Prologue

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Mila

Aujourd'hui n'a rien de moins qu'hier. Et rien de plus que demain. Pourtant, cela semble être le jour favorable et adéquat pour commencer le récit de ma vie. Elle n'a rien de spéciale et à l'aube de mes vingt-quatre ans, je ne crois pas qu'une extraordinaire aventure m'attend. Je ne suis pas comme toutes ses filles qui vivent des situations improbables et des concours de circonstances incroyables. Non, je dirais plutôt que j'ai une vie assez banale mais elle me convient. J'ai un travail, une passion, des amis et une famille. Tout ce qui est utile à mon bonheur. Peut-être manque-t-il un compagnon de vie mais je ne suis pas du style à aller trouver l'amour en boîte. Il viendra quand il sera temps.

Je profite de mon dimanche matin pour faire le ménage dans mon petit studio de 20m². Je mets en route une playlist d'une heure trente pour me motiver et être dans les temps. Je commence par les poussières et continue mon train-train hebdomadaire chantonnant mes musiques préférées. J'entame ma seconde playlist pour me préparer afin d'aller manger chez mes parents. Après une douche rapide, je me coiffe et enfile ma petite robe rouge avec des escarpins noirs. Nous fêtons mon anniversaire, j'essaie d'être un minimum classe. Voilà ce dont j'ai bien horreur. Fêter mon anniversaire - ou celui de n'importe qui d'autre – en avance. Je crois en ce mauvais présage. Je fais bonne figure pour mes parents mais je ne suis pas d'humeur à entendre la fameuse chanson. La seule chose qui me réjouit, c'est de savoir que je vais voir ma belle-sœur et son joli ventre arrondi. Dans quelques mois, je serais tante pour mon plus grand bonheur.

Si je cherche dans mes plus vieux souvenirs, je pense que je verrais toujours la même chose. Ma vie scrupuleusement carrée. Je n'aime pas l'imprévu ou la dernière minute. Mon agenda est organisé par code couleur et la ponctualité est primordiale dans mon quotidien. J'ai déjà été prise pour une folle même par des collègues mais je préfère être perfectionniste et réussir ma vie que bordélique et arriver à rien. Certes, c'est parfois dérangeant voire agaçant car je peux m'empêcher de lancer des pics aux personnes chez qui je suis invitée quand il y a du désordre. Je ne sais pas si on peut considérer ça comme une maladie, si on peut le soigner. Personnellement, je ne le vis pas mal, c'est un trait de ma personnalité comme ceux qui aime le désordre.

Mon sens de l'organisation n'est jamais venu enrayer ma socialisation, même si cela à effrayer mes parents dans un premier temps. Je suis ainsi depuis toujours et j'ai eu des tonnes de copains et copines comme tous les enfants de primaire. Je rangeais ma chambre et celle de mon frère à longueur d'après-midi. Aujourd'hui j'ai trois amis qui me sont chers qui acceptent totalement ce défaut - si s'en est un – sans me juger.

Je prends un taxi, plus rapide que les transports en commun et regarde le paysage défiler pendant près de trente minutes. Arrivée dans le quartier de mon enfance, j'ai tout de même le sourire. Ce pavillon de famille me rappelle tant de souvenirs. Avec mon frère Maël, nous avons fait les quatre cent coups, nos quinze petits mois d'écart ayant fortement participé à notre complicité. Je profite un peu de l'air frais de cette fin d'été, les rayons du soleil de midi réchauffant mon visage. Je mets mes lunettes de soleil sur la tête et frappe à la porte.

Mon père vient ouvrir tout sourire embrassant mes deux joues.

-Tu es magnifique ma puce.

-Merci papa. Maël et Adèle sont arrivés ?

-Oui, à l'instant. Nous sommes sur la terrasse, viens.

Je le suis jusqu'à l'extérieur et salue ma famille qui m'attend pour prendre l'apéritif. Ma belle-sœur enceinte de plus de trois mois commence à avoir de jolies formes. Je m'installe en bout de table et profite de ma famille. Nous trinquons tous, cocktails en main – sans alcool pour Adèle, évidemment – et grignotons avec plaisir les toasts et verrines que ma mère a préparé. Nous nous régalons déjà, les discussions vont bon train et l'ambiance est joyeuse. Mon frère nous raconte différentes anecdotes sur son travail d'agent immobilier.

Nous passons au barbecue – repas que j'ai toujours connu pour mon anniversaire – avec des petites salades qu'ont préparé mes parents. Je me réjouis d'avoir prévu des Tupperware pour pouvoir ramener les restes. Même si je cuisine et que j'aime vraiment y passer du temps, les plats de ma maman resteront mon plaisir culinaire.

Pendant que les hommes parlent sport, je m'octroie un moment privilégié avec ma belle-sœur et ma mère. Nous parlons maternité et je vois l'excitation et l'impatience dans le regard de la future maman. Tout se passe bien pour elle jusqu'à présent et elle a hâte de connaître le sexe pour définir le prénom avec Maël. Je me vois déjà dorloter ce nouveau-né.

La journée passe à toute vitesse et vient déjà le moment du gâteau et des cadeaux. Je ne cache pas non plus mon empressement. Une fois mes bougies soufflées, je déchire le premier paquet et découvre un tout nouveau robot pour cuisiner. Je me réjouis et embrasse mes parents pour ce joli présent avant de déballer mon second cadeau. Je remercie Adèle et Maël pour le kit de vernis et la paire de boucles d'oreille.

Nous mangeons le dessert dans la même lignée, finissant notre journée aux alentours de dix-sept heures. Tous fatigués, nous nous quittons, pour débuter cette nouvelle année. La rentrée est demain et après ces vacances, difficile de reprendre le chemin du travail. Je prends de nouveau un taxi pour rentrer chez moi et arrive bien chargée.

Je m'installe sur mon canapé allumant la télé en fond sonore et tente de me replonger dans le rythme « travail ». Je suis auxiliaire de puériculture en crèche, être au contact des enfants m'a toujours plu et dès mon plus jeune âge, j'ai fait du baby-sitting. Aujourd'hui, je m'épanouis pleinement dans mon travail et cet environnement me convient pleinement. Je n'ai encore rien de fixe, mais je suis assurée de travailler pour les deux prochaines années, remplaçant un congé maternité.

Je tente de me coucher tôt mais rien n'y fait, le sommeil ne veut décidément pas de moi. Je tourne en rond encore et encore jusqu'à rallumer ma lampe de chevet pour bouquiner un peu. Mon livre finit par m'assommer et je m'endors paisiblement. Ma nuit est pourtant agitée, l'anxiété de la reprise s'est emparée de moi, comme chaque année. J'ai peur que ma première journée se passe mal, que parents, enfants et collègues soient désagréables. La mauvaise humeur de la rentrée ne m'est pas propre, elle est plutôt commune à tous mes compatriotes français.

Pas manqué, dès mon réveil, je suis morte de stress et j'ai peur d'être en retard. Tout est minuté, millimétré et rien ne vient enrayer mon organisation matinale. J'arrive au travail avec un quart d'heure d'avance et une partie de mes appréhensions se sont envolées. C'est une nouvelle année qui commence, j'espère qu'elle sera pour moi synonyme du meilleur.

Ô de MilaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant