ALMA
À la sortie de l'immeuble, je referme le col de ma blouse en soie pour me protéger de la petite brise glacée qui balaie mon visage et mon cou. Le temps à changé en quelques minutes. Le temps et tout ce à quoi je croyais viennent de s'ébranler.
Je prends mon téléphone et appelle Julian immédiatement. Ça sonne plusieurs fois et je tombe sur sa messagerie. Julian, je t'en prie, décroche ce téléphone ! Pas de réponse.
Je laisse un message vocal :
« Ju, c'est Alma, j'ai besoin de te parler c'est urgent, rappelle-moi vite s'il te plaît dès que tu auras mon message ! »
Je suis dans un tel état que je décide de marcher en direction de son domicile. Son appartement ne se trouve qu'à quelques minutes de là où je suis et je sais que le matin, il travaille chez lui.
Julian bosse pour une boîte de traitement d'avis clients. Son job est de démarcher des personnes par mail ou téléphone afin de récolter des avis concernant leurs achats.
Malgré la hauteur de mes talons, mes jambes n'ont jamais foulé aussi vite les ruelles de Lisbonne. J'ai tellement besoin d'entendre sa version.
Sandro dit-il la vérité ? A-t'il laissé sa carte à Julian ? Et n'a-t-il vraiment pas trouvé le mot que je lui ai laissé ?
Toutes ces réponses risquent de remettre en question beaucoup de choses.
Le film de cette soirée repasse dans ma tête. Je me dis que j'aurais du laisser ce mot collé sur la porte ou sur un endroit visible où il aurait pu avoir une chance de le lire. Qu'est-ce qu'il m'a pris de laisser ça sur un bout du lit ? Il a du se tourner dessus et le mot s'est sûrement perdu dans les draps.
Mes émotions me submergent.
En arrivant devant l'appartement de Julian, je l'aperçois derrière sa fenêtre, adossé à son bureau. Je monte les petites marches de son perron deux par deux et tambourine comme une folle à sa porte. Il met à peine quelques secondes à m'ouvrir et semble surpris de me voir.
— Alma ? Mais que fais-tu là ? Comment s'est passé ton entretien ?
— Tu n'as pas eu mon message ?
Je vois dans son regard que je commence à l'inquiéter.
— Quel message ? Entre vite ! Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Je me faisais du thé, je t'en sers un ?
Je passe le pas de la porte et m'installe dans son salon en l'attendant. J'essaie de rassembler mes esprits afin d'être la plus claire possible dans mon récit.
Dans mes souvenirs, Julian ne m'a pas vue avec Sandro à Porto. La seule bride de cette histoire est ce que je leur ai raconté à notre retour. Je n'ai pas mentionné non plus avoir tenté de lui laisser mon numéro. Je ne me suis jamais trop étendu sur le sujet tant il avait été douloureux pour moi.
Julian revient de la cuisine avec deux tasses fumantes et nous nous installons dans son sofa rose poudré. Je commence mon récit par l'histoire de ce matin chez Verme, la surprise d'être tombé nez à nez avec Sandro que je croyais à l'autre bout du monde, la façon qu'il avait de me regarder, les sensations que j'ai ressenties rien qu'en sa présence, son odeur, sa cicatrice, son corps...
— Ma chérie, tu as eu un coup de foudre pour ce mec, c'est certain ! Mais n'oublie pas que tu ressemblais à un zombie ces deux derniers mois.
— Julian, ce que j'ai ressenti dans ses bras était absolument indescriptible, j'en ai conscience. Je l'avais dans la peau alors que je ne le connaissais que très peu. Je lui ai d'ailleurs laissé un mot cette nuit là dans l'espoir qu'il me recontacte et il ne l'a jamais fait.
— Oublie-le alors chérie. Il ne te mérite pas.
— Au moment où je partais de Verme, il est venu me retrouver. Nous avons discuté. Et il m'a dit qu'il n'avait pas trouvé le mot.
— Et tu le crois ?
— Je ne sais pas, je vais avoir besoin de toi pour ça.
— Je ne comprends pas Alma.
— Sandro m'a dit qu'au moment de quitter l'hôtel, il s'était rendu à la réception. Il aurait demandé à laisser sa carte à mon intention, quelqu'un serait arrivé en entendant mon nom et aurait pris le mot pour me le faire passer.
Je marque un temps d'arrêt en espérant obtenir une quelconque réaction sur le visage de mon meilleur ami, mais Julian ne semble pas comprendre qu'il s'agit de lui.
— Alma, si tu n'as pas eu le mot c'est qu'il te raconte des conneries.
— Julian, il m'a dit que ce serait toi qui aurait récupéré la carte. Est-ce que tu as des souvenirs de cette nuit-là ? Je sais que tu étais parti rejoindre Rafaël et le lendemain tu n'étais pas dans ton assiette.
— Non Alma, je ne crois pas ! Je ne sais même pas à quoi ressemble ton Sandro. Je suis rentré très tôt le matin, j'ai un peu erré au bar en effet et... ah si j'ai croisé le mec avec qui tu avais dansé, celui a qui tu voulais échapper toute la soirée et en effet lui voulait à tout pris savoir si la standardiste t'avait vue ou je ne sais quoi. Je ne voulais pas qu'il vienne t'emmerder et c'est là où je me suis incrusté dans leur discussion. J'ai en effet pris une carte et je crois que je l'ai jetée ensuite.
Les morceaux du puzzle s'assemblent dans ma tête en une fraction de seconde. Je viens de comprendre sans le moindre doute ce qu'il s'est réellement passé. Je me lève en direction du bureau de Julian sans un mot. Son ordinateur déjà allumé, j'ouvre une page internet et tape Verme dans le moteur de recherche. Je cherche une bonne minute sur les différentes pages de leur site avant de tomber sur le trombinoscope de la boîte, je fais défiler les photos jusqu'à tomber sur celle de Sandro et la montre à Julian.
— C'est cet homme là que tu as vu à la réception ?
— Oui, voilà ! Le mec avec qui tu as dansé qui te collait au cul toute la soirée. Tu n'as fait que nous dire qu'un gars ne te lâchait pas, tu m'as même roulé une pelle devant tout le monde ce soir-là pour qu'il te foute la paix ! Tu t'en rappelles quand même ?
Je me lève d'un bond, les larmes aux yeux.
— Putain Ju, tu as confondu Sandro avec Luis !
— Quoi ? Mais qui c'est, Luis ?
— C'est le blond avec qui j'étais assise à table au dîner, avec qui j'ai dansé LA première danse. Sandro c'est lui ! Tu as confondu les deux et tu as jeté sa carte sans m'en parler !
— Putain, je suis désolé Alma. J'ai complètement merdé.
Ses excuses ne peuvent pas changer ce qui s'est passé. Mais comment pourrais-je en vouloir à mon meilleur ami ? Il avait uniquement cherché à me protéger et il avait confondu Luis et Sandro. Désormais les questions que je me posais n'étaient plus sans réponses. Sandro avait bien laissé sa carte pour que je le rappelle. Cela voulait-il dire qu'il avait envie de me revoir et de rester en contact avec moi ? Notre rencontre l'a t-elle marquée autant qu'elle m'a marquée ? Je repense à ces deux mois où j'ai presque fini par l'oublier. Pourtant, j'ai l'impression que toute ma rancoeur s'est envolée en une fraction de seconde. À l'intérieur de ma poitrine, mon coeur bat à vive allure. Je sens que mes jambes ont envie de courir jusqu'à lui.
... À 21 h au bar du Grand Hôtel.
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Couldn't forget you
Romance- ROMANCE NEW ADULT - Après 4 ans de relation avec Marco, un broker de la prestigieuse entreprise Verme, Alma ouvre enfin les yeux sur sa relation toxique et bien décidée à vivre enfin sa vie comme elle l'entend, elle met un terme définitif à leur...