Dans un lourd silence, elle franchit le seuil de la chambre et observa son résident. Comparé à Éric, peu de machines l'entouraient. Il paraissait seulement dormir, même si son teint blafard n'inspirait pas les meilleurs pronostics. Des cheveux blonds et coupés à ras, si clairs qu'ils paraissaient presque blancs, encadraient son visage, accentuant sa pâleur. S'il n'y avait eu ce « bip » régulier à chaque pulsation de son cœur, elle aurait pu le croire mort.
— Il est dans le coma aussi, expliqua Patricia en entrant. En ce qui le concerne, la situation est encore plus complexe : il ne souffre d'aucun traumatisme.
— Il n'est pas tombé dans le coma sans raison, quand même... s'exclama Chloé.
Patricia haussa les épaules.
— Pourtant, il n'a aucune blessure, ni externe, ni interne. Tous les examens qu'il a passés le confirment.
Chloé approcha du lit, fouillant dans sa mémoire à la recherche de souvenirs enfouis, mais toutes les portes refusaient obstinément de s'ouvrir.
— Son visage me dit quelque chose... vaguement. Plus vaguement qu'Éric, mais...
Avec Éric, la sensation avait été immédiate. Chloé était liée à lui, même si elle ignorait la nature de ce lien. Devant Jérôme, rien de tout cela. En le regardant, elle éprouvait tout au plus une impression de déjà-vu. Rien de bien particulier, en dehors de cette chair de poule persistante quand elle l'approchait. Ses yeux cernés et sa maigre corpulence ne le rendaient vraiment pas beau à voir et son état l'inquiétait.
— Rien ne vous revient ?
Désemparée, Chloé secoua la tête.
— Rien. Rien du tout.
— Au moins, nous aurons essayé. Je retourne voir Éric.
— Avant... est-ce que vous pouvez me dire où j'habite ?
La journaliste la dévisagea, puis soupira.
— Je vais vous amener. Manquerait plus que vous disparaissiez à nouveau dans la nature. Les flics vont vouloir vous poser des questions, vous savez ?
L'estomac de Chloé gronda, lui rappelant sans détour qu'elle était affamée. Patricia se retourna vers elle :
— On prendra à manger sur le chemin. Je dois juste récupérer mon blouson dans la chambre d'Éric...
— Vous êtes sa petite amie ?
Patricia pouffa d'un rire sans joie et prit la direction du couloir.
— Je ne vois pas ce qui peut vous faire dire ça.
Il parut évident à Chloé que la rouquine espérait plus qu'une simple relation de travail... même si elle refusait de l'avouer.
Comme Patricia avançait, Chloé se mit en marche, perdue dans l'immense hôpital. Curieuse, elle ne manquait pas un détail de ce qui l'entourait. Peut-être trouverait-elle dans cet endroit des indices de sa vie passée ?
Les portes se succédaient, parfois béantes, parfois fermées, et des infirmières sillonnaient régulièrement les lieux. Chloé n'aperçut aucun élément qui fit naître d'étincelle. Puis elle stoppa net. Une fillette.
Debout dans l'encadrement d'une porte, elle l'attendait, l'observait de ses yeux bleu clair comme un ciel d'été au petit matin. Ses longues boucles blondes rebondissaient souplement. Avec sa petite robe rose, elle avait des allures de poupée. Pourtant, ce n'est pas cela qui l'interpellait. L'enfant avait quelque chose de... différent. Et la fixité de son regard ressemblait à une invitation. Poussée dans sa direction, Chloé délaissa Patricia qui avançait sans se soucier d'être suivie.
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Le Démon (L'Hybride, livre 1)
Fantasy~ HISTOIRE TERMINÉE ~ Dans une France alternative, aux alentours de l'an 2000. Le P'tit Clarme, un vieux bar aux relents d'Amérique des années 50. Chloé y chante presque tous les soirs, pour un public désenchanté qui ne remarque presque plus sa prés...