Chapitre XXXIII

448 35 4
                                    

Assise à la cantine en train de manger, Clara entendit une assiette se briser sur le sol. Elle se leva rapidement de sa chaise et se tourna. A plusieurs mètres d'elle se trouvait le jeune-garçon au canapé et un autre garçon âgé d'une vingtaine d'année, se tenant face à face sans se lâcher du regard. Leurs torses étaient sur le point de se toucher et le plus grand d'eux était sur le point de se jeter sur le plus jeune, ses poings crispés et sa mâchoire contractée. Personne ne pouvait intervenir, les dames qui s'occupaient d'eux n'étaient pas encore arrivées. Elle se précipita alors vers leur direction et se plaça entre eux. Une main sur le torse du plus grand pour ne pas qu'il s'avance de trop, elle le regarda.

-Qu'est-ce qu'il se passe ?

Il dégagea aussitôt la main de la jeune-fille qui la reposa systématiquement pour qu'il comprenne qu'il devait rester à sa place.

-Qu'est-ce qu'il y a ? Demanda t-elle de nouveau.

-Il a prit mon dessert, rétorqua t-il, c'est pas le sien c'est le mien.

-Tu ne dois pas t'énerver pour ça, il faut lui expliquer que ce n'est pas le sien. Ce n'est pas en te jetant sur celui qui t'embête que tu régleras les problèmes.

-Je lui ai dit ! S'énerva t-il. Mais il a dit que c'était le sien et il me l'a pris de la table. J'ai voulu le reprendre mais l'assiette est tombée. Il comprend jamais rien de toute façon ! Je vais lui en coller une j'en ai rien à faire.

-Non tu ne vas rien faire du tout. Tu vas t'asseoir à ta place et reprendre ton repas là où tu l'as laissé.

Il ne la quitta pas des yeux un instant, mais remarquant qu'elle n'allait pas baisser les bras d'aussitôt, il souffla et reprit place à sa table. Lorsqu'elle se retourna pour s'expliquer avec l'autre garçon, il se trouvait qu'il avait déjà quitté la cantine sans qu'elle ne le remarque.


Le repas terminé, Clara marchait dans les couloirs, observant ce qui était accroché aux murs lorsqu'elle s'arrêta doucement devant la porte d'une des chambres se trouvant dans ce même couloir. Le jeune garçon au canapé était assis sur son lit, son regard tourné dans le vide. Elle frappa mais il ne quitta pas le vide des yeux. Il semblait ailleurs. Elle frappa de nouveau et cette fois-ci, il tourna son regard vers elle. Sans répondre, son regard se tourna de nouveau dans le vide. Alors la jeune-fille entra lentement dans la chambre et s'arrêta devant la chaise placé devant le bureau.

-Je peux m'asseoir ?

Aucune réponse.

-Je vais m'asseoir sur la chaise, mais je sais très bien que c'est la tienne, ne t'en fais pas.

Elle avança la chaise et prit place dessus silencieusement.

-Tu t'appelles comment ? Reprit-elle.

Il lui semblait qu'il n'allait jamais répondre, mais elle voulait en savoir plus sur lui, alors elle insista.

-Tu sais, je sais ce que ça fait d'être embêté. Je sais ce que ça fait d'être incompris, je suis en permanence dans cette situation. Parfois j'aimerais que quelqu'un me comprenne et me console, me dise que tout ira bien, mais ça ne se passe jamais. Elle s'arrêta un moment pour réfléchir. Enfin, j'ai deux personnes qui me soutiennent, mais je n'ai pas l'impression d'être totalement comprise. Lorsqu'on y pense, personne ne peut nous comprendre totalement, le problème est souvent beaucoup plus compliqué et beaucoup plus profond qu'ils peuvent penser.

Elle n'avait aucune idée du fait si il écoutait ce qu'elle disait ou si il était réellement ailleurs, mais parler était important pour elle. Ça ne devait pas être seulement eux qui devaient se confier et se faire aider, elle aussi devait franchir le pas et en dire un peu plus sur elle.

InterversionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant