Chapitre 22 - When you loose something you can't replace

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Lundi 2 janvier

Ma tête s'échoue lamentablement contre mon volant et je reste ainsi les yeux fermés un long moment. Une profonde angoisse m'a envahi hier soir lorsque j'ai regagné mon appartement et elle ne m'a pas quittée depuis. Je ne ressens plus qu'une gigantesque boule d'anxiété qui s'est logée au plus profond de mes entrailles et qui ne semble pas prête à me laisser un peu de répit. Bien au contraire, j'ai l'impression qu'elle se démultiplie à la vitesse de la lumière afin d'infiltrer chaque cellule de mon corps, tel un virus se déployant insidieusement.

La parenthèse hors du monde réel que Gabriel m'a offert s'est achevée hier en fin d'après-midi lorsqu'il m'a raccompagnée jusqu'à chez moi. Plus nous enchainions les kilomètres, plus mon cocon douillet se désintégrait pour me reconnecter avec la réalité. Quand j'ai passé le seuil de ma porte, les mots cuisants de ma mère se mêlaient au visage affolé d'Ethan lorsque mes doigts se sont posés sur son alliance et pour couronner le tout, la voix de ma meilleure amie résonnait pour me rappeler à quel point une relation avec cet homme pourrait me détruire. En cet instant, j'ai juste eu envie d'hurler que son absence me détruisait tout autant, si ce n'est plus. Et malheureusement, mon cerveau ne m'a accordé aucune accalmie. Cette invisible mutilation s'est donc poursuivie lorsque j'ai défait ma valise puis sous la douche quand j'ai naïvement cru que le jet d'eau chaude pouvait laver mes maux et enfin sous mes draps quand j'ai désespérément tenté de m'endormir pendant des heures.

Ma souffrance silencieuse est ma plus fidèle compagne depuis des années mais j'avais réussi à la tenir à distance depuis quelques temps. Que j'ai été candide de croire que je pouvais définitivement m'en débarrasser ! Je sais mieux que quiconque que cette terre est peuplée d'être destinés à survoler la vie en souffrant piètrement, que les rares moments de bonheur et de légèreté nous sont offerts que dans le but de nous anéantir encore plus juste après. Je ne crois pas en Dieu mais je suis certaine que le karma s'acharne sans raison sur certains hommes. Et dans mon cas, je n'ai pas la prétention de croire que le karma m'a choisie comme bouc-émissaire mais je pense honnêtement qu'il me garde sous le coude pour les moments où il s'ennuie. En l'occurrence, ces derniers jours, le karma s'est ennuyé profondément...

Sinon comment expliquer qu'après les jours noirs que j'ai endurés, il me joue encore un mauvais tour ce matin ? N'ai-je donc pas assez été mise à l'épreuve ? Pourquoi, bon sang, pourquoi est-ce que je me retrouve dans ma satanée voiture, en ce lundi de reprise, sans parvenir à la faire démarrer ? Je veux bien convenir que le moteur de mon auto n'apprécie pas particulièrement le froid polaire qui s'abat sur le pays depuis la mi-décembre mais quand même ! Je n'ai dormi que trois petites heures, mon estomac est si contracté que je me demande à quel moment il va défoncer ma cage thoracique pour s'échouer sur mon tableau de bord et j'appréhende tellement de revoir Ethan que je serais prête à me casser une cheville pour retarder l'échéance ! De rage, je relève la tête juste avant que mon poing ne s'abatte frénétiquement sur mon volant pour le marteler de coups. J'extériorise toute ma frustration et toute mon anxiété en lâchant de pitoyables petits cris puis au bout de quelques secondes, le silence m'engouffre à nouveau dans son étau éreintant. Je ferme alors les yeux afin de me calmer puis je me force à enchainer de paisibles inspirations. Mes doigts toujours crispés sur le volant se desserrent petit à petit et je réussis à retrouver une apparente sérénité.

Allez Candice, ressaisis-toi ! Il n'est pas question que tu te laisses abattre !

Je me force à reconquérir mon habituel entrain et je quitte ma voiture, le cœur serré. Je marche une bonne vingtaine de minutes dans le froid avant d'atteindre un arrêt de bus. Je consulte rapidement les horaires et réalise avec amertume que le prochain bus ne passe que dans quinze minutes. Je vais donc arriver en retard au bureau. Cette idée me dérange dans la mesure où je n'aime pas me faire remarquer. Mais ce matin, je n'ai pas le choix. Alors, au lieu de me lamenter de nouveau sur mon sort, je décide d'occulter toutes mes pensées négatives l'espace de quelques minutes et insère mes écouteurs dans mes oreilles. Chris Martin, à toi de jouer !

Malgré nous (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant