- Bonjour.
- Bonjour. Tu es belle, princesse.
- Toi aussi.
Il rit :
- Non, moi je ne suis pas belle. Je suis beau.
Je le vois grimacer tout à coup et, inquiète, j'attrape sa main.
- Est-ce que ça va ?
- Oui... Perle, dis-moi... Que va-t-il m'arriver ?
Oh ! Si seulement je savais ce qu'il a réellement fait pendant tout le temps qu'a duré sa disparition !
- Cela dépendra de toi, Azel, murmuré-je. Mais je ferais tout pour te défendre.
- Tu es belle, princesse. Tu as grandis.
- Et si j'arrêtais de tenir la chandelle, se moque Isak que nous avions oublié.
- Eh bien, très cher ! S'exclame Azel en insistant sur ces mots avec un ton pincé et comique. Qu'as-tu à me dire ?
- C'est qu'on t'a cherché partout, tu sais. Tu nous a fait une de ces frayeurs !
À ces mots, et sans trop de raison, Azel éclate en sanglot. Je ne sais pas vraiment comment réagir face à cette surprenante réaction. Isak et moi nous regardons, embarrassés.
- Azel, Azel, calme-toi...
- Qu'est-ce qui va m'arriver...? Sanglote-t-il
- Calme-toi, Azel. Tu n'as rien à te reprocher, rien...
Il me fixe tout à coup dans les yeux, durement, et grince :
- Qu'est-ce que tu en sais ?
Je reste sans voix... Que m'a-t-il caché ?
- Azel ? Tu ne veux pas nous raconter ?
Il blêmit et je vois ses doigts se crisper sur le drap de son lit. Il hoche frénétiquement la tête avant de se raviser et d'acquiescer brusquement. Mal à l'aise, même terrorisé.
- Azel, tu peux tout nous raconter. Peut-être qu'il sera ensuite plus facile de tout révéler devant le tribunal...
Il est angoissé. J'ai pitié de lui :
- Tu sais, nous savons déjà certaines choses sur toi : tes parents sont morts alors que tu étais très jeune. À la rue, si petit, abandonné, tu as commencé par mendier mais tu as vite tourné mal en entrant dans une bande de voleur qui t'offrait le gite et le couvert. La Berlue te connaît, mais la suite ?
- Vous savez déjà tout cela ? Murmure-t-il doucement.
- Oui, Azel.
J'essaie d'être bienveillante, de le comprendre. Il m'est plus facile ensuite d'aimer.
- Tout ce que tu as dit est vrai, Perle. Je ne comprenais pas encore les limites entre le bien et le mal. Trop jeune. Ce que je comprenais, dans mon extrême misère, c'est que j'avais faim et froid. Alors je me suis facilement laissé emporter dans ce groupe de malfrats. C'était moi qui faisait la petite main habile qui dérobait. Les services de ton père ont fini par m'identifier. Te souviens-tu de notre rencontre ? Tu es arrivée au moment où on mettait la main sur moi. Et (ne grossis pas trop des chevilles, c'est mauvais pour la santé), tu m'as ébloui.
- Moi ?
- Ma petite Perle... Ma princesse de toujours... Oui, tu m'as ébloui, quand tu as cherché à m'aider, à me faire évader, à semer le Bien -que je ne connaissais pas- tout autour de toi. Mais juste avant la bataille, juste après ce fameux spectacle et notre course-poursuite dans les rues du château, on m'a attrapé. La Berlue a menacé de me livrer aux gardes si je ne lui révélais pas l'endroit où se trouvait la clé.
Je l'interrompts :
- Nous aurions pu éviter le pire ! J'ai obtenu peu après ta remise en grâce par papa.
- Ah ? Je ne pouvais pas le savoir... Mais comme La Berlue insistait et que j'avais une vague idée de l'endroit où se trouvait la clé, je le lui ai révélé. Las, au cœur de la bataille, quand nous nous y sommes rendus, la pièce était vide.
- Je portais la clé à mon cou.
- Et c'est ce que nous a indiqué la moule. Je t'ai fait tombé dans le piège en t'attirant à l'écart. Tu vois que j'ai grandement collaboré avec La Berlue. Et puis la clé fut en notre possession. Moi, j'ai cru ma tâche terminée : j'ai arraché la clé du château de la serrure et ai voulu m'enfuir en passant par les toits. J'ai rabattu le capuchon de ma cape sur ma tête et j'ai couru le plus loin possible. La Berlue m'a poursuivi. Il voulait la clé. Toi, tu t'es retrouvé au milieu de nous deux, sur les toits. Mais... Il m'a rattrapé. Nous avons glissé dans l'eau. Le roi de la mer est venu nous chercher.
- Pourquoi avez-vous été rejetés par la mer ?
- Lors de la défaite, tous ont cru que nous avions fait quelques manigances pour vous donner la victoire. Le débat fut long et houleux mais l'empereur prit le parti, prudent, de nous exiler. Moi, j'étais partagé entre la joie et la terreur à l'idée de vous retrouver après ce que j'avais fait.
Il marque un silence pensif avant d'ajouter :
- Ma princesse, tu sais, je m'en veux, je me repents. Est-ce que tu me pardonnes ?
Mon cœur bat un peu plus vite. Ce sont des mots graves que je vais dire mais je les pense sincèrement :
- Oui Azel. Je te pardonne.
Isak acquiesce pour montrer qu'il partage également ces mots.
- Et La Berlue, ajoute Azel avec hésitation, est-ce que tu lui pardonnes ?
Nous tournons tous les trois notre regard vers l'étoile de mer. Celle-ci s'agite doucement, comme si elle sortait de son état léthargique. Alors, je fais quelques pas vers lui et lui prends la main.
La Berlue frémit, ouvre les yeux.
- Bonjour, murmuré-je.
- Perle !
Je ne sais pas quoi ajouter de plus. J'attends un geste de sa part mais rien. Alors je me jette à l'eau :
- Monsieur, je ne sais pas si vous éprouvez du remord, je ne sais même pas si vous êtes conscient ou non d'avoir fait du mal mais peut-être que ces mots vous feront prendre conscience que le bien existe et que l'amour peut guérir même les âmes les plus farouches. Vous m'avez poursuivie, vous avez blessé des amis, physiquement et moralement, vous avez détruit mon château de sable, mais j'ai promis, il y a fort longtemps, que je tâcherai toujours d'aimer le monde. Maintenant, l'amour doit passer par ces mots. Ils me sont difficiles mais on n'a rien sans détermination.
Monsieur Berlue, je vous pardonne.
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Mon château de sable
FantasíaQuand le conte et l'amour s'invitent dans la Fantasy... Redevenez enfant. Unique en amour Aimer Mon château d'un jour Donner Le lien qui nous lie Aimer Devient si joli Donner Et la vie est telle Aimer Et la vie est belle Perle voudrait changer le mo...