- Abracadabra, abracadabra, abracadabra ! Et hop disparaît, réapparaît, disparaît ! Je suis magicien, je suis illusionniste ! Je suis... Je suis étoile de mer. Abracadabra !
Isak s'est muni d'une baguette et la fait tournoyer devant lui, un peu comme une épée. Azel et moi le suivons d'un bon pas en riant.
Une fois de plus, je suis sortie dans la ville. Papa aime me voir heureuse alors il me laisse cette liberté. Et puis il me fait confiance. Je l'aime, papa.
- Abracadabra...
- Abracabra qu'Isak se transforme en mouche ! M'écrié-je en lui arrachant la baguette des mains.
- Mais non !
Il s'arrête tout penaud et prend une petite moue triste.
- Perle, rend-moi ma baguette.
- Ah ah ! J'attends le mot magique.
- Abracadabra ?
- Mais non nigaud, rié-je.
Azel lui souffle à l'oreille quelques mots et son visage s'éclaire :
- S'il te plait, ô ma future reine !
Alors je lui rends l'objet d'un geste cérémonieux.
- Madame la princesse a-t-elle bien tout ce qu'il lui faut, ironise Azel ?
J'hoche la tête en grimaçant et rétorque d'une voix pincée :
- Non, je ne suis point à mon aise ici. Pourriez-vous m'offrir un coktail, me chercher un transat, me masser les pieds et les parfumer ? Ce ne serait que la moindre des choses pour votre reine.
Nous éclatons tous les trois de rire. C'est ça un ami et c'est bon, c'est bon, c'est bon !
Je reprends mon air strict pour questionner :
- Jusqu'où iriez-vous pour votre reine, doux damoiseaux ?
C'est Isak qui répond le premier tout en sautillant sur place :
- Ordonnez et j'obéirai ! N'importe quoi !
- N'importe quoi ?
- Oui !
- Alors va te placer au milieu de la rue marchande et crie : "je suis une mouche".
- Facile...
- Trois fois, ajoute Azel dans un petit sourire moqueur.
À ces mots, Isak se décompose mais, ne tenant pas à perdre la face, grimpe sur une caisse et répète trois fois qu'il est une mouche. Les marchands, les clients, les passants se retournent tous vers lui en le dévisageant. Non messieurs-dames, ce n'est pas un fou. Juste le garçon qui possède le plus de culot dans ce monde.
Puis je me tourne brusquement vers Azel avec curiosité et ironie :
- Et toi ?
Isak est décidé à prendre sa revanche. Alors c'est lui qui prend la parole :
- Toi, tu dois aller chercher à cloche-pied une fleur chez Violette. Que tu offriras à Perle, il va sans dire.
Je le vois blêmir mais il doit s'exécuter. Je lui donne quelques pièces parce qu'il n'a pas vraiment d'argent et il part en direction de la fleuriste. Eh bien c'est l'homme le plus maladroit du monde ! Je savais qu'Isak était gauche mais Azel n'a strictement aucun équilibre. Il glisse, se rattrape, tombe, bute, agite désespérement les bras... Nous en rions jusqu'aux larmes.
Lorsqu'il parvient enfin chez Violette, nous ne pouvons pas nous empêcher d'applaudir. Ce trajet relevait réellement de l'exploit !
La fleuriste nous regarde en souriant gentiment.
- Bonjour Violette.
- Bonjour les enfants, bonjour princesse. Vous vous amusez bien ?
- Je veux une fleur pour l'offrir à ma future reine, demande Azel d'un ton sérieux.
Violette essuie furtivement ses yeux et lui tend sa plus belle algue en déclarant :
- Vous êtes vraiment adorables.
- Mademoiselle, demandé-je timidement, auriez-vous... Pleuré ?
Elle ne me répond pas et se contente d'envelopper la fleur dans un joli papier avec un ruban.
- Vous êtiez très belle hier soir, renchérit Isak. C'était impressionnant.
- N'avez-vous donc pas entendu la rumeur ? Murmure-t-elle.
Devant nos mines étonnées, je la vois s'affaisser.
- Non, à l'évidence, ajoute-t-elle d'une petite voix.
Je remarque alors les regards étranges qui se portent dans sa direction.
- Avec son baiser hier, La Berlue m'a humiliée.
Envolés les rires et les enfantillages. J'ai envie de l'aider et de montrer que je peux être une princesse adulte. Je mets ses mains dans les miennes et plante mon regard dans le sien d'un air grave :
- Tu peux dire que je suis une enfant et que je ne peux pas comprendre. Mais un jour je serai reine. J'ai conscience des responsabilités et je veux pouvoir aimer chacun de ceux qui seront mes sujets. Dis-moi tout. Je te promets que je trouverai un moyen de te rendre le sourire.
- Perle...
Isak et Azel se sont reculés et assis sur les marches d'une maison.
- Perle, répète Violette.
De petites larmes se mettent à couler. Elle veut les essuyer mais je l'en empêche :
- Mais pleure, Violette ! Crie, débats-toi !
- Perle, j'apprécie ta gentillesse mais...
- Je ne suis qu'une enfant. Oui, bon on passe à l'épisode suivant ?
- La Berlue m'a demandé son aide pour le spectacle en me faisant croire qu'il m'aimait. Il m'a embrassée sur scène. Je te promets que j'étais aux anges. Mais Perle, il m'a menti. Il a joué avec mes sentiments.
C'est ce que je disais ! L'illusioniste n'est qu'illusion pour ses amis. Je vais aller lui apprendre la vie à celui-là ! Cela ne va pas se passer aussi simplement.
- Tu vois bien que tu ne peux rien faire, Perle. Un cœur brisé, cela ne se répare pas si facilement.
- Peut-être que je peux remplacer un amour déçu par mon amitié ? Tu sais Violette, il n'y a pas que la passion. L'amitié, tu ne trouves pas que cela sonne bien aussi ?
Elle me sourit et murmure :
- Ce que tu peux être mignonne, Perle !
Évidemment, on en revient toujours à mon jeune âge. Mais j'ai gagné :
- Tu vois ? Je t'ai fait sourire !
Et maintenant, elle rit. Je suis très forte. Enfin, comme la mission est remplie, je peux m'en aller. Je la salue et fais demi-tour pour rejoindre mes amis. Nous nous enfonçons de nouveau dans les petites ruelles de la ville. Mais cette fois-ci, nous sommes moins rieurs : la nouvelle que nous venons d'apprendre nous a rendus sérieux.
Et soudain, dans une ruelle transversale, nous voyons apparaître La Berlue. Il ne nous a pas vus. Un coup d'œil décidé suffit à nous mettre d'accord : nous le prenons en filature.
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Mon château de sable
FantasíaQuand le conte et l'amour s'invitent dans la Fantasy... Redevenez enfant. Unique en amour Aimer Mon château d'un jour Donner Le lien qui nous lie Aimer Devient si joli Donner Et la vie est telle Aimer Et la vie est belle Perle voudrait changer le mo...