13 | Gouroutisez-moi !

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Amélia

J'ai décliné le repas de ce soir, j'avais besoin de rester seule. Ma mère m'a laissé je ne sais combien de messages et ça m'agace. Je n'arrive pas à trouver le courage de la rappeler, elle réclame encore de l'argent ou me fait du chantage parce que j'ai osé m'offrir un voyage dont elle rêvait.

Je me suis commandée un burger bien gras pour me remonter le moral, une mousse au chocolat et un orangina. Ma mère c'est ma kryptonite, toujours là pour foutre ma vie en l'air. Je dois  réunir toutes mes forces pour l'affronter, je regarde mon portable et je m'y refuse. Après avoir englouti mon repas, je me sens lourde, ballonnée avec un mauvais goût dans le bouche persistant. Je ne supporte pas ces sensations. Je m'en veux, pour ce que je vais déclencher mais il est hors de question que je reste dans cet état. Direction les toilettes pour vomir.

Physiquement je suis mieux, émotionnellement c'est une autre affaire. Je décide de sortir de ma cabine pour me changer les idées, il est vingt-trois heures, j'ai envie de danser, m'amuser et boire un peu, direction la boîte de nuit du paquebot. Je mets un temps fou pour repérer le chemin, je me mélange les pinceaux dans les niveaux, je ne m'y fais pas. Je peste mais je finis par atteindre la boîte de nuit, il y a un monde fou... tant mieux me mêler à la foule m'aide à me lâcher complètement. Direction le bar où je prends un mojito, je tire un peu la tête lorsque je découvre qu'il est vraiment léger en alcool. C'est une arnaque pour pousser à la consommation et vu le prix d'un verre, ça va être frustrant de ne pas atteindre un état "sympa". Bref je ne me démoralise pas pour autant. Je termine mon verre allégé et je danse.

Je me laisse porter par la musique, les yeux fermés, je suis seule au monde, je me déhanche sur le tempos, j'entre dans une bulle de bien être jusqu'au moment où je sens des mains sur mes hanches. J'ouvre directement les yeux, furieuse, je tourne la tête, face à moi le gars qui m'a soûlé à la piscine..  La rage m'envahit, pour qui se prend t'il !

- Lâche moi bordel. Tu te prends pour qui ?

Le gars ne doute de rien.

- Laisse toi séduire, tu vas adorer passer du temps avec moi.

Je me libère de sa prise en hurlant :

- Va draguer quelqu'un d'autre et fiche moi la paix.

Le type se marre.

- Ton mec t'a laissé seule ce soir.

Je ne réponds pas, je m'éloigne de ce type pour danser ailleurs, sauf qu'il me saisit violemment le poignet me tirant derrière lui. Je tente de m'extirper mais il ressert la prise. Il s'apprête à me sortir de la piste de danse, personne autour de nous remarque que je l'on m'agresse, bien entendu. Dernière solution je le griffe, surpris, il me lâche enfin. Je sors de la discothèque à une rapidité record, espérant qu'il ne me suive pas. Je file droit devant ne sachant pas réellement où je vais. Mon sens de l'orientation est toujours aux abonnés absents encore plus lorsque je suis dans un état de stress. Je cherche à me diriger vers le pont du bateau où il y a toujours du monde et surtout où se trouve le personnel navigant. Hors de question que je ne signale pas ce type qui me semble être dangereux. La façon dont il m'a agrippée en me traînant derrière lui m'indique qu'il a l'habitude d'agir de la sorte. Je déteste cette sensation. Je cours dans les couloirs, rassurée de ne pas être suivie. Je trouve enfin ce que je cherche. Je file droit à l'accueil pour expliquer ce qui m'est arrivé. L'hôtesse ne comprend pas trop le français, de mieux en mieux. Elle ne fait même pas l'effort d'appeler une collègue,  elle se contente de me sourire. Formidable ! De rage je décide de prendre la direction de ma cabine, la soirée est complètement gâchée. Après une journée géniale, c'est l'enfer. Décidément j'attire les ennuis partout où je passe. J'ai la poisse, il faudrait peut-être que je prenne rendez-vous chez un marabout pour oter le mauvais œil.

J'arrive devant la cabine lorsque j'entends un bruit derrière moi. Pas le temps de me retourner que je suis plaquée avec violence contre la paroi de la porte. Je n'ai pas le temps de réagir, je suis sonnée par ce qui se passe. Je me débats. Je reconnais la voix du connard de tout à l'heure.

- On va découvrir si tu joues encore la maligne !

Quand je disais que j'avais la poisse. Je hurle à plein poumons. Le type ne lâche rien. Il tente de me faire taire. Mais bon sang, je ne suis pas seule sur ce bateau énorme ! il y a bien quelqu'un qui va m'entendre, surtout ici. Où est passé le majordome qui aime nous sauter dessus à toute heure du jour et de la nuit pour récolter ses pourboires ? J'aurai besoin de lui, là, maintenant. Le type m'agrippe par les cheveux.

- File moi, ta carte pour ouvrir la porte.

Non mais il rêve celui là. Hors de question que je céde. Si je pénétre dans ma cabine avec lui je suis foutue. Je n'ai pas spécialement l'intention de vivre un viol.

J'agis afin de  le repousser mais j'ai très peu d'attitude pour me mouvoir. Au moment où je désespère...

J'entends l'ouverture d'une porte. En conséquence, le type lâche enfin prise, mon cœur bat la chamade. Je prends conscience de l'agression que j'ai  subie. Paniquée et toute tremblante je tente de trouver mon pass. J'aimerai fuir mais je n'y arrive pas. Ma vision est troublée sous le choc de ce que je viens de vivre. Tout ce que j'arrive à comprendre est que le mec a fui. J'ouvre rapidement, et une voix qui m'apaise instantanément m'interpelle :

- Amélia ? Ça va ?

Je m'écroule sur le sol en larmes. Non ça ne va pas du tout.

Nos âmes torturées Où les histoires vivent. Découvrez maintenant