PARTIE 11

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Un autre sms de Khaled me fit reprendre mes esprits. Il disait explicitement : « Tu sais ma belle, l’amour n’a pas d’âge….. ». Ce message aussi innocent, et aussi sincère qu’il fut, ne réussit guère à me convaincre. C’est bien beau, mais n’empêche qu’il fallait à un moment donné se rendre à l’évidence : j’étais (presque) âgée de 24 ans, j’avais dépassé l’époque des amourettes et je cherchais une relation sérieuse qui me mènerait vers le mariage. Dès que je dépasserai la case des 25 ans, la pression sociale se fera tellement intense que j’ai intérêt à établir le fondement de ce bâtiment matrimonial, en la personne d’un bon parti. Alors, désolée Khaled, je me devais impérativement d’écouter ma conscience sur ce coup-ci. Mon cœur, n’a fait jusque-là, que m’attirer des ennuis. Si mon cœur était assez sot pour ne pas avoir compris la leçon, malgré le nombre de fois où il a été brisé en mille morceaux, eh bah, moi Kira, je connaissais parfaitement la morale de l’histoire. Aucune envie de ramasser mon cœur brisé à la petite cuillère. 

Je décidai donc tout bonnement d’ignorer son message. Mieux : j’éteignis mon portable. Mais je n’arrêtais pas de me tourner et de me retourner dans mon lit. Toutes mes pensées allaient vers lui, malgré ma décision. Certes, je suivrai ce que me dictait ma raison, mais force était de reconnaitre que j’étais amoureuse de Khaled. Mon cœur et mon corps le criaient.  Et tant qu’il me restera de la force mentale, je continuerais à lutter contre cet amour. Après tout, ne disait-on pas que le temps guérissait tout mal ? Il me fallait juste donner du temps au temps.

Les jours passèrent, et je m’entêtais dans ma décision. Il était hors de question que je sorte avec Khaled, malgré cette différence d’âge.  Pourquoi faire d’ailleurs ? Et puis, admettons que je lui donne sa chance, rien ne me garantissait qu’il n’allait pas, si on en advenait à se marier, épouser une jeunette toute fraiche après 15 ans de mariage, quand je serais à l’aube de la quarantaine, vieille, certainement ridée, et le corps marqué par les épreuves de mes futures grossesses.

Le week-end suivant, j’avais convié Gael à venir déjeuner chez moi. Je me sentais très redevable envers lui, après l’histoire d’Ami. J’avais beaucoup d’estime pour lui, et j’étais surtout touchée par la sollicitude et la promptitude avec laquelle il avait réagi. Je me mis donc aux fourneaux ce jour-là. Du bon mafé était au menu. Détrompez-vous, même si mon éducation restait très occidentalisée, ma mère avait veillé à m’inculquer les bases traditionnelles qui feraient de moi une très bonne épouse Africaine. Ainsi, je savais cuisiner, m’occuper des tâches ménagères diverses…quoique je devais admettre que je n’étais pas particulièrement douée pour le repassage lol

Gael était un homme très ponctuel. Il arriva à 13h pile. Il me serra la main, tout en me pinçant affectueusement les joues. Je notai donc une petite différence intéressante entre lui et Khaled : ce dernier me faisait toujours la bise, il était plus à l’aise avec moi. J’installai Gael dans le salon et le présenta à mon père. Ils commencèrent naturellement à discuter de tout et de rien, comme de vieux amis. Je les laissai donc dans le salon et allai vaquer à mes occupations, l’esprit tranquille. Malick vint me trouver dans la cuisine :

- Malick : Ton ami là, il a quel âge ?

- Moi : Mooo ! Tu te prends pour Colombo toi. Pourquoi tu me demandes ça d’ailleurs ?

- Malick : Bah parce que je lui ai demandé de jouer à la PlayStation avec moi, et il m’a dit qu’il ne savait pas y jouer. Je lui ai demandé aussi s’il aimait les BD, il m’a répondu que non. Il est ennuyeux lui. Il préfère discuter avec Papa de politique. Pff Khaled lui, il joue à la Play avec moi, tout le temps. Et  même que Ismaël est plus intéressant que lui, il aimait les BD…

Non mais mon petit frère était gonflé deh. Et puis, pourquoi il me parlait de Khaled d’ailleurs, ce petit garnement ? Très insolent ce petit, à comparer qui faisait quoi, et qui jouait à quoi. Je lui demandai de me donner de l’air et de sortir de la cuisine. Il consentit enfin à déguerpir en me tirant la langue et en chantonnant « l’amoureux de Kira est moche, l’amoureux de Kira est moche….. ».

Bref, je servis mon repas, et m’arrangeai pour manger seule avec Gael, afin qu’il ne soit pas gêné par la présence de mes parents. Notre journée se passait donc merveilleusement bien. Avant de prendre congé, il me fit un petit speech sur ses « désirs et attentes ».

- Gael : Kira, jouer n’est pas mon intention. Je ne cherche même pas à sortir avec toi. Moi ce qui m’intéresse, c’est faire de toi ma femme. J'ai dépassé l’âge des enfantillages. Je ne suis pas bête : je sais reconnaitre facilement une fille de bonne famille, et franchement je t’ai bien étudié, ce que j’ai vu chez toi me suffit largement. Je ne veux surtout pas précipiter les choses, donc je te propose qu’on apprenne à mieux nous connaitre, et une fois ton diplôme en poche, de sceller notre mariage.

Hé Dieu ! Qu’est-ce-que j’avais avec ces demandes de mariage qui pleuvaient depuis quelque temps ?  Il y’a moins de deux semaines, c’était Ismaël, et là, Gael qui me parle de son vœu de vouloir faire de moi sa femme. Ce n’est pas que je m’en plaigne hein, loin de là..... Je lui répondis tout simplement :

- Moi : Oui, ça me va. Je sais que tu es quelqu’un de bien, donc je ne vais pas cracher dans la soupe. Seulement, tout ce que je te demande, c’est de m’être fidèle, et de ne jamais, au grand jamais me mentir. Franchement, si tu collectionnes les copines comme des timbres ou des cartes postales, abstiens-toi de t’engager avec moi. J’ai assez souffert déjà. Il me fit la promesse solennelle de m’être fidèle. Pour je ne sais quelle raison, je le crus facilement malgré ma méfiance. Je faisais toujours confiance à mon intuition, et quelque chose me disait que ce mec était réglo. Bref, donc voilà, à partir de ce fameux samedi, ma relation avec Gael fut officielle. Je sortais avec lui au vu et au su de tous, et je ne m’en cachais pas. Certes, je n’étais pas amoureuse de lui, mais il me plaisait bien. Il était gentil, attentionné, et avait toutes les qualités que je recherchais chez un homme.  Mes parents l’aimaient beaucoup (ce n’est pas ma mère qui dira le contraire, avec tous les billets qu’il lui distribuait à chaque visite),  mes copines l’estimaient aussi. Seul mon petit frère Malick était réticent à son propos. Pour je ne sais quelle raison, ils ne s’entendaient pas tous les deux. Ça peut paraitre bête, mais ça me chagrinait quand même. Mon petit frère comptait beaucoup pour moi, et d’habitude, il s’entendait bien avec tout le monde. Mais bon, Gael était un homme, et mes ex étaient tous des jeunes-hommes : là résidait toute la différence.

J’avais presque fait un mois à Ouaga, la moitié de mon périple, et rien qu’à penser au fait que j’allais retourner en France sous peu, les larmes miroitaient dans mes yeux. En outre, je n’arrivais toujours pas à me sortir Khaled de la tête.  Je pensais constamment à lui et je n’osais m’en ouvrir à personne. Ma mère ne saurait me comprendre, et ignorait d’ailleurs que nous nous étions vus. Quant à mes copines, je ne savais comment elles allaient prendre le fait que je me sois amourachée d’un mec moins âgé que moi. Je ne faisais qu’éviter leurs questions le concernant. De plus, j’avais clairement dit à Khaled, que je ne pouvais être avec lui car il était plus jeune que moi. Digne jusqu’au bout, il m’avait répliqué ceci : « Soit. Si tel est ton désir, je saurai le respecter. Je te souhaite tout le bonheur du monde. En tout cas, j’envie grandement celui qui sera avec toi, car il sera l’homme le plus chanceux du monde. J’espère juste qu’il en aura conscience. Bye. »

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