49 | Voyage - Voyage

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Jonathan

Me voici arrivé à l'aéroport de Lisbonne seul. J'ai réussi cet ultime défi, j'ai même réussi à abandonner la casquette. Je n'ai pris aucun médicament préférant utiliser les méthodes de respiration indiquées par mon psy. J'ai repris la thérapie ce qui m'apporte énormément de positif. Je ne suis pas guéri de ma phobie sociale, j'avance, les scarifications se font de plus en plus rares, c'est une grande victoire. La semaine dernière j'ai pris une grande décision recouvrir mes cicatrices par des tatouages, pour moi c'est une promesse : arrêter de m'autodétruire. J'ai besoin de cette action symbolique pour tourner la page du passé que je veux bannir.

J'aperçois au loin, Christophe qui m'attend. Amélia n'est pas au courant de ma venue.

- Salut Jonathan, ça va ?

- Oui. Je te remercie. J'ai géré comme un grand.

Mon ironie provoque son sourire en coin.

- Nickel. Tu es pressé de quitter l'aéroport je suppose ?

- Tu lis dans mes pensées.

Il se marre. Je lui prends le pas pour quitter l'aéroport.

- Les travaux avancent bien ?

- Oui. Même si j'avoue être content de m'en être éloigné pour quelques jours. Je ne réalisais pas que ce serait aussi prenant.

- Tu m'étonnes.

- Comment fais-tu pour gérer autant de biens ? Ça me rendrait fou.

Christophe arrête devant une Porsche une sept cent dix huit cayman.

- Je pourrai te retourner la question concernant ton appareil photos, comment fais-tu pour réaliser de telles œuvres.

- C'est sympa. C'est ta voiture.

Christophe hausse les épaules.

- Oui je l'ai depuis un mois. Allez monte, si tu es sage je te laisserai peut-être la conduire.

- Tu tentes de m'amadouer ? mais ça ne sert à rien, je préfère largement ta fille. Ne te vexe pas.

Nous éclatons de rire.

Christophe m'a appelé il y a quelques semaines, pour me proposer de le rejoindre au Portugal, étant donné qu'Amélia n'arrivait pas à franchir encore le pas. Au fur et à mesure nous avons appris à nous connaître. L'entente s'est installée d'emblée. Demain est une journée spéciale, l'anniversaire d'Amélia, il était hors de question que je rate cet événement.

- Amélia ne se doute toujours de rien ? Demandais-je.

- Crois moi, elle n'a rien vu venir.

Je le crois sur parole. Ce type est capable de tout.

- Des nouvelles de sa mère ?

- Aucune pour le moment, je doute qu'elle reste silencieuse aujourd'hui, Sauf si elle est trop défoncée pour se souvenir de la date, ce que j'espère. J'aimerai qu'Amélia change de numéro de téléphone et qu'elle tourne la page, mais c'est compliqué. Sylvia reste sa mère.

Je tourne la tête vers Christophe qui sert la mâchoire.

- Si j'avais su plus tôt que j'avais une fille, le fil de la vie aurait été complètement différent.

Il souffle d'exaspération, agrippe et serre le volant de colère.

- C'est comme ça tu ne peux revenir en arrière. Maintenant tu es présent dans sa vie, c'est le principal. Elle peut enfin compter sur une personne fiable qui prendra toujours son parti.

- Et comment ! Ma fille est la meilleure.

Je ne te dirai pas le contraire. Je tourne la tête vers la vitre pour profiter du paysage. Je ne connais pas bien le Portugal. Être ici m'apaise, je ne saurais pas en expliquer la raison. Peut-être parce que je ne vais pas tarder à retrouver Amélia. Elle m'a tellement manqué. Lorsque Christophe m'a invité, il était hors de question de refuser, j'ai foncé sans réfléchir. Mon anxiété ne doit plus prendre le contrôle de ma vie. C'est simple à dire et à penser, dans l'action c'est autre chose. Bien entendu j'étais anxieux plusieurs jours avant de venir ce qui inquiétait ma mère, mon père a su trouver les mots pour l'apaiser. Leur dynamique de couple reste mon modèle. Je suis certain avoir rencontré la personne avec qui je vais passer ma vie. Je n'ai jamais ressenti une telle évidence. Après en avoir longuement discuté, papa m'a avoué avoir vécu le même coup de foudre pour maman. Cet aveu m'a convaincu de ne pas lâcher celle qui fait battre mon cœur.

Nous arrivons devant un immense portail noir :

- Prêt ? Me demande Christophe.

- Bien entendu. Tu crois que je vais rebrousser chemin. Tu rêves. Ta fille m'a trop manqué.

Le sourire satisfait sur le visage de Christophe me rassure.

- J'aime lorsque j'entends le mot « fille ». Je n'aurai jamais imaginé vouloir des enfants. Aujourd'hui j'ai ma réponse.

Surpris je fixe mon « futur » beau père.

- Tu en as parlé à ton compagnon ?

Une ombre de tristesse passe sur son regard

- Nous sommes loin de cette discussion. Pour le moment je tente de le persuader de revenir à la maison et j'avoue que je désespère.

- Désolé de l'apprendre.

- Pas de soucis. Je m'en remettrai.

Il a beau prononcer ces mots, je perçois qu'il ne les pense pas.

- Mais bien sûr. J'ose le contrer.

Discuter avec Christophe est tellement simple, j'en oublie qu'il est le père d'Amélia.

La grille s'ouvre devant une immense allée, au plus nous avançons au plus la maison face à nous se dessine. C'est grandiose, immense, épuré, incroyable. Pas de doute j'en ai plein les yeux. Je comprends pourquoi Amélia a des difficultés à quitter ce lieu, un véritable coup de cœur qui  donnerait presque envie de déménager alors que je ne suis pas encore installé. Dans deux mois je serai officiellement propriétaire de la maison dont je rêve...

- Ta maison est superbe. Tu me permettrais de prendre quelques photos pour un usage personnel.

- Bien entendu. Christophe me tape doucement le bras. Si tu veux rencontrer Amélia dans son loft, passe par cette entrée donnant sur la piscine. Elle est juste en face. Je vous laisse prendre le temps de vous retrouver.

Me dit-il avec un clin d'œil suggestif.

Je ne traîne pas plus longtemps. Je passe la porte d'un petit sas qui ouvre sur la piscine. Je découvre rapidement le loft avec ses magnifiques baies vitrées. Sur un transat au bord de l'eau est allongée Amélia lisant. Mon cœur bat la chamade, je la fixe un instant ayant du mal à réaliser qu'elle est enfin là face à moi. Plus que quelques secondes et elle me verra. En attendant je  l'observe, sa peau est toute dorée. Elle a pris un peu de poids ce qui est une bonne nouvelle. Elle doit se sentir bien ici. Immédiatement la peur s'installe en moi. Voudra t'elle quitter ce lieu pour me suivre ? Je n'en suis plus certain. Un instant je me demande la raison de ma venue. Lorsque Amélia retire ses lunettes de soleil pour me regarder, un immense sourire sincère et lumineux étire ses lèvres. Elle se lève, court vers moi pour atterrir dans mes bras. Ai-je encore un doute sur ce qu'elle ressent ? Non ! Je peux enfin respirer.

Nos âmes torturées Où les histoires vivent. Découvrez maintenant