2. Résilience...

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Ava

Mes yeux me brûlent. La lumière est si vive, si crue, qu'elle me transperce. Cela fait des mois que je suis ici, mais mes pupilles refusent toujours de s'habituer à ces maudites LED, d'un blanc glacial, presque surnaturel. Je suis devenue insensible à tout, pourtant cette lumière... c'est la seule chose qui semble encore parvenir à me toucher, me déchirer.

Plus rien ne me blesse, pas même leurs mains ou les siennes. Mon corps s'est figé, bloqué dans le temps, incapable de ressentir quoi que ce soit. Depuis si longtemps. Trop longtemps. Je ne sais même plus quand j'ai arrêté de vivre, vraiment vivre.

Cette pièce... cette prison, lugubre... c'est tout ce qu'il me reste. Quatre murs gris, froids, avec pour seule compagnie Stacy, une gamine de seize ans, que je continuerais de protéger coûte que coûte.

Elle est si jeune, si vulnérable... Mais elle a vécu tellement d'horreur. Elle me rappelle ce qu'il me reste d'humain, ce qu'il reste à sauver. Son sourire fragile me brise le cœur, mais c'est tout ce qui me retient ici. Je suis devenue son bouclier, son rempart contre ce cauchemar sans fin.

Pourtant, moi, je ne suis plus qu'un objet, un corps vidé de toute émotion, de toute dignité. Ils m'ont pris mon âme, m'ont réduite à rien. Je ne suis plus que cette carcasse mécanique qui fait ce qu'on lui dit, qui survit, minute après minute, heure après heure.

J'ai vu tellement de filles passer ici. Elles arrivent, terrifiées, et puis elles disparaissent. Vendues, brisées, offertes aux pires ordures qui traînent dans l'ombre. Ou tuer si elles ne servent à rien. Je les ai regardées partir, une par une. Certaines pleuraient, d'autres criaient, mais à la fin, elles finissaient toutes par se taire, comme moi. Parce qu'on finit toujours par se taire. Parce qu'il n'y a plus rien à dire quand on est réduite à ça.

Je me souviens encore du jour où tout a basculé. Je n'avais aucune idée que je ne rentrerais jamais chez moi. Aucune idée que je serais arrachée à tout ce que je connaissais, à tout ce que j'aimais.

Kyle... il a été le début de ma fin. Il m'a prise comme on prend une chose, un objet, sans aucune considération. J'étais à lui, et il l'a bien fait comprendre. J'étais son jouet, son passe-temps. Au début, j'essayais de me battre, de résister. Mais à quoi bon ? À chaque coup, à chaque humiliation, une partie de moi mourait un peu plus. Les mots ne suffisent pas pour décrire l'horreur, l'indicible. Il me possédait, me brisait encore et encore, et chaque fois, il s'assurait de me rappeler que personne ne viendrait me sauver.

Qu'il ne viendrait pas.

Puis il m'a donnée. J'ai été échangée, vendue à d'autres, à des inconnus encore plus cruels, plus déshumanisants. Je suis passée de main en main, sans jamais savoir où je serais demain, sans jamais savoir ce qui m'attendait. Parfois, je revenais à Kyle, comme un jouet qu'il voulait récupérer. Mais il ne me regardait plus de la même manière. J'étais déjà cassée à ce moment-là.

Chaque jour était une nouvelle agression, un nouveau cauchemar. Des hommes que je ne connaissais pas, que je ne reverrais jamais, prenaient ce qu'ils voulaient sans aucune pitié, sans même se soucier de mes larmes, de mes cris étouffés. Mais à force, même ça, je ne pouvais plus le faire.

Crier.

Pleurer.

Je me suis coupée du monde, de moi-même. Je suis devenue une coquille vide, incapable de ressentir autre chose que la douleur sourde et constante de mon existence.

Parfois, je me demande si la mort ne serait pas une délivrance. Mais même cette pensée s'estompe. Je n'ai même plus la force d'espérer, plus la force de rêver à un monde sans chaînes, sans souffrance.

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Ma Douce Ombre (Tomes 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant