Chapitre 19

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Gabin

J'ai cru que ma colère allait s'apaiser avec les jours. Que j'allais finalement me faire une raison et comprendre les raisons qui ont poussé ma mère à de tels agissements. Ça a été le cas pendant deux ou trois jours, mais tout m'est revenu comme un boomerang dans la gueule quand la ville s'est parée des décorations de Noël et des chants traditionnels de cette période. Les fêtes de fin d'année. Synonymes de famille, de partage, d'amour et de rire. Une bonne blague.

Que faire pour éviter une journée pareille sans blesser Lily-Rose qui croit encore dur comme fer au Père Noël. Elle comprend très bien que je suis fâché contre notre mère mais son âme d'enfant ne peut pas rester insensible à mon absence le jour de Noël. Elle ne mérite pas d'être impliquée dans une histoire aussi complexe.

Le jour J approchant, j'ai décidé de ne pas me présenter au repas de famille. Je préfère m'expliquer après que de subir des interrogatoires sur mon visage dépité. Je passe la journée du vingt-cinq avachi sur mon canapé à ruminer sur ma misérable enfance. Mes Noël gâchés par une mère plus occupée par ses études de médecine, ses aventures d'un soir.

Et mes grands-parents là-dedans ? Ont-ils vraiment abandonné fille et petit-fils ? La vérité parait bien obscure et lointaine. Ma mère m'a raconté des tas de choses et j'en ai lu de nombreuses autres mais je n'arrive pas à me situer dans cette histoire. Discerner la vérité du mensonge. Je ne pensais pas que c'était si difficile.

Apprendre à pardonner. Je lis des dizaines d'articles et essaye de me situer dans le processus. Je crois que mon stade n'existe pas. Je suis bien loin du résultat final. Pourquoi ai-je pris des vacances ? J'aurais été bien mieux au travail ! Ce n'est pas à mon habitude, mais je me suis goinfré de cochonneries. Glaces, barres chocolatées et sucreries en tout genre.

Le cadeau de Lily-Rose trône au milieu de mon salon. Il est soigneusement emballé. Nous sommes le vingt-neuf décembre. Ma mère a rempli ma messagerie et je ne cesse de penser à cette gamine, ma petite sœur. Elle qui vit entre des parents absents et un grand frère qui en fait probablement un peu trop. Moi aussi, je suis absent en ce moment. Je ne veux pas la décevoir mais cela parait compliqué. Je ne suis pas à un stade de ma vie ou je peux me projeter facilement. Quand est-ce que je vais lui offrir ce cadeau ? Elle me manque. Moi qui me suis toujours refusé de garder Lily pour moi, qu'elle n'ait pas qu'une chambre chez moi, mais une vie, commence à changer d'avis. Pourquoi ne pourrait-elle pas vivre un peu plus à la maison ? Elle serait heureuse et ça lui ferait du bien.

***

-Bouge-toi Marchal, crie Nohé à travers la porte de la salle de bain.

-C'est bon, je rumine.

-Hugo, Clara et Sofia t'attendent en bas. On va être en retard.

Je me coiffe rapidement et sors de la pièce avant qu'il ne continue de tambouriner contre la porte. J'enfile mon manteau et mon écharpe avant d'y glisser mon portefeuille dans ma poche intérieure. Nous descendons les escaliers rapidement et retrouvons les autres dans la voiture. Mon humeur grincheuse les fait taire. Après tout ils m'ont forcé à venir avec eux. Une soirée spectacle pour le nouvel an ? Il n'y a rien de plus pathétique dans mon cas.

Enfin assis sur ma chaise après une file d'attente incroyable, je prends un verre d'eau ; voir mes deux meilleurs potes avec leur compagne me fout le moral dans les chaussettes. Je ne suis pas à la recherche de la femme de ma vie, mais je me dis qu'à mon âge, il serait franchement temps que j'arrive à me caser plus de trois jours. Être un bon coup ne suffit pas à avoir une vie de couple.

La soirée commence doucement et l'ambiance parait assez bonne. Nous prenons l'apéritif plutôt gourmand et conséquent avant de passer à l'entrée. Gourmand que je suis, je dévore le contenu de mon assiette en un rien de temps. Je ne préfère pas rentrer dans la conversation de mes amis. La moindre parole pourrait me faire partir en vrille. Il est difficile de ne rien leur dire alors que je bouillonne intérieurement. Je manque éclater à chaque minute. Trop de bonheur m'entoure.

Ô de MilaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant