28 | Le prix de l'ivresse

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Amélia

Je me réveille avec un mal de tête pas possible et peine à me lever. Je mets un certain temps avant de comprendre que je ne suis pas dans ma cabine mais dans celle de Jonathan, je n'ai plus mes vêtements, encore moins de sous vêtement sous le teeshirt immense que je porte. En panique je regarde la chambre, je n'ai pas l'impression qu'il se soit passé quoi que ce soit. Enfin c'est ce que je souhaite. Je tente de me souvenir de la soirée d'hier. J'ai pas mal bu, après avoir échangé plusieurs messages avec mon père. J'étais dégoûtée de ne pas rencontrer Jonathan depuis plusieurs jours. Je me suis rendue dans la boîte de nuit du bateau où j'ai consommé, puis J'ai décidé de me confronter à Jonathan. Ensuite tout est confus. Merde, merde, merde. Qu'est-ce que j'ai bien pu dire ou faire ? Quand je suis bourrée j'ai tendance à balancer tout ce qui me passe par la tête. En panique, je quitte la chambre espérant regagner ma cabine sans être vue, or Jonathan est debout dans le salon, et m'attend. Zut ! Fait chier. Il me regarde, narquois, avec un sourire en coin démoniaque. Il ne va pas me rater c'est une évidence.

- Enfin réveillée ?

- Euh oui ! Je pense que je dois te présenter des excuses pour hier soir.

Il sourit davantage, je ne sais plus où me mettre surtout que je ne me souviens pas du tout de mes actes et ça m'énerve.

- Il me semble oui !

- Désolée. Je jette un œil circulaire partout dans la pièce pour tenter de trouver mes vêtements sans succès.

- Tu cherches quelque chose ?

Je me racle légèrement la gorge gênée.

- Oui, mes vêtements.

Il accentue son sourire, je suis de plus en plus mal à l'aise.

- ils sont au pressing.

- Pourquoi ?

Jonathan éclate de rire. Je me vexe. Oui je suis assez susceptible c'est comme ça.

- Je constate que tu as oublié

- Il se pourrait bien oui. J'aimerai simplement savoir si j'ai fait ou dit des trucs bizarres.

Jonathan toussote avec un air embarrassé.

- Je te résume par un petit topo, tu t'es invitée dans ma cabine en racontant n'importe quoi. Tu as réclamé à boire, j'ai refusé bien entendu, ensuite tu t'es mise à pleurer et à vomir.

Je dois avoir les yeux exorbités. Je ne m'attendais pas à cette version.

- Je t'ai vomi dessus ?

- Oui !

- Merde !

- Tu peux le dire. Mais ce n'est pas tout.

- Comment ça ?

Je suis de plus en plus mal à l'aise. Comment ai-je pu... Il ne manquait plus que ça.

- Tu t'es complètement déshabillée au milieu du salon.

Je suis affreusement mortifiée. Je ne trouve plus les mots tellement je suis choquée.

- Je t'ai aidée à te doucher et je t'ai refilé l'un de mes tee-shirts. Rassure-toi je n'ai pas abusé de la situation.

- Il ne manquerait plus que ça.

Jonathan soupire en passant les mains dans ses cheveux.

- Un conseil. Arrête de boire surtout si tu es seule. D'ailleurs pourquoi es-tu retournée dans cette boîte toute seule après ce que tu as vécu la dernière fois. Sérieux.

- C'est bon ! Pas besoin de me faire la morale ! Tu n'es pas mon ange gardien.

- Ça tu peux le clamer, sauf que depuis que l'on se connaît j'ai l'impression de toujours te sortir d'un faux pas. Tu as survécu comment jusqu'à ce jour ?

- Si on te le demande, réponds que tu ne sais pas.

- Dis-moi plutôt pourquoi tu t'es mis dans un état pareil hier soir ?

Ai-je envie d'en discuter ce matin ? Je n'en suis pas vraiment certaine. Jonathan quitte le salon pour se rendre dans sa chambre, ce qui me donne un laps de temps pour me décider. Lorsque Jonathan, revient. Il me tend un bas de jogging molletonné.

- Enfile ça, ce sera mieux pour nous deux.

Gênée, je saisis rapidement le pantalon et l'enfile.

- Pour le petit déjeuner, je commande des fruits frais et un thé au citron ? Souhaites-tu autre chose ?

- Non ce sera parfait merci.

Il passe notre commande. Je m'installe sur le fauteuil à côté du canapé et je prend l'initiative de me confier.

- J'ai reçu plusieurs messages de mon père et  j'ai réservé mon billet d'avion pour le rejoindre à Lisbonne après la croisière.

- C'est une excellente nouvelle ? Non ?

- Je n'en sais rien. Je suis complètement perdue depuis que je l'ai rencontré. J'ai l'habitude de tout maîtriser dans ma vie et depuis que je suis sur ce bateau j'ai l'impression de ne rien contrôler : ni ce que je vis, ni mes émotions et je n'aime pas du tout cette sensation. C'est trop d'un coup.

- Je comprends. Seulement tu devrais être heureuse de cette nouvelle vie qui t'attend, et ne pas l'appréhender.

Je souris  parce que je trouve cocasse que ce soit Jonathan qui aborde ce genre de sujet. Connaissant ses réactions, il serait dans un état pire que le mien.

- Et c'est toi qui me dit ça ?

- Effectivement. Je n'ai pas toujours été comme maintenant, il y a eu toute une période où j'allais mieux.

- Je parie que c'est parti à vau l'eau à partir de ta rencontre avec ton ex. Je me trompe ?

- Non, tu as raison. Ma relation avec certaines femmes est un peu compliquée depuis mes dix ans.

Je meurs d'envie de lui demander pourquoi, mais je n'ose pas. J'ai la sensation que le sujet est bien trop sensible.

- Tu ne me demandes pas pourquoi ?

Je souris.

- Si tu souhaites en parler, tu le feras de toi même, je ne veux pas t'arracher d'informations.

- Pourtant tu aimerais ?

- Oui !

- Je peux te demander pourquoi ?

- Je pourrai te poser la même question.

- J'ai eu la réponse hier soir.

- Qu'ai-je dit ?

Je suis sur la défensive. Je déteste ne pas me rappeler ce qui s'est passé entre nous. Je tente de forcer ma mémoire et me souviens de quelques brides de conversation. Merde.

- Je pense que tu commences à te souvenir.

- Je ne vois absolument pas de quoi tu veux parler.

- Menteuse.

Oui pour m'en sortir il m'arrive de mentir un peu, mais là, je suis piégée.

- Alors comme ça je t'ai manqué ces deux derniers jours.

Je dois être rouge écarlate. Je n'ose même plus le regarder en face. On frappe à la porte, ce qui me laisse un peu de répit.
Jonathan porte notre plateau jusqu'à la terrasse. Aujourd'hui nous sommes en mer toute la journée et le bateau tangue par une légère houle. J'admire Jonathan qui réussit à avancer sans que rien ne tombe.

- Viens ici et arrête de bouder.

- Je ne boude pas.

Je me lève pour le rejoindre. Il verse le thé dans la tasse, me la pose en face et je m'apprête à la saisir...

- Toi aussi tu m'as manqué ces deux derniers jours.

Je suspends mon geste, surprise par cet aveu...

Nos âmes torturées Où les histoires vivent. Découvrez maintenant