PARTIE 34

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Ami, alourdie par sa prise de poids, se leva du clic-clac avec difficulté. Je ne sais pas entre Romain et moi qui retenait le plus son souffle. Qu'est-ce qu'elle allait lui répondre donc ? Son visage restait impénétrable : aucun indice à l'horizon. Elle s'avança vers Romain et les mains sur les hanches, elle lui dit :

- Ami : Et tu crois peut-être qu'il suffit que des mois plus tard, tu te pointes sous prétexte de vouloir prendre tes responsabilités, pour que j'obtempère aussi facilement ? Tu penses que mes sentiments à ton égard n'ont pas changé ? Tu penses que je t'aime toujours autant ? Que je veux toujours faire ma vie avec un lâche doublé d'un faible qui se laisse bêtement influencer par sa satanique de mère ?

Waow que de questions dont Romain n'avait apparemment pas les réponses, vu son silence. Je commençais réellement à le prendre en pitié, même si je comprenais parfaitement la réaction d'Ami. Mais, pour ma part, l'apparition de Romain était un vrai soulagement. Ce bébé n'allait pas grandir sans son père ! C'était juste l'essentiel pour moi. Ami ne devrait pas à cause de son ressentiment et de son sentiment d'abandon, priver à ce pauvre petit-être une figure paternelle. Cependant, je n'osais pas m'immiscer dans la conversation. L'ouragan Ami, toujours aussi déchainé, enchaina :

- Ami : Rentre chez toi Romain, je ne vais nulle part avec toi. Et tu peux faire une croix définitive sur ce bébé. Je l'élèverai toute seule, et je m'en sortirai.

- Romain : Ecoute ma puce, je comprends que tu m'en veuilles mais il faut que tu sois raisonnable. Ce bébé a besoin d'un père. J'ai fait le con, j'avoue, mais ce n'est pas une raison pour que ce bébé en paie les pots cassés. Tu vas le priver délibérément de son papa ?

Pendant une fraction de seconde, le chantage affectif de Romain eut raison sur Ami : je la sentais hésiter. Mais c'était sans compter sur sa détermination et sa rage.

- Ami : Je préfère qu'il soit sans père, plutôt que de lui donner un père aussi irresponsable que toi. Je te prie maintenant de sortir de chez nous et ne t'avises plus d'y mettre les pieds.

Romain, surement accablé par le rejet d'Ami, commençait à s'emporter et s'était mis à crier à son tour :

- Romain : Nous ne sommes pas en Afrique ma chère. La France a des lois. Tu ne veux plus de moi ? Très bien, ça ne regarde que toi! Mais ce bébé est aussi le mien. Tu ne peux pas me l'enlever ! Tiens le toi pour dit ! Je te trainerai en justice s'il le faut ! Je t'ai à l'œil en tout cas.

Sur ces mots, il s'en alla d'un pas vif. Cela faisait des années que je connaissais Romain, mais c'était bien la première fois que je le voyais dans une fureur aussi noire (mis à part son fameux coup de fil quand j'étais à Ouaga). Ami regagna le clic-clac, et recommença à fixer la télé d'un air indifférent. Moi, j'étais toujours debout comme une conne, la bouche à moitié ouverte. J'étais dépassée par les événements. J'espérais vraiment une réconciliation, mais apparemment je rêvais debout.

Je pris la télécommande et baissis le son :

- Moi : ça va , Ami ? Tu te sens bien ?

- Ami : Bien-sûr que oui ! Pourquoi n'irais-je pas bien ? Tchiiip. Si à chaque fois qu'un con me pourrissait la journée, j'allais me sentir pas bien, ç'en serait fini de ma vie hein !

- Moi : Ma puce, franchement je peux comprendre que tu aies très mal, mais moi j'y voie un signe divin. Dieu te tend la main, saisis-la. Pardonne-lui et allez de l'avant !

- Ami : Non Kira, tu ne peux pas me comprendre. Si tu n'as pas vécu ce que j'ai vécu pendant ces derniers mois, tu ne peux pas me comprendre. Ce mec, je me suis donnée à lui, je me suis fait insulter par mon père qui a même menacé de me déshériter si je ne rompais pas avec lui, et pourtant j'ai tenu bon. Pourquoi ? Parce que je l'aime. Je me suis coupée du monde, de ma famille, tout ça, pour lui. Et il n'est pas foutu d'être là pour moi à un moment aussi crucial ! C'est lui qui m'a mise enceinte, pas un vibromasseur. Okay ? C'est beaucoup trop facile de se ramener avec des larmes de crocodiles. Pff Il m'a trop énervé, wallah !

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