CHAPITRE XXXIII

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Qu'est-ce que j'avais bien fait de mal dans ma vie pour mériter que le sort s'acharne autant sur ma pauvre personne ? Le ciel n'avait-il pas encore juger que la mort brutale de ma famille, associée aux neuf longues années de tourments que j'avais subie étaient suffisant ?

Aussi raide qu'un piqué, Alexandra se retourna pour lui faire face, mais tout ce qu'elle voyait c'était son sourire, elle ne voulait pas regarder ses yeux. Parce que si elle ne les voyait pas entièrement, c'est comme s'il n'était pas là.

Par habitude, elle se dirigea vers l'un des quatre angles de la pièce pour s'y recroqueviller. Les mains fermant ses yeux, elle se revit immédiatement replongée dans son passé, elle sentait déjà les coups de fouets s'abattre d'avance sur son corps, qui en était maintenant sevré. Le temps semblait de nouveau durer des heures, et elle comprit qu'elle allait bientôt ressentir cette odeur d'humidité, et de sang frais, ses yeux allaient refaire connaissance avec l'obscurité de la pièce. Les jambes ramener sous elle, Alexandra voyait et entendait la semelle de ses chaussures qui se rapprochaient inexorablement d'elle comme au paravent, avant de sentir ses doigts sur elle, et elle ne put supporter les brulures qu'ils lui infligeaient. Alexandra essaya en vain de se dissimuler derrière les murs qu'elle s'était bâtit en dix longues années, mais elle n'y arrivait plus. Puis soudainement, elle entendit des cris similaires à ceux d'un écorché vif, s'échapper d'une personne. Cette voix ressemblait vaguement à la sienne, mais elle ne pouvait pour autant s'arrêter de crier. Pendant neuf ans elle n'avait pas laissé échapper un seul son, mais aujourd'hui ce n'était plus pareil. Ses remparts étaient inefficaces, ou plus précisément ils étaient devenus inexistants, autorisant ainsi à la douleur de l'inonder comme jamais. C'est comme si la barrière qui retenait tous les cris qu'elle avait contenu à chaque coup, depuis tout ce temps, venait de céder. Et elle hurlait, car c'est tout ce qu'elle pouvait faire, hurler sa douleur au monde entier. La gorge atrocement douloureuse, Alexandra avait comme un goût de fer dans la bouche. Ses poumons parvenaient difficilement à suivre le rythme de ses multiples cris stridents, son cœur meurtri, vibrait si vite, que ses oreilles bourdonnaient. Complètement, en nage dans ses propres larmes, Alexandra se voyait dans l'incapacité d'empêcher toutes ses plaies de se rouvrir, et surtout, elle ne savait pas si sa raison tiendrait le choc.

Interpellé par des cris se situant à l'extrême limite de l'agonie, Christopher accourus jusqu'à l'origine du son, et une fois dans arrivé dans son bureau, il vit deux hommes qu'il connaissait, entourer Alexandra qui était repliée sur elle-même à même le sol.

- Qu'est-ce qui se passe, criais-je à leur intention.

Ils se reculèrent et je réussi à voir entièrement mon Alexandra, et mon cœur se comprima, quand je la vis trembler comme une feuille soufflée par le vent.

- Mais qu'est-ce que vous lui avez fait, demanda Christopher d'une voix cassée de douleurs.

- Rien, répondit l'un des deux.

- Je l'ai trouvée ainsi ajouta le garde-corps d'Alexandra.

Je reposai mon regard sur Alexandra, jamais je ne l'avais vu dans cet état. Elle criait si fort, que je n'entendais pas la voix des autres hommes. Ses hurlements reflétaient une souffrance sans nom, qui était en tout point inimaginable. Prestement, je bousculai tout sur mon passage afin d'arriver jusqu'à elle.

- Sortez d'ici ! ordonnais-je brutalement à tous ceux qui étaient dans la pièce.

Se retrouvant ainsi seule avec Alexandra qui hurlait comme si on lui arrachait la peau avec un couteau mal aiguisé, Christopher se mit alors sur ses genoux, et s'abaissa jusqu'à son niveau. Les larmes coulaient comme des torrents sur ses pommettes, son visage était rougi et ses cordes vocales commençaient à s'enrayer. Elle recrachait du sang quand elle toussait, mais elle n'arrêtait pas pour autant de s'époumoner. Christopher voyait là, pour la première fois, une infime partie de toute la douleur qu'il y'avait en elle. C'était la pire crise d'angoisse qu'elle n'ait jamais eu. A chacun de ses hurlements stridents cris, Christopher avait la poitrine qui se comprimait douloureusement, enrayant ainsi son cœur, il avait l'impression de partager de l'intérieur cette peine incommensurable. Tout en douceur, il se mit alors à lui caresser le dos, puis les joues, en lui parlant d'une voix qu'il voulait apaisante, et rassurante.

Parle MoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant