne sais pas, murmure-t-elle. Il était en colère à cause d'un ami qui l'a lâché. Je crois que j'avais juste oublié d'éteindre la lumière de la salle de bain.

Je hoche la tête, le cœur douloureux de fureur. Pour une putain de lumière. J'observe plus attentivement mon amie. Les joues creusées, les cernes, la maigreur évidente... elle a perdu beaucoup de poids. Ses yeux ont perdu de leur éclat, autrefois brillants de vivalité, désormais vides, sombres, même pas de désespoir mais d'acceptation. Accepter une vie pareille l'enfer avec un homme égal au démon sur Terre. Même ses cheveux ont changé, plus longs mais ternes et semblables à de la paille. Ils ont perdu leur douceur.

F - Je veux porter plainte, murmure-t-elle si bas que je failli ne pas l'entendre.

K - Alors mange et on ira juste après, répondé-je en caressant le haut de sa tête.

Je nous serre la préparation et nous mangeons tranquillement. Au milieu de ma colère contre Manolo, le soulagement étreint mon cœur, comme une paumade sur une brûlure. Il aura fallut du temps mais... elle a ouvert les yeux. Fanny a ouvert les yeux. Alors je ne doute pas qu'un jour elle reviendra, pleine et entière de son corps et de son esprit.

Les assiettes terminées, Fanny m'emprunte des vêtements. J'attrape les clefs de ma voiture que je n'ai pas revue depuis ce qu'il me semble être une éternité, puis descendons. Dans l'ascenseur, je sens la main de Fanny se glisser dans la mienne, une demande de soutient à laquelle je réponds en la serrant doucement. Son corps se détend un peu, dans son regard se manifeste une once de soulagement.

Au poste de police, nous sommes reçues assez rapidement. Lorsqu'on nous indique une pièce dans laquelle entrer, je sens mon amie avoir le souffle court. Devant la porte, je l'aide à reprendre sa respiration, et l'ouvre.

C'est à mon tour de perdre mon souffle en voyant l'homme patiemment assis à son bureau. Alors qu'il termine d'écrire sur un postit jaune, l'agent Payard relève la tête. Il se lève, semblant surpris de me voir.

Ag P - Madame Leroy. Ravi de voir que vous n'êtes plus convalescente, dit-il en me tendant la main, main que je serre rapidement avant de me retirer tout aussi vite.

K - Merci.

Ag P - Que vous arrive-t-il ? demande-t-il en se tournant vers Fanny.

Elle ouvre la bouche mais... rien ne sort. Aucun son. Peinée, elle baisse la tête.

Au-delà Des LimitesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant