H U I T

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Nous nous sommes difficilement frayé un chemin parmi la foule d'étudiants en médecine qui stagnait devant l'établissement et venant tout juste de déjeuner au restaurant universitaire.

- Nous y sommes informais-je Louis en sortant le trousseau de clefs qui me permettait de rentrer dans ma minuscule chambre.

Il ne réagit pas, trop occupé à presser les touches de son téléphone portable.

- Bon je vais te laisser Louis, je suis un peu fatiguée insistais-je pour que l'on se sépare.

Louis lève soudainement la tête avant de pincer ses lèvres :

- Je ne peux pas rentrer ?

- Je pense que je vais dormir, donc ce ne sera pas très utile pour toi de rester ! souris-je en lui pointant du pouce mon lit impeccablement bordé.

- Bon. Je vais te laisser alors... la déception est perceptible dans sa voix éraillée, alors qu'il s'approche un peu plus de moi, au revoir Éli.

Louis passe sa main dans ma nuque pour répandre mes boucles naturelles sur mes épaules.

- Salut Louis réussis-je a dire, déconcentrée par son comportement.

Mon camarade tourne les talons pour retourner dans l'ascenseur grinçant au fond du couloir.

Son attitude froide, même glaciale me rend curieuse : il était gentil et serviable ce matin et se contredit énormément en ce début d'après midi.

- Louis ! helais-je.

Louis qui vient tout juste d'appuyer sur le bouton pour appeler l'ascenseur se tourne vers moi, surpris que je l'interpelle.

Je me met à courir et ainsi être sûre qu'il n'aura pas le temps de monter dans l'embarcation montante-descendante avant que je l'atteigne.

Une fois devant lui, ses iris bleues légèrement grisâtre me transperce, et toute son attention me fait frissonner.

- Oui ?

Il croise ses bras sur sa poitrine et sa langue lèche délicieusement ses lèvres rouges.

Je diminue encore la courte distance qui nous séparait avant d'agripper son avant bras pour me hisser sur mes orteils et être à la même hauteur que lui ; je veux qu'on soit à égalité.

- Merci beaucoup pour... ce, ce midi.

Je sens mon visage pâlir suite à mes bégayements.

Je voulais qu'on soit à égalité, mais je suis si vulnérable par rapport à lui.

Je me racle la gorge et baisse la tête pour fixer, la vision trouble, mes doigts qui se tortillaient, avant de reprendre, encore plus faiblement :

- Demain on pourrait se voir peut-être ? Enfin, tu pourrais passer comme aujourd'hui et on avancera pour notre rédaction et après on pourrait regarder un film... J'en ai ramené plein de Liverpool.

Un sentiment de fierté m'envahit : bien que les sons que je venais d'émettre étaient difficilement audibles, j'ai réussi à lui faire cette proposition d'une traite, sans une once d'hésitation.

- Tu veux quoi ? Parle plus fort Éli sérieusement rie Louis.

Évidemment, quand je pense avoir parfaitement articuler ma déclaration, il faut que Louis n'ai rien entendu.

- Tu peux passer demain Louis pour qu'on avance sur la dissertation et puis si on a le temps, regarder un film, dis-je en soufflant mais surtout en oubliant la moitié des mots, ce qui rend ma demande nettement moins chaleureuse.

- Comment ? répète-t-il, en encerclant son oreille de ses longs doigts pour imiter un mal-entendant.

Je frappe fort la poitrine de Louis pour qu'il arrête de me prendre pour une idiote. A tous les coups, il adore juste l'idée que je l'invite chez moi et il veut que je continue de le répéter pour qu'il apprécie longtemps cette proposition surprenante.

- À demain !

Je crie cette phrase derrière le voile que me fait ma chevelure qui entoure ma tête baissée.

Je me tourne pour revenir dans ma chambre quand Louis noue ses mains aux miennes, m'arrachant un petit cri de surprise.

- J'ai tout entendu Élisabeth, j'aime juste te voir rougir.

Il avance son visage près du mien puis presse doucement ses lèvres sur ma joue intensément rouge.

- À demain princesse.

Louis affiche un sourire subtil tandis que le mien est timide et presque crispé.

Il monte dans l'ascenseur et je rentre dans me cellule qui, dûe à la l'absence d'Alice, paraissait trop vide.

Je m' assois sur l' extrémité de mon lit, repliant mes jambes sur mon ventre. D'une main tramblotante, je caresse la joue qu'avait tendrement embrassé Louis et d'un coup, mes larmes salées retrouvent mes doigts qui frollaient ma chair.

Mon esprit s'abandonne à un nouveau sentiment : non pas de l'amour mais de l'intrigue.

Je me sens tellement bien avec lui.

Mes yeux pétillent en retraçant toutes les minimes attentions qu'il m'avait porté. Je repense à son corps musclé, à ses mains dans les miennes, à sa cuisse contre mon genoux, à ses yeux plantés dans les miens.

Tu t'attaches trop vite Éli.

The Rogue.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant