ENDLESS RAIN

8. I'LL BE DAMNED (PARTIE XIII)

Je le fixai sans comprendre.

— Ça prouve qu'ils ont compté pour nous, et que ça en valait la peine, expliqua-t-il. Comme quoi, même la mort ne peut pas réussir à nous faire croire que l'amour qu'on leur a porté, sous quelque forme que ce soit, n'a été fait que pour être brisé.

Je réfléchis un instant à son discours, sans pouvoir m'empêcher de penser que toutes les apparences étaient contre cet état de fait. La mort s'arrangeait toujours pour tout peindre en noir, quoi qu'il advienne. Au final, le chagrin semblait toujours plus fort que l'amour.

— J'aime bien ta vision des choses, soupirai-je. Mais j'ai peur que ce ne soit pas toujours suffisant.

Il esquissa une moue compréhensive.

— Dis-moi comment tu t'appelles, me demanda-t-il au bout d'un moment.

— Enji.

Je le vis hausser les sourcils, et se tourner vers la foule pour poser le regard sur Norin. Mes épaules s'affaissèrent d'elles-mêmes.

— Je sais. Moi, c'est E-N-J-I, crus-je bon de lui épeler.

— Ça va devenir compliqué de faire la différence. C'est quoi ton nom de famille ?

— Adamson, lâchai-je sans réfléchir, avant de plaquer une main sur ma bouche.

Il eut un sourire fin en se tournant de nouveau vers mon camarade, occupé à discuter avec quelqu'un. Je ne pus qu'écarquiller les yeux, choquée par ma propre stupidité.

— Quand on m'avait dit qu'N.J. s'était trouvé quelqu'un, je n'avais pas imaginé que ce serait la fille du général Adamson. Mais dans quoi s'est embarqué ce pauvre garçon ?

Il était vrai qu'il ignorait la véritable identité de celui-ci, mais je ne nous en avais pas moins mis en danger en abandonnant cette information à l'ennemi. Qu'allait-il en faire à présent ?

— Eh, ça va, pas la peine de faire une syncope, me rassura-t-il en posant une main sur mon épaule, alors que j'étais en proie à un léger vertige. Je ne compte pas aller le crier sur tous les toits.

— Mais... pourquoi ?

Mon ton étonné me donna envie de me mettre des claques. À croire que j'espérais le faire changer d'avis !

— Nos cibles se trouvent vraiment tout en haut de la pyramide, et la Résistance est au-delà des entreprises insignifiantes. Sans vouloir te vexer, je ne te trouve pas d'intérêt vraiment stratégique dans tout ça, dans la mesure où on parle de s'en prendre à toi. Surtout si tu es venue de toi-même rejoindre nos rangs. Mais comme il y en a toujours deux ou trois pour profiter de la situation, je ne vois pas quel intérêt j'aurais à t'exposer inutilement.

Je respirai un peu plus facilement. J'étais apparemment tombée sur l'une des rares personnes intègres qui se trouvaient ici. De là à le croire, c'était une tout autre histoire, mais j'avais déjà bien assez de problèmes comme ça pour que ma chance ne m'accorde pas au moins ce maigre répit.

— Ne t'inquiète pas, Adamson, je suis une tombe, renchérit-il. Je ne dirais rien...

— À propos du fait que c'est la fille du général de Negendra ? intervint la voix déformée par l'alcool d'un drôle de gars, que je reconnus comme l'un des membres du club de haute voltige.

Je me passai une main sur le visage, effarée. Foutu pour foutu...