ENDLESS RAIN

9. WARZONE (PARTIE XI)

— Avant de conclure, je me dois de porter à votre attention qu'un groupe prétendument dissident de nos camps est entré en action depuis déjà plusieurs mois. Cette résistance – il avait presque craché ce mot – se compose en effet essentiellement de divers membres de la population et de soldats composant la garde de mon camp comme de celui de l'ennemi. J'ai cette nuit même procédé à une action préventive afin d'éviter que ces trouble-fêtes ne viennent profiter du coup d'éclat qui a définitivement désuni nos deux partis pour se hisser au pouvoir. Néanmoins, je ne prétendrai guère être enchanté de cette décision. C'est pourquoi j'aimerais m'adresser directement à ces rebelles : sachez que, quoi que vous ayez pu croire, vous n'êtes jamais que sous la coupe des dirigeants de l'Union Bleue. Ils se servent de vous pour créer un effet de panique et détourner notre attention de l'affront qu'ils nous préparaient. Vous vous êtes fait manipulés. Mais rien n'est perdu pour autant, il est encore temps de vous tourner vers la justice et de faire les bons choix. Sachez néanmoins une dernière chose : si vous continuez de vous afficher aux côtés de ces résistants, nous n'hésiterons pas à vous désigner en tant qu'ennemi de l'État et aucune concession ne vous sera faite. Nous vous éradiquerons tous, un par un.

Et voilà que maintenant, il inversait les rôles en essayant de nous faire croire qu'il n'était pas l'instigateur de ce mouvement. Comment pouvait-on se montrer calculateur à ce point ?

— Il est désormais plus que temps d'officialiser cette déclaration de guerre. Suite à la trahison de l'Union Bleue envers notre patrie, je déclare solennellement accepter de reprendre les armes face à nos ennemis. En vertu du code de l'honneur, pourtant transgressé par l'opposition, j'accorde un délai de préparation de quatorze jours à nos deux camps, jusqu'au lendemain de la date initialement prévue pour le mariage. Ce lundi 15 juin 2082 marquera à jamais le début d'une nouvelle page dans l'histoire des Survivants.

La retransmission s'interrompit sur la dernière tentative de mon père de faire valoir ses capacités oratoires. J'étais paralysée, comme en dehors de mon propre corps. J'avais eu beau connaître à l'avance l'issue de ce discours, je n'étais pas parvenue à me préparer à la déclaration bien réelle d'une nouvelle guerre. Enfin, de deux, si l'on comptait celle qui allait ravager ma relation avec Norin.

— Alors ça... souffla ce dernier, estomaqué.

Je m'éloignai de lui, une main sur les lèvres. Il n'avait pas encore réalisé la vérité.

— Je n'y comprends rien, renchérit-il. Comment il a pu être mis au courant de... ça ? Je veux dire, on était les deux seuls à savoir...

Il s'interrompit en avisant mes larmes. Son hésitation devint palpable, avant qu'un doute terrible ne traverse son visage. Ses traits s'affaissèrent, comme s'il osait à peine envisager l'éventualité qui venait de s'imposer à son esprit.

— Quand il a dit que tu étais parvenue par miracle à le contacter... il mentait, n'est-ce pas ? Je veux dire, évidemment, il s'en sert comme excuse...

Voyant que je n'ouvrais pas la bouche, il commença à marcher de long en large.

— Enji, là, j'ai besoin que tu me rassures parce que je sens que je vais devenir fou, sinon. Alors, rassure-moi et dis-moi que ce que tu avais tellement peur de me dire tout à l'heure... dis-moi que ça n'a aucun rapport avec ça !

Je ravalai un sanglot, cherchant la manière d'avouer mes fautes. Je savais que les mots que j'allais prononcer allaient délimiter à jamais la zone de guerre dans laquelle j'allais me piéger.

— Je ne peux pas te dire ça, lâchai-je d'une voix douloureuse. J'aimerais tellement revenir là-dessus, mais je ne peux pas.

J'eus envie de cacher mon visage entre mes mains, mais songeai que je lui devais au moins de le regarder bien en face.

— Je l'ai fait, avouai-je finalement. J'ai tout raconté à mon père pour rompre le pacte.

Media : Warzone, The Wanted.

Fin du chapitre 9