Chapitre 38 - Cut out all the ropes and let me fall

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Samedi 1er avril

Une douleur atrocement lancinante s'écrase contre mon crâne. J'ai l'affreuse sensation qu'un marteau piqueur prend un malin plaisir à défoncer continuellement ma tête, sans jamais s'arrêter. Mes paupières sont closes et j'aimerais vraiment les ouvrir pour comprendre d'où vient ce vacarme mais la nausée qui tourmente mon estomac me convainc de rester dans le brouillard. Je laisse passer quelques minutes sans bouger mais la sensation plus que désagréable qui tabasse ma boite crânienne commence à me faire si mal que ça en devient vite intolérable. Et soudain, je panique.

Que se passe-t-il pour que j'aie autant mal ? Que m'est-il arrivée pour que je me retrouve dans cet état ?

Je rassemble toutes mes forces pour ouvrir les yeux et lorsque mes iris rencontrent la luminosité agressive de cette petite pièce aux murs blancs, la douleur insupportable dans mon crâne s'accentue encore un peu plus. Je plisse les paupières pour tenter d'adoucir mon mal mais ma vaine tentative ne fonctionne pas du tout. J'observe lentement le lieu dans lequel je me trouve et mon rythme cardiaque commence à s'affoler lorsque je réalise que je ne le reconnais pas. Je suis apparemment allongée dans un lit étroit aux draps blancs, dans une petite pièce qui ressemble à s'y méprendre à une chambre d'hôpital. Les machines qui bippent ainsi que les tuyaux à ma droite me font rapidement comprendre que j'ai vu juste. Mais qu'ai-je fait pour atterrir ici ?  

Mes yeux fouillent la pièce vide mais je n'ai pas le temps de laisser l'angoisse me faire disjoncter que la porte de ma chambre s'ouvre. Je tourne la tête vers la gauche pour entrapercevoir brièvement Gabriel mais la douleur qui martèle mon crâne s'intensifie à nouveau et je grimace. Il s'empresse de venir à mon chevet et, à travers mes yeux à demi clos, je remarque aisément l'inquiétude qui lui barre le front. Rapidement, il tend le bras dans ma direction mais il me semble qu'il hésite avant de poser sa main sur ma joue. Quand sa paume fraiche rencontre ma peau tiède, je frissonne. Je ne me sens pas bien mais cet élan de douceur me permet de ne pas flancher.

-Comment te sens-tu ? me demande-t-il sur un ton légèrement affolé.

-Bof.

-Tu veux que j'appelle une infirmière ? Tu as mal quelque part ?

-Explique-moi ce que je fais ici s'il te plait.

Chaque mot, chaque son que nous prononçons est comme une torture pour mon esprit dévasté par la douleur mais je veux absolument comprendre pourquoi j'ai atterri ici.

-Tu ne te souviens de rien ? Tu es arrivée chez moi tout à l'heure, tu n'étais pas bien et alors qu'on discutait dans ma cuisine, tu t'es effondrée. Je n'ai rien compris à ce qu'il se passait !

Je ferme les yeux en écoutant sa réponse, la luminosité exacerbée par les néons au plafond brutalisant beaucoup trop mon crâne. Petit à petit, les souvenirs me reviennent. Je me rappelle de l'angoisse, de la douleur et de la solitude qui m'ont assaillie quand j'ai quitté le restaurant. Je me rappelle avoir eu besoin du réconfort de mon homme sans parvenir à le trouver pendant que mon corps commençait à me lâcher. Je crois que quelques larmes amères perlent aux coins de mes yeux mais elles n'ont même plus la force de rouler sur mes joues. J'ai placé tellement d'espoir et d'amour dans cette relation que la chute devient bien trop abrupte.

D'autres souvenirs affluent maintenant et je revois la scène, limpide comme de l'eau de roche. Je suis arrivée chez Gabriel les yeux ravagés par les trop nombreuses larmes que j'ai versées dans ma voiture, totalement chamboulée par ma dispute avec mes parents et par le silence de mon compagnon. Comme à son habitude, il m'a accueillie les bras ouverts et m'a enveloppée dans sa douceur. Il n'a pas cherché à me faire parler, il a simplement attendu que je sois prête à lui ouvrir ce qu'il reste de mon cœur bien trop meurtri. Sauf que je n'ai pas eu le temps de mettre des mots sur mon état que j'ai senti mon corps me lâcher. Tout à coup, c'est comme si mon corps était devenu un poids mort destiné à s'écraser violemment au sol sans que je ne puisse le retenir. Je ne maitrisais plus rien, je tombais lentement, durement, violemment et je n'avais même pas envie de me retenir. La dernière chose dont je me souvienne, ce sont les battements totalement irréguliers de mon cœur qui abimaient ma poitrine et le bruit assourdissant de ma tête frappant le carrelage à pleine vitesse.

Malgré nous (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant