Ô de Mila

Chapitre 12

Gabin

Elle me fait indéniablement quelque chose mais je suis comme bloqué pour faire avancer les choses. J'ai profondément envie de mieux la connaître et d'être plus agréable avec elle. Trouver les bons mots, avoir un comportement correct. Mais je ne suis pas un homme romantique, je suis un homme à femmes. Cette chose invisible qui me hante depuis des années refuse que je sois heureux avec une fille. Et je sais pertinemment ce que c'est. L'absence paternelle.

Si ma mère reste mutique à ce sujet ce n'est pas parce qu'elle ne le connait pas. Je suis certain qu'elle se rappelle également de son nom de famille. Il ne peut pas s'appeler simplement « Patrick ». Il n'est pas n'importe qui. Elle a quand un enfant avec lui. Peut-être qu'il ne le sait pas. Qu'ils ne sont vus que pour coucher comme je le fais avec les filles.

Heureusement que j'ai le travail. Ma passion. Mon ambition. Je vise toujours plus haut. Je veux plus que la place de mon patron. Je fais rêver les filles avec mon métier. Et c'est bien ce concept que j'adore. L'amour que je mets dans mon travail, je ne l'ai pas dans ma vie privée, j'en suis conscient mais qu'importe, je suis heureux ainsi. Dans quelques années, j'aurais plus qu'un nom. Je ne serais plus uniquement sur tous les cous mais également sur les lèvres.

Les effluves de parfum de mes narines me rendent fier. J'ai créé cette odeur. J'ai peut-être un égo surdimensionné mais c'est ma carrière et mon rêve. Personne ne viendra me tirer vers le haut dans ce monde de requins. Je me suis construit seul jusqu'à présent et ça continuera ainsi.

Les obstacles, je les contournerais. Les rivales, je les mettrais à terre. Dans ce monde fermé de prestige et de luxe, il n'y a de la place que pour les meilleurs. L'élite de la catégorie. Aucune ambition n'est jamais trop grandes car lorsque l'on veut quelque, on l'obtient. Que ce soit dans six ou dix ans, je ne quitterais pas ce monde sans avoir été parfumeur d'une grande maison.

Chaque jour, je mélange des odeurs qui ne me sont désormais plus inconnues. Je cherche à trouver la nuance parfaite qui sera sur toutes les naissances de poitrine cet été. Je recommence cet inlassable travail depuis des semaines pour arriver à la perfection. Sous les ordres de mon chef, je n'hésite pas à oser l'extravagance. La modernité dans laquelle nous vivons aujourd'hui ne laisse plus place à la simplicité.

Quand je créerai des parfums personnalisés, je veux que la personne en question se sente unique. Qu'elle donne envie à ses proches d'avoir elle aussi une bouteille qui leur appartient. La sophistication. C'est un mot qui me plait. Je veux faire de mon métier, toute une vie. La mienne. Celle qui me conduira au sommet de la réussite et de l'ambition professionnelle.

Il n'y a pas de place pour l'amour dans cette vie que je me dessine. Seule Lily à ce privilège d'en faire partie. Plus tard, je ferais d'elle, mon égérie. Ma petite princesse. Elle l'est déjà, c'est certain mais c'est encore une petite fille. Elle va devenir une belle jeune femme. Elle est mon bonheur dans cette vie chaotique.

***

Je dépose Lily chez ses parents la laissant à la baby-sitter.

-Je dois récupérer quelque chose et je repars, je dis à Chloé.

-Très bien, me sourit-elle.

Je me précipite dans la chambre de ma mère. Je sais qu'elle a dans un carton quelques souvenirs d'adolescence. Si je pouvais trouver quelconques indices sur mon père, ce serait un bond en avant. Je ne dis pas que je nouerais des liens avec lui car après vingt-cinq ans, je doute que ce soit possible. Il ne connait probablement pas mon existence.

Je trouve des cartons de chaussures, de livres ou autres babioles inutiles mais rien qui ne pourrait à découvrir l'identité de mon père. Je fourrage et range les affaires rapidement. Je sais où je chercherais la prochaine fois. Pour l'instant, j'ai bien autre chose à faire. Si ce n'est pas cacher dans sa chambre, c'est dans le cagibi.