54. Psychologie inversée

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Angie


Dolorès Genet.

Dans son tailleur trop strict, chaussée de ballerines vernies, elle m'observe sous ses lunettes. Cela dure depuis de longues minutes, déjà. Après s'être changée, elle s'est assise dans un fauteuil qu'elle a déplacé pour le mettre devant moi, et depuis, s'amuse à ne rien dire. Comme lors de nos séances psy à Trinity, elle attend.

Que je me confesse, peut-être. Que je le fasse pour elle, sûrement.

Mais j'ai beau essayer de déchiffrer la situation, je n'y arrive pas.

— Qu'est-ce que vous me voulez, bon sang ? grincé-je entre mes dents serrées.

Je n'ai plus froid, désormais. Au contraire, c'est une chaleur sourde qui se répand sur ma peau et à l'intérieur de mes veines. La colère me gagne, petit à petit, me faisant monter sous pression jusqu'à menacer de me faire exploser. Je n'ai pas l'âme d'une survivante, finalement. J'ignore comment agir, ou que faire, pour ne pas côtoyer la mort.

La psychologue sourit. Elle ne dit toujours rien, patiente après je ne sais quoi. Ou bien... je ne sais qui. J'ai peur, c'est vrai. Mais avant tout, j'ai envie de comprendre. J'ai besoin de réponses.

— Vous avez tué Olivia.

Je l'affirme, sans ciller, les yeux dans les yeux. Après tout, je ne crois pas avoir encore grand-chose à perdre. Ses sourcils se froncent de façon imperceptible, ce qui me donne le droit à sa première confession. Avec le temps, à force de n'avoir jamais rien vu ou entendu, j'ai appris. Je me suis enseigné à moi-même comment comprendre sans entendre et comment observer sans regarder. J'avais tout perdu. Mon père, ma mère, mon frère. Je n'avais plus rien à sauver. Et pourtant, une part de moi souhaitait tout de même s'en sortir. Je tente de mieux cerner les gens, désormais. Je constate. Je me concentre. Un battement de cil, un froncement de sourcils. Un retroussement de nez, ou un rictus forcé.

Je vois. J'écoute. Je comprends.

Mais là, je dois bien avouer que la psychologie de Dolorès me tombe dessus. D'évidence, elle est plus douée que moi à ce petit jeu, puisqu'elle en a fait son métier. Et pas uniquement dans l'enceinte de Trinity. Je n'ai rien remarqué. Pas un seul instant, je ne l'ai soupçonné. Et même au moment où elle se trouvait devant moi, dans les couloirs, les yeux noirs et l'air buté, prête à me foutre dessus, j'ai cru à une erreur.

Ça ne pouvait pas être elle, la coupable. Parce qu'elle n'avait absolument aucun fichu motif pour le meurtre d'Olivia, ni même pour tout le reste me concernant, d'ailleurs. Il a fallu que je me retrouve ligotée et plongée dans son regard vide, face à ses mains armées d'un couteau, pour que je m'en rende enfin compte.

C'est réel.

Dolorès Genet se trouve vraiment devant moi. Elle est fautive, pour moi. Mais dans ses yeux, je le constate. Je le suis aussi, pour elle. Seulement... je n'arrive pas à saisir pourquoi.

SYKE HACKER T1 - MONSTER (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant