44 | Un petit tour et puis s'en va

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Amélia

Qu'est-ce que je fous ici ? C'est ce que je me dis lorsque je constate que je suis en salle d'embarquement prête à affronter ma plus grande peur : l'avion. Pourquoi n'ai-je pas réalisé plus tôt que j'allais monter dans cet engin de malheur, voler deux heures trente dans les nuages. Je déteste cette idée. Je stresse comme une dingue.

J'envoie un message à Christophe pour le prévenir que je suis bien à l'aéroport. C'est la première fois que je peux compter sur quelqu'un lorsque ça ne va pas. D'un coup j'ai peur, si lui aussi me rejetait ?

Maintenant je n'ai plus qu'à attendre une quinzaine de minutes avant d'embarquer sur ce fichu coucou et je serai loin de Marseille, loin de lui surtout.

Je réalise que je me suis enfuie au moindre petit prétexte. Constater que Jonathan plongé sur l'écran de son portable, s'éloignait de moi, j'ai ressenti une douleur inhabituelle, J'ai eu la trouille, et cela m'a mis en colère, je devais partir loin très loin, ce que je fais actuellement.

Mon téléphone se met à vibrer, « Jonathan » s'affiche. Mon cœur accélère. Il a dû être informé par Magalie que j'avais quitté le bateau et que j'étais prête à m'envoler pour Lisbonne. Je ne lui laisse aucune chance de s'expliquer ce n'est pas cool j'en conviens, mais je ne peux pas agir autrement. Je n'y arrive pas. Convaincue de devoir me protéger je préfère ne pas répondre.  Ce n'est pas correct, je dois affronter Jonathan un jour ou l'autre mais ça ne sera pas aujourd'hui. Il nous faut  de la distance entre nous. Je dois réfléchir et s'il m'en veut ce n'est rien j'assumerai mes décisions et mes actes.

Je scroll sur mes réseaux sociaux et n'oublie pas de partager mes nouvelles publications. J'évite de raconter ce qu'il m'arrive ces derniers jours, comme à mon habitude je filtre un maximum d'informations concernant ma vie privée. Je réponds aux différents commentaires reçus et cela me prend pas mal de temps. J'ai augmenté mon nombre d'abonnés. J'ai reçu quelques mails de futurs partenariats, je décide de tout mettre de côté pour regarder le tout à tête reposée. Je ne suis pas en état de prendre des décisions importantes.

Il est temps pour moi de monter dans ce bus volant. Comme Je suis un peu claustrophobe, j'ai des difficultés à respirer, je tente de me calmer. Une fois installée sur le siège près du hublot, je tente de calmer mes nerfs en me rassurant comme je le peux. « L'avion est le moyen de transport le plus sûr » je me le répète sans cesse mais je ne peux m'empêcher de dérailler un peu en pensant qu'il suffit d'un accident. J'en ai marre de moi. Je dévisage les autres passagers et la majorité ont l'air parfaitement calme. Comment font-ils ? Je n'y arrive pas. Mon téléphone pourtant en mode avion est serré dans ma main, comme s'il pouvait me sauver la vie. Je me rends compte de l'absurdité de mon geste mais je ne peux m'empêcher. Un véritable doudou.

Je mesure à quel point je n'ai plus la tête sur les épaules. L'avion s'élance, je m'agrippe au fauteuil, tout en regardant à travers le hublot pour je ne sais quelle raison... simplement j'en ai besoin. Du grand n'importe quoi j'en conviens. J'ai la chance d'avoir personne à mes côtés pour percevoir mon état d'angoisse. Lorsque l'avion se stabilise, je respire sauf que les minis trou d'air me mettent en panique. Vivement la fin de ce vol.

Deux heures vingt en enfer se termine enfin. Les roues ont enfin touché le sol. Je peux souffler et reprendre une respiration normale. J'ai survécu. Hourra.

Je récupère ma valise en me dirigeant vers la sortie, le cœur battant de revoir mon père, qui m'aidera à me sortir d'un faux pas.

Christophe est bien là devant moi, un grand sourire aux lèvres. Il me fait signe, je ne peux m'empêcher d'être soulagée de le revoir.

- Amélia, heureux de te revoir.

- Christophe. Heureuse d'être en vie

Christophe ne peut se retenir de rire.

- Tu as peur de l'avion ?

- Oh que oui. Je déteste monter dans cet engin de malheur. Je n'avais pas réaliser que pour revenir ici je devrai en passer par là.

- Ravi de t'avoir récupérée en vie, tu paraît exténuée. Tu n'as pas dû dormir beaucoup.

Pas la peine de répondre, Christophe a bien compris.

En marchant vers la sortie, je ne peux que me sentir bien, ce qui m'étonne, une sensation nouvelle s'éveille, je me sens en sécurité auprès de mon père. Ça m'en donne des frissons.

- Parlons d'hier soir !

- ....

- Tu n'es pas très loquace, j'en déduis donc que tu as fui ce gentil gars.

Je m'arrête, fixe mon père qui se tourne vers moi avec un sourire en coin, les mains dans les poches. J'apprécie beaucoup son allure et ce qu'il dégage. Il ne fait absolument pas son âge, pas un cheveux gris à l'horizon pas de doute il les teint. Je ne serai pas étonné qu'il se fasse des peeling du visage, intéressant. Le problème n'étant pas là, il se mêle un peu trop de ma vie privée là tout de suite. Je ne peux qu'expirer profondément tout en trouvant le courage d'être honnête avec lui.

- Oui, j'ai trouvé le premier prétexte pour fuir. Tu es content. Dis-je légèrement agacée.

Tout ce qu'il me répond :

- Tel père, telle fille.

Surprise, je le scrute.

- Ah oui ?

Il hoche la tête pour confirmer. Nous reprenons le chemin vers la sortie.

Nos âmes torturées Où les histoires vivent. Découvrez maintenant