21 - Montagne russe ou ping pong au choix

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Amélia

J'ai beau être sèche et très peu loquace avec Jonathan, il persiste à me parler. Je suis à deux doigts de quitter le jacuzzi pour aller me coucher, mais je ne bouge pas de ma place. Pourquoi ? Aucune idée.

- Tu vas bouder encore longtemps ?

- Non ! Je n'ai rien à dire.

- Alors je vais te parler de sujet qui fâche. As-tu rappelé ta mère ?

- Non !

Je m'étonne de lui avoir répondu.

- Tu comptes faire quoi ?

- Être dans le déni comme aujourd'hui. Ça m'a fait du bien.

- Tu penses que c'est une bonne idée ?

- Non ! Mais je n'ai pas envie de...

- De quoi ? Parles-en avec mon père, il peut certainement t'aider.

- Non !

- Mais c'est que tu es têtue en plus. Je lui en ai déjà touché deux mots. Il prend des renseignements auprès de ses collègues, si tu ne vas pas vers lui, c'est lui qui viendra vers toi.

- De quoi tu te mêles à la fin.

Je suis furieuse. Je sors en rage du Jacuzzi et prends mes distances.

- Ta situation est grave Amélia, tu ne vas pas continuer dans ces conditions, tu risques des représailles désagréables.

- Mais qu'est-ce que ça peut te faire à la fin.

- Non ! Mais tu délires là j'espère ? Tu es complètement inconsciente.

- Oh non ! Je suis plus que consciente. C'est ma vie, mon problème. Tu es qui pour te mêler de mon vécu.

- Tu as raison je ne suis personne. Mais ça ne change rien il est hors de question que je te laisse dans ce genre de situation sans agir. À mon niveau je ne peux pas réaliser des miracles mais mon père peut te soutenir.

- Personne ne peut m'aider Jonathan. Tu entends ? personne ! C'est mon merdier. Je suis née dedans. C'est mon destin et rien ne changera. Tu crois que je n'ai pas déjà essayé d'y échapper ?

- Tu réessayeras encore.

Le ton monte de plus en plus. Jonathan ne lâche rien, ça m'exaspère. Je n'en peux plus, je souhaite fuir, je sors telle une furie du jacuzzi mais Jonathan me retient. Je craque en m'agitant et en pleurant. Il me prend dans ses bras pour m'apaiser et ça fonctionne, les vannes s'ouvrent.

- Tout ira bien. Me chuchote t'il.

Or je n'y crois plus. Au plus je me débats au plus je suis rattrapée par le passé, comme s'il me rappelait sans cesse que jamais je ne pourrai lui échapper.

- Laisse nous t'aider, je te promets que l'on trouvera la solution.

J'ai des difficultés à me détacher de ses bras, pourtant je m'y oblige. Hors de question que je sois aussi faible face à lui. Oui je suis apaisée voir même en sécurité contre lui, mais je ne veux m'y habituer. Après cette croisière ma vie reprendra telle qu'elle était, je fais l'autruche mais la réalité me rattrapera bien assez vite.

- Ça va aller, je repousse légèrement Jonathan. Désolée je n'avais pas l'intention de craquer de cette façon.

Bizarrement Jonathan ne répond pas, son regard fixe l'horizon. Je ne sais pas comment interpréter son attitude.

- Personne ne veut entrer dans ce monde malsain et encore moins ta famille.

Jonathan pose de nouveau son regard sur moi. J'ai l'impression d'y lire de la colère. Ses yeux marrons, se sont assombris, ses traits sont plus marqués. Lui qui ne faisait pas son âge le fait tout à coup. D'une voix autoritaire que je ne lui connaissais pas jusqu'alors :

- Ce n'est pas à toi de décider qui entre dans ta vie. Tu comprendras avec le temps.

Je me braque instantanément.

- Parce que tu crois que tu vas décider à ma place ?

- Oui !

- Jonathan !

- Pas la peine de t'énerver à nouveau. Ça ne changera strictement rien.

- Tu n'es personne pour moi.

Il lève les yeux au ciel.

- Tu ne cesses de me le répéter, à force je me demande qui tu essaies de convaincre. Toi ? Peut-être ?

- Stop !

- Oh que non, je ne vais pas t'obeir comme un bon petit toutou. Ta situation est bien trop grave pour que ma famille reste en dehors. Amélia, c'est comme ça.

Par pure méchanceté et parce que je suis démunie, je pique là où ça fait mal :

- Occupe toi déjà de tes problèmes.

Jonathan éclate de rire.

- Figure toi que je découvre que m'occuper de tes problèmes me procure un bien fou, et du coup
je minimise les miens qui me paraissent bien plus dérisoires.

De plus en plus exaspérée par ses répliques, je tente à nouveau de fuir mais Jonathan ne me laisse pas tranquille pour autant.

- J'ai besoin d'espace.

- Oh non ! Tu as besoin de t'enfuir surtout.

- Laisse moi fuir alors !!!

- Ok !

Jonathan s'écarte, je file dans ma cabine, et décroche le téléphone pour commander de quoi combler mon envie de nourriture. Je suis si mal qu'il faut que je mange, besoin de me soulager. Une fois livrée je dévore à une vitesse fulgurante jusqu'à vomir. Une nouvelle crise, nouvelle culpabilité. Me répéter une fois de plus que je ferai attention demain.

Nos âmes torturées Où les histoires vivent. Découvrez maintenant