Time to return

Chapitre 14

Point de vue Marina

Du blanc, encore du blanc, toujours du blanc.

« Mademoiselle ? »

L'horrible goût de la défaite.

« Veuillez nous suivre s'il vous plaît »

La sensation d'avoir échoué.

« Les mains en l'air. Tournez-vous. Maintenant les mains sur la voiture »

Retour à la case départ. Marina se retourna. Elle avait essayé. Six heures de liberté. Parties en fumée. Blouse blanche entra dans la pièce, posa un plateau sur la table de nuit, disparut. La jeune fille n'avait même pas la force de se lever. La quantité de médicaments était trop importante pour son organisme. Elle se contenta de regarder le plateau hors d'atteinte. C'était ça l'isolement. Six jours qu'elle était dans cet état végétatif. Les plateaux repas se succédaient. Elle ne pouvait en atteindre aucun. Les médicaments lui étaient administrés de force. Elle ne pouvait que regarder le ciel lorsqu'on lui ouvrait les volets – rarement. Le reste du temps elle était dans le noir. Ce noir dont elle avait trop peur. Alors comme une petite fille elle se roulait en boule sous sa couette, étouffait à moitié, ne voulait pas sortir de son cocon de peur de voir les ombres.

Des policiers lui étaient tombés dessus alors qu'elle allait rentrer de nouveau dans la gare. Ils étaient avertis qu'elle s'était enfuie. Elle s'était fait avoir comme une débutante. Pour toute réponse la jeune femme avait retrouvé son vœu de silence. La porte s'ouvrit de nouveau. Le cerveau trop embrumé elle se laissa trainer dans la salle de bain. On lui retira ses vêtements, alluma l'eau. On la laissa là, au sol, se débattre pour respirer. Marina n'avait plus la force de bouger. Les drogues de la veille étaient encore plus fortes que les précédentes et depuis elle ne pouvait plus réfléchir.

On la re-traina sur son matelas. On la laissa dans ses couvertures. Elle pensait à Dolores parfois. Avait-elle réussi à passer en Ecosse ? A Maura et Chris. Etaient-ils vraiment allés au pays de Galles pour elle ? Le plateau s'en allait.

Marina pensa à la prochaine fois. Parce qu'il y aura une prochaine fois. Elle y arrivera. Elle prendra le bateau pour le Nouveau Monde. Le Mexique était un beau pays. Elle deviendra Candy Amberson, se teindra les cheveux en noirs. Elle rêva de sa future terre d'accueil. Blouse blanche s'avança, la retourna. Une aiguille s'enfonça dans son bras. Elle n'avait plus la force de gémir. Des billes roulèrent dans sa gorge avec de l'eau qui l'étouffa. Elle avala. Elle n'avait pas le choix.

La lumière est crue. Les herbes bougent au ralenti. Elle tourne le visage observe les collines autour d'elle. Les arbres émeraude qui se courbent sous les caresses du vent. Une robe en voile fin s'emmêle autour de ses jambes. Elle avance, poussée par la curiosité. L'odeur de la mer, du sel et des poissons se mêlent celle de la roche et de l'humidité de la terre. Elle approche toujours plus.

Soudain sous ses yeux se dessinent un vertige splendide. Les roches s'affaissent dans la mer, les flots brisent leur écume. Des cris de mouettes, le chant des sirènes. De l'autre côté elle voit une terre. Lointaine. Un eldorado. De l'eau émerge une terre. Elle se modifie, s'assouplit pour former un pont rudimentaire. Un pont de terre.

Son pied s'enfonce dans la construction. Elle marche sur ce pont. Des deux côtés la terre tremble. Elle regarde, attentive, le sol s'ouvrir de part et d'autre. Une chaussée de pierre remonte de la terre, surplombe tout le reste. Le pont s'enfonce lentement dans la mer. Elle reste figée au milieu du pont. Elle observe sa chute. Les mouettes rient au-dessus. Les flots grondent juste en dessous.