Chapitre XXXIV - Partie 1

445 30 7
                                    

La salle d'ordinateurs était immense et plus d'une vingtaine de personnes s'y trouvaient. Un ordinateur se trouvait être placé sur une table, la salle contenant une vingtaine d'ordinateurs, alignés par groupe de quatre. Une foule de plusieurs personnes se trouvant autour d'un même ordinateur, Clara se dirigea alors vers eux et se fraya un passage jusqu'à l'ordinateur lui même. Le jeune-homme du canapé se trouvait assis face à l'ordinateur et une vidéo tournait en boucle depuis un moment déjà. La stagiaire resta immobile, perdue. La vidéo qu'elle avait posté il y a quelques semaines de cela avait atteint 872 916 vues et la vidéo avait été aimée 564 816 fois contre 27 652 personnes qui n'avaient pas aimé. Autant dire que c'était un succès. Elle resta silencieuse un moment, se demandant pourquoi elle ne l'avait pas supprimé avant et comment il avait pu découvrir cette vidéo. Remarquant les regards braqués sur elle, elle fit demi-tour sans proférer la moindre parole avant de quitter la salle et de retourner dans la grande salle. En quelques sorte elle lui en voulait. Cela lui remémorait ce qu'on lui avait fait subir, et elle avait oublié tout cela depuis qu'elle était entrée dans cette maison. Les crachats, les bagarres, les blagues, les blessures, tout lui revenaient en mémoire. Elle sentit son estomac se contracter, une boule au ventre apparaître et elle prit place sur un siège en face de la télé. Pourquoi avait-elle caché tout ce qu'il s'était passé et pourquoi faisait-elle semblant d'être heureuse durant ces derniers jours alors qu'elle ne l'était pas ?

Son visage entre ses mains, la jeune-fille dû lever la tête en sentant une présence près d'elle. Elle tourna son visage sur sa droite et vit le jeune garçon du canapé assis sur le canapé installé juste à côté de celui où Clara était assise. Ne la quittant pas des yeux, elle essuya rapidement les larmes qui coulaient le long de ses joues à l'aide de la paume de sa main droite et ne quitta pas le sol des yeux. Cette situation la gênait et malgré tout, le jeune-homme le ressentit, alors il fixa le sol à son tour.

-Je ne sais pas quoi dire.

A l'entente de ces mots, elle leva sa tête et le regarda à nouveau. Elle n'avait aucune idée du pourquoi il était venu la voir, lui parler. Bien sûr, peut-être s'en voulait-il, mais étant un jeune-homme très fermé, cela l'étonnait.

-Tu n'as pas à dire quoi que ce soit. J'aurais du effacer cette vidéo depuis longtemps.

Il jouait avec ses doigts, la situation semblait encore plus le gêné que ne l'était Clara.

-Comment as-tu trouvé la vidéo ?

Il resta silencieux.

-Je ne t'en veux pas. Je...

-Pourquoi tu pleurais ?

Elle s'arrêta. C'était tellement humiliant selon elle que quelqu'un puisse la voir pleurer, elle détestait cela, et encore plus lorsque c'était un enfant qui possédait des problèmes psychiques et qui n'avait pas besoin qu'elle lui rajoute ses problèmes à elle.

-Parce que je m'en veux, reprit-elle. Je m'en veux d'avoir été stupide. Cette vidéo n'aurait jamais du être sur Internet. Avoir mis cette vidéo sur Internet a été immature et non réfléchi.

Il arrêta soudainement de fixer le sol et haussa son regard vers la fenêtre placée en face d'eux, près de la télévision accrochée au mur.

-C'était pas immature, avoua t-il en se levant. C'est la plus belle musique que j'ai entendu, finit-il par dire avant de passer la première porte qu'il voyait.

La jeune-fille resta immobile à ces mots. Avait-il réellement aimé sa musique, et, était-il sincère ? Elle se sentait déboussolée.


Marchant près de Madame Rosenfield, Clara entra dans la salle de jeux qui se trouvait être plus remplie que d'habitude. La dame aux cheveux grisonnants était assise à la même table qu'à son habitude et avait étalé des cartes sur la table en bois. Trois personnes étaient assises avec elle, deux hommes et une jeune-fille.

-Voilà pourquoi je voulais vous amener ici, commença Madame Rosenfield en montrant la table de sa main. Cette dame que vous voyez à la table ne parle jamais à personne, elle reste pour la plupart du temps seule à vouloir monter un chapiteau de cartes. Et lorsque je suis venue la voir ce matin, elle m'a proposé de jouer avec elle à la bataille. J'ai tout d'abord été surprise et j'ai accepté. Et non seulement elle s'est adressée à moi sans que je n'ai à le faire en première, mais elle m'a aussi expliqué les règles de jeu de la bataille. Elle se tourna vers Clara. C'est vous n'est-ce pas ?

-Je lui ai juste appris à jouer à la bataille madame.

-C'est formidable, reprit la dame en observant de nouveau la dame assise près de la table, expliquant de nouveau la règle de jeu de la bataille à ceux qui se trouvaient assis autour de la table en bois. C'est formidable, répéta t-elle. Elle se tourna de nouveau vers Clara. Oliver est-il venu vous voir ?

Clara déduisit que le jeune-homme au canapé se nommait Oliver, elle hocha alors la tête que oui.

-Ce fut la seconde chose que je fus surprise de voir. Lorsque j'étais à mon bureau plus tôt ce matin, il est entré sans frapper et s'est assis sur la chaise en face du bureau. Il semblait anxieux, je lui ai demandé ce qu'il se passait, et il ne répétait que votre prénom. Lorsque j'ai insisté , il m'a dit qu'il avait fait quelque chose qu'il ne devait pas. Je n'ai pas su de quoi il parlait véritablement mais je lui ai proposé d'aller s'excuser auprès de vous. Il m'a regardé un instant et est parti aussi vite qu'il est arrivé.

-Ce n'était rien de grave, tout s'est arrangé.

La dame fixa un moment Clara.

-Suivez-moi.

N'ayant le temps de comprendre le pourquoi du comment, Madame Rosenfield avait déjà quitté la pièce, Clara pressa alors le pas et passa par la même porte que la dame venait de passer quelques secondes auparavant.

C'était la première fois que Clara était à l'arrière de la maison. Un immense jardin s'y trouvait, un chemin l'entourant permettait de se promener et de se dégourdir les jambes sans marcher sur l'herbe traitée et des bancs se trouvaient à quelques mètres les uns des autres auprès du chemin, si quelqu'un venait à vouloir se reposer après avoir fait un effort subitement. Elle avait suivi la dame qui l'avait accepté pour la semaine de stage et elles se trouvaient maintenant derrière un banc, à quelque mètre de celui-ci, où Oliver se trouvait être assis. Madame Rosenfield observa le jeune-homme immobile, le dos vouté, les mains posées sur ses genoux.

-Il est ici depuis deux heures, reprit-elle en chuchotant pour ne pas qu'Oliver ne les entende et se retourne. Cela faisait un moment qu'il n'était pas venu ici. Elle se tourna vers Clara. La dernière fois ce fut quand son père est mort. Il venait ici quand il souhaitait se retrouver seul et il pensait à son père sans cesse. Il s'en voulait terriblement pour la mort de son père, et je pense qu'aujourd'hui il s'en veut pour ce qu'il vous a fait.

Clara regardait Oliver. Il ne bougeait pas d'un pouce et le vent s'abattait dans son cou ce qui le faisait frissonner, sans pour autant le faire réagir pour qu'il rentre à l'intérieur de la maison. La température était fraiche, le vent glacial et sans qu'elle ne s'en rende compte, Clara se trouvait désormais seule derrière ce banc, derrière ce jeune-homme si énigmatique et si seul d'apparence.


InterversionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant