Chapitre 29

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J'ouvre la porte de ma maison et y entre sans faire de bruit. J'ai pris cette fâcheuse tendance depuis que je me suis disputé avec ma mère, il a deux jours. J'évite de me faire remarquer pour ne par la croiser. Cette situation est plus que contradictoire puisque je meurs d'envie de lui poser des questions à propos de monsieur Salsfitz. Mais son comportement envers moi me pousse à me retrancher chaque fois que l'envie me pousse d'aller la voir et de lui pardonner. J'ai trop de fierté pour faire le premier pas. Oui, voilà ce qu'il me dérange aussi. Ma mère n'a rien essayé depuis qu'elle m'a appelé dans ma voiture. Elle n'a pas daigné une seule fois à m'adresser la parole ou à me couper la route dans les escaliers. C'est la première fois que c'est aussi tendue entre nous deux. Je suppose qu'elle m'évite elle aussi afin d'éviter d'aborder le sujet du « professeur mystérieux ».

Je monte dans ma chambre et pose mon sac sur mon bureau. Cette journée a été banale, si l'on ne compte pas la matinée avec la « semi-agression » de Caroline à propos de Tyler et du baiser. D'ailleurs, je me suis bien faite avoir. Je me demande bien qui a pu être au courant et qui a pu le lui dire. Je ne vois que Thomas, même si je suis persuadée qu'il n'en est pas la cause. Je ne comprendrais pas pourquoi il ferait cela et à quoi cela lui servirait. Et puis comme il l'a dit, se sont des histoires de « gamine » et je sais qu'il a horreur de ça et d'en être mêlé. C'est peut-être juste Caroline qui prêche le faux pour avoir le vrai... Ce qui m'étonnerait aussi puisqu'elle est au courant d'où et quand cela s'est passé. Il faut que je mène ma petite enquête.

À part cela, ma journée s'est bien passée. Je n'ai pas pensé à monsieur Salsfitz et ni a ma mère, qui sont pourtant les principaux sujets de problème dans ma tête. J'ai réussi à me distraire en pensant à Thomas, que je n'ai pas revu de la journée, et à l'été dernier. C'est comme un film dans ma tête, ça passe encore et encore en boucle dans ma mémoire sans que je ne puisse l'arrêter. C'était tellement bien, il s'est passé tellement de choses... D'un côté, cela m'arrange d'avoir une « bonne vision ». Ça me change de mes problèmes actuels. D'un autre côté, cela me fait penser à quand tout allait pour le mieux chez moi, que mes parents n'étaient pas divorcés, que tout allait bien avec Thomas. J'ai comme des remords qui me foutent le moral à zéro. Le voilà, le seul inconvénient des souvenirs. Les bons moments ne nous font que regretter ceux de l'instant présent, qui ne sont pas forcément agréables pour le moment.

À part cela, j'ai songé à Tyler. Je me suis remémorée sa petite bouille d'ange sur cette photo près du rocher en Bretagne, de son sourire charmeur, de ses muscles saillants lorsque qu'il m'a attiré vers lui pour m'embrasser... Et bien évidemment, je me souviens de ses fines lèvres s'entrechoquant aux miennes... C'est mal de penser à ça alors que j'ai sa « vrai » et « officielle » petite amie sur le dos. À ce propos, c'était juste un baiser. Ça se trouve, ce n'était rien pour lui. Ce qui de un, serait très salop pour moi, de deux, très salop pour sa copine et de trois, ferait de lui un salop. En y pensant, Caroline a raison. Tyler sort avec elle et moi, enfin lui, m'embrasse. Je soupire. Ma tête va exploser à force de penser à lui. D'ailleurs, je me demande où il était. Je ne l'ai pas vu de la journée. Il était peut-être malade, je n'en sais rien. Cela rend la situation encore plus louche...

Je décide de prendre mon ordinateur et de me poser sur mon lit deux places. Je m'étale comme une grosse vache, ouvre le clapé de mon ordinateur et commence à faire des recherches. Je débute par ce qui me trône dans la tête depuis un bon bout de temps et tape au clavier « Monsieur Salsfitz ». Bien évidemment, je tombe sur des milliers de pages parlant de milliers de monsieur Salsfitz ou bien même d'une association. C'est peine perdue si je pense le trouver de cette façon. Je tape alors plus précisément « Monsieur Salsfitz, Miami », mais je ne trouve toujours rien. Une idée me vient alors en tête et je me demande pourquoi je n'y ai pas pensé plus tôt. J'écris au clavier « Liste des professeurs, lycée Banway, Miami ». À ma plus grande stupéfaction, je trouve cette fameuse liste de professeurs de mon lycée, donnant le nom, le prénom et l'âge. Je m'empresse de cliquer sur le lien. En étant sur le site qui ce trouve être celui de mon lycée, je trouve une longue énumération de nom. J'en reconnais quelques uns, dont ceux de mon professeur de sport et de physique-chimie. Ne voyant pas celui de la base de mes recherches, je m'apprête à fermer la fenêtre lorsque mes yeux se figent sur le bas de la page. Je me sens idiote de ne pas avoir vu l'inscription « page 2 » et je souffle en signe de fatigue.

Une fois sur cette page deux, j'observe lentement et avec précision cette liste de nom. Je ne voudrais pas le rater, surtout pas. Il y a tellement de lettres et de noms que ça me donne la migraine... Je perds patience et par la même occasion, espoir. Je ne trouve rien. J'enfouis ma tête dans mes bras en laissant un instant mes yeux sur cette maudite page. Je ne trouverais jamais et ma mère ne me dira jamais rien. Ça se voit dans ses yeux bleus.

Soudainement, j'ai comme un déclique. Un bon, un vrai. Celui qui vous donne le coup de pied au cul, le gros. Celui qui vous fait assez mal et celui qui vous fait agir. En baissant la tête, mes yeux se sont posés une fraction de seconde sur un nom. Oui, je n'ai pas réagi en pensant que ce n'était qu'un mirage. Je relève ma tête doucement, par peur que ce ne soit faux. Mes yeux se figent et restent grand ouvert.

« Putain de merde, lâchai-je dans un souffle. »

« M. Salsfitz Chris, 35 ans ».

Ma mère a exactement le même âge... Si ce n'est pas une coïncidence ça.

Memories [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant